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Big Data: la France peut gagner, si...

Le Big Data est avant tout une révolution industrielle. La technologie n'est que « l'arme » qui permet d'assurer la suprématie sur le champ de bataille. Et la bonne nouvelle, c'est que la France a tous les atouts pour la gagner.

Publié le 02 octobre 2014 à 12h22, modifié le 02 octobre 2014 à 12h22 Temps de Lecture 4 min.

Le Big Data est souvent décrit comme une révolution technologique de valorisation des données massives. En réalité, c'est avant tout une révolution industrielle. La technologie n'est que « l'arme » qui permet d'assurer la suprématie sur le champ de bataille.

Et la bonne nouvelle, c'est que la France a tous les atouts pour la gagner, y compris un gouvernement conscient de cet enjeu ! Mais pour être au niveau de ce défi, pour transformer les risques liés au Big Data en opportunités, il faut que tous les acteurs se mobilisent autour de ce grand projet ; que l'Etat lui-même, grand opérateur de données, soit un acteur phare du dispositif et se montre exemplaire en la matière ; et qu'un certain nombre de conditions académiques et juridiques soient remplies.

C'est tout le sens des actions inscrites dans le plan Big Data de la Nouvelle France industrielle – lancé par Arnaud Montebourg en 2013 - que nous avons présenté aux ministres de l'économie, de l'industrie et du numérique.

Après la révolution numérique des années 1980-1990, celle de l'Internet grand public, des réseaux sociaux et du mobile, bouleverse les modèles et les hiérarchies : les « majors » de la musique s'effacent devant Deezer et Spotify, les agences de voyages devant Booking.com ou Expedia, tandis que les opérateurs télécoms voient la valeur économique de leurs infrastructures être captée par les géants du numérique.

UN ENSEMBLE D'ÉCOSYSTÈMES HYBRIDES ET DE PLATES-FORMES

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Avec le Big Data, les grands groupes commencent à utiliser l'énorme quantité de données dont ils disposent sur les millions de clients qui leur font confiance. Ils deviennent en mesure de modifier profondément le paysage concurrentiel, leurs relations avec les consommateurs et leur position dans la chaîne de valeur des industries les plus traditionnelles. Et en se montrant capables de mobiliser des capitaux considérables : 1,2 milliards de dollars pour la dernière levée de fonds de d'Uber, dans le domaine de la mobilité urbaine !

Ces capitaux leur permettent d'attaquer ces nouveaux marchés avec des taux de croissance dignes de startups internet, en réinventant les modèles économiques, comme prétendent le faire Tesla dans l'automobile ou SpaceX dans le spatial.

En France, sans une prise de conscience rapide, des secteurs entiers comme l'assurance, la banque, la distribution, l'automobile, l'énergie, et d'autres encore risquent de voir leur positionnement dans la chaîne de valeur réduite au rôle de sous-traitant « technique », avec une très forte pression sur les marges et un risque potentiellement fatal pour les plus faibles.

Le monde de demain sera un ensemble d'écosystèmes hybrides et de plates-formes, et non plus une cohabitation d'industries indépendantes. Ainsi, l'univers de la voiture connectée réunira par exemple des constructeurs, des assureurs (la propriété cédant le pas a l'usage, l'assurance aura tendance à être incluse dans les services), des géants du numérique comme Google, Apple et Amazon, ou encore des start-ups de plus en plus nombreuses.

UN LEVIER DE CROISSANCE MAJEUR

Et nul ne sait quels seront les leaders qui émergeront de ces nouveaux écosystèmes. Il serait naïf et contre-productif de tenter de bloquer l'essor en France des géants américains. Nous devons par contre les observer pour prendre la mesure des défis à relever plutôt que comme des ennemis.

Des métiers vont disparaître dans les décennies à venir mais de plus nombreux encore vont apparaître. Le Big Data va constituer un levier de croissance majeur pour la France. Il peut représenter plus de 130 000 emplois d'ici à 2020, que ce soit chez les fournisseurs de technologies et de services, ou dans les fonctions liées au Big Data au sein des entreprises.

Notre pays peut construire un avantage concurrentiel permettant en particulier de développer de nouvelles start-up françaises à la manière de Criteo, fondée en 2008, cotée au Nasdaq et aujourd'hui leader du « reciblage » publicitaire devant Google. Big Data : ‎la France peut gagner cette bataille si elle traite les deux contraintes majeures qui pèsent aujourd'hui sur son essor : la disponibilité de compétences d'un nouveau type – nommée « data scientist » – et les règles de croisement des données, héritées d'un monde où les réseaux sociaux n'existaient pas.

Informaticiens et mathématiciens français sont plébiscités dans le monde, le Big Data étant l'alliance de ces deux disciplines. La France possède une carte maîtresse: l'esprit même de son système éducatif, parfaitement adapté à cet enjeu.

ACTUALISATION PERMANENTE

Mais l'État doit aller plus loin encore, augmenter dès cette année les contingents de spécialistes, pour fournir aux industries high-tech françaises ces ressources, rares dans le monde entier.

Le Big Data reposant sur la réutilisation et le croisement de données, son développement en France va très vite se heurter au principe de « respect de la finalité initiale de la collecte des données » d'une loi Informatique et Libertés qui date de 1978. L'État doit faciliter l'évolution de notre cadre réglementaire pour permettre l'innovation autour des nouveaux usages. Récemment, l'affaire Snowden a confirmé la nécessaire prudence dont nos sociétés doivent faire preuve dès lors qu'il s'agit d'autoriser (ou non) l'usage des données informatiques.

Mais ces principes doivent être actualisés en permanence, sous peine de prendre du retard sur des pays qui ne s'embarrassent pas de telles précautions. C'est pourquoi nous explorons avec la CNIL dans le cadre du plan Big Data un nouveau cadre d'utilisation des données, dans le but « d'industrialiser » et d'accélérer le processus d'agréments secteur par secteur – de sorte qu'ils ne puissent plus constituer un frein. Sans ouvrir les données à tous vents, il s'agit d'adopter une démarche d'expérimentation et d'innovation.

La notion de réciprocité permettra à nos entreprises d'atteindre un niveau de performance au moins égal à celui de leurs concurrents internationaux. Un puissant vivier de « data scientists » et un cadre règlementaire adapté : voilà des conditions préalables, tout à fait à notre portée, qui permettront à l'économie française de profiter pleinement de la révolution du Big Data.

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