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L'éolienne de la communauté



  • Le succès de la filière éolienne repose sur un élément crucial : une relation saine entre l'industrie et les communautés. Sans l'acceptation sociale, les projets d'exploitation semblent voués à l'échec. Mais certaines communautés ont adopté un projet et elles l'ont construit à leur image et selon leurs valeurs. Il se transforme alors en succès populaire.

    Dans les années 1990, trois importants secteurs de l'économie de la Gaspésie se sont effondrés : les forêts, les mines et les pêcheries, faisant grimper le taux de chômage autour de 30 %. "L'éolien a été vu par les gens de la Gaspésie comme un moyen de diversifier l'économie. Et il y avait aussi un fort désir d'assurer la création de richesse en région", raconte Frédéric Côté, résidant et natif de la région.

    Une grande partie des usines d'assemblage des turbines à éoliennes a été installée au Québec, dont 30 % sur le territoire de la Gaspésie. En 2009, on constate le plus bas taux de chômage en Gaspésie depuis 1987. "Les gens sont fiers du développement de la filière du vent dans leur coin de pays", croit Frédéric Côté, qui a reçu l'honneur du leadership collectif pour le Technocentre éolien lors du banquet de remise des prix de la CanWEA.

    Du privé au communautaire

    En 2004, la firme torontoise Skypower projetait de développer un parc de 134 éoliennes dans la MRC de Rivière-du-Loup. Des négociations houleuses entre le développeur et la communauté ont miné la confiance de part et d'autre et le projet a finalement avorté. "La MRC, intéressée au sujet, a décidé de plancher sur un projet communautaire qui allait générer de plus grandes retombées économiques pour le milieu. Une relation de confiance s'est construite entre les municipalités et l'entreprise Innergex, planifiant un partage égal des bénéfices", relate Nicolas Gagnon, directeur de l'aménagement du territoire de la MRC de Rivière-du-Loup. La MRC au coeur du Bas-Saint-Laurent a finalement présenté deux projets communautaires dans le cadre des appels d'offres lancés par Hydro-Québec. Les récipiendaires seront connus à la fin de l'année 2010.

    D'après Frédéric Côté, il est tout à fait normal que les résidants se posent des questions lorsqu'un projet d'éoliennes projette s'installer à proximité de chez eux. "En Gaspésie, on connaît l'éolienne depuis dix ans. Ailleurs au Québec, c'est nouveau. C'est le travail des promoteurs de bien expliquer leur projet." Des audiences du BAPE pour chaque développement éolien sont tenues dans les communautés concernées, permettant aux citoyens de faire valoir leur opinion, d'en découvrir les avantages et les inconvénients, d'en comprendre les retombées économiques.

    Le Québec favorable à l'éolien

    Les organisateurs du Congrès veulent démontrer que la filière éolienne n'est pas aussi mal perçue que celle des gaz de schiste. Selon un sondage de Léger Marketing commandé par l'Association canadienne de l'énergie éolienne (CanWEA), 75 % de la population québécoise est favorable à la poursuite du développement de la filière éolienne après 2015. L'étude menée entre le 12 et le 14 octobre 2010 auprès de 1 000 Québécois a aussi permis de mettre en lumière une perception qui tend à s'améliorer : 23 % des participants ont affirmé avoir une meilleure opinion de l'éolien par rapport à l'an dernier.  

    Des emplois et des profits pour la Gaspésie

    Jean-François Nolet, directeur des politiques de la CanWEA, a présenté les résultats d'une étude des retombées économiques de la filière de l'énergie éolienne sur le Québec. Les travaux du Dr Jean-Claude Thibodeau, économiste et ancien directeur de l'Institut national de la recherche scientifique (INRS), permettent d'envisager d'excellentes perspectives sociales et économiques pour la province. Selon le document fourni par la CanWEA, 37 000 emplois seront créés pendant la période de construction des parcs éoliens 2005 à 2015 et plus de 91 000 de plus entre 2016 et 2025.

    En termes monétaires, l'étude de la CanWEA prédit que les municipalités et les propriétaires terriens du Québec se partageront des redevances de près de 25 millions par année en 2015 et potentiellement jusqu'à 95 millions en 2025, soit jusqu'à la fin du contrat avec Hydro-Québec.

    L' Allemagne exemplaire

     En dehors des moulins à vent traditionnels, l'exploitation de l'énergie éolienne a vu le jour de l'autre côté de l'Atlantique dans les années 1970, en réaction à la crise du pétrole. Les premiers parcs ont été créés par des agriculteurs allemands pour augmenter leurs revenus. Selon Marc-Antoine Renauld, directeur des affaires et du développement d'Enercon, le mouvement s'est élargi aux municipalités et il est même devenu un important enjeu électoral pour les candidats aux élections municipales. L'investisseur privé est le principal acteur financier de la filière éolienne dans les communautés allemandes. Des intérêts de 7 à 8 % en capital garanti sont assurés pour chaque projet de 10 à 15 éoliennes.

    Lors du banquet de remise des prix de la CanWEA, tenu hier mardi, Peter Robinson, chef de la direction de la Fondation David Suzuki a rappelé aux membres de l'industrie éolienne que ceux-ci faisaient partie des "bon gars". En effet, le Québec a besoin d'eux pour s'affranchir des énergies sales comme les gaz de schiste et se tourner vers l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables.

    Un article signé Amélie Lévesque, pour GaïaPresse.

    Mots-clés : énergie, filière éolienne, communauté, acceptabilité sociale, Gaspésie, Bas-Saint-Laurent, Association canadienne de l'énergie éolienne (CanWEA).

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