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Personne n'est reparti de Cancún les mains vides


Par Caroline De Vit, ÉcoRessources Consultants

Mots-clés : Entente de Cancun, Ban Ki Moon, Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC),gaz à effet de serre (GES), pays émergents, Accord de Copenhague,  atténuation, changements climatiques, pays visés à l'Annexe 1

 

"Le parfait ne doit pas être l'ennemi du bien." Ces termes, utilisés par Ban Ki Moon et repris par la Grenade vendredi dernier à Cancún, caractérisent bien le consensus qui a émergé des deux semaines d'intenses négociations sur le climat. Avec l'adoption à Cancún de textes proches de l'équilibre recherché par les différents pays, les principaux points de blocage des négociations sont laissés à plus tard. L'Entente de Cancún reflète ainsi les avancées sur la base desquelles la négociation d'un accord légalement contraignant pour la période post-2012 se poursuivra en 2011.

 

Le mérite de la présidence mexicaine

Tout au long de la conférence, la présidence du Sommet de Cancún, assurée cette année par la ministre des Affaires étrangères du Mexique, Patricia Espinosa, a sans cesse répété sa volonté d'assurer un processus transparent qui ne laisse de côté aucun pays. Les moyens mis en oeuvre pour garantir cette promesse ont permis de ne pas répéter les mêmes erreurs qu'à Copenhague qui, rappelons-le, avait abouti dans les derniers jours à une négociation restreinte entre une dizaine de pays et à un accord final largement controversé.

L'absence d'un éventuel "texte mexicain" négocié dans l'ombre comme ce fut le cas du texte danois à Copenhague a également facilité les négociations. Les délégués des différents pays ont d'ailleurs affirmé à plusieurs reprises leur appréciation du climat de négociation à Cancún qu'ils jugeaient favorable au compromis. Lors de la dernière séance plénière du vendredi soir, la présidence mexicaine a même eu droit des applaudissements de plusieurs minutes, une première pour un Sommet climat.

 

Un accord gagnant-gagnant

Tel qu'il avait été anticipé, Cancún a rempli les deux principales attentes qui lui étaient assignées. La première était celle de permettre dès 2011 l'initialisation de certains éléments fondamentaux comme le transfert de technologies propres ou encore le soutien aux efforts d'adaptation aux changements climatiques des pays en développement. Ce premier élément s'avère crucial pour renforcer la confiance entre pays en développement et pays développés. La seconde attente concernait l'adoption de décisions équilibrées permettant de poursuivre les négociations en 2011.

Et d'après les pays participants, cet équilibre est atteint. Du côté des pays en développement, ceux-ci sont repartis de Cancún en ayant reçu beaucoup, mais en donnant assez peu. En ce qui a trait au financement, ils ont par exemple obtenu la création d'un fonds vert pour le climat. Les arrangements institutionnels qui fourniront un soutien technique et technologique ont aussi fait l'objet d'un compromis en faveur de la réalisation d'actions d'atténuation et d'adaptation dans les pays en développement.

Pour les pays développés, les exigences de transparence des efforts d'atténuation des pays en développement, leur cheval de bataille depuis les négociations sur l'après 2012, leur ont été accordées en grande partie. Ils ont ainsi obtenu que les pays en développement inscrivent leurs actions dans un registre et que celles-ci respectent des critères de transparence qui seront plus stricts pour les actions bénéficiant d'un soutien financier ou technologique.  

 

Les cibles de réductions d'émissions, le nerf de la guerre 

L'ambition des cibles de réduction des pays développés demeure le point sensible des négociations. Et sur ce point, Cancún a simplement abouti à l'insertion des cibles que se sont donnés les pays développés dans un document distinct de l'entente. L'Entente rappelle également la nécessité d'augmenter l'ambition des cibles qui n'atteignent pas aujourd'hui le niveau nécessaire pour stabiliser la hausse des températures à 2 degrés Celsius, tel que requis par la science et suggéré par le GIEC.

Pour la plupart des pays en développement, la garantie que les pays développés Parties au protocole de Kyoto s'engageront dans une deuxième période sous Kyoto est nécessaire pour assurer la continuité du processus de négociation. C'est l'interprétation même de cette garantie qui a failli faire perdre le pied des négociations dans la nuit de vendredi dernier avec le refus de la Bolivie de signer une entente qui ne donne pas une telle garantie, ni ne présente des cibles ambitieuses. Après quelques heures supplémentaires de discussion, les pays sont toutefois parvenus au compromis qui permet aujourd'hui de parler d'Entente de Cancún et de la poursuite des négociations sur une deuxième période d'engagement sous Kyoto.

 

Les points de blocage à dénouer en 2011

Aux dires de certains, l'Entente de Cancún s'apparente à un équilibre délicat qui fait état des positions nationales des différents pays et marque un pas en avant dans le cadre du processus qui mènera au Sommet climat de l'année prochaine.

Le chemin n'est toutefois pas exempt d'embûches puisque des points de blocage demeurent. Il s'agira par exemple de s'accorder sur l'exemption éventuelle des droits de propriété intellectuelle sur les technologies propres ainsi que sur les modalités de compensation des pertes et dommages liés aux catastrophes climatiques dans les pays en développement. Finalement, les pays développés devront trouver une façon d'augmenter l'ambition de leurs cibles afin de ne pas arriver les mains vides à Durban en Afrique du Sud - lieu du sommet climat de 2011.

[COP16-climat]

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