Forum de collaboration multipartite,
3e & 4e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6833

ECOSOC: Le Forum sur la science, la technologie et l’innovation s’achève sur fond d’appels pour l’adoption de politiques basées sur des faits

Le deuxième Forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable s’est achevé aujourd’hui, avec une multiplicité d’appels engageant les décideurs à tenir compte des faits scientifiques lors de leurs prises de décisions.

Organisé par le Conseil économique et social (ECOSOC), ce Forum, qui s’est déroulé sur deux jours, a été marqué par la tenue de pas moins de 13 tables rondes et de plusieurs manifestations parallèles.

Les représentants d’États Membres, d’organisations internationales, d’organisations de la société civile, du secteur privé, scientifiques, innovateurs et jeunes étudiants, ont souligné, avec emphase, que la science, la technologie et l’innovation ne doivent pas constituer une fin en soi, mais plutôt être des outils au service du développement durable.

Aujourd’hui, de nombreux appels ont également été lancés pour engager les décideurs à tenir compte de la science lors de l’élaboration et l’adoption de mesures destinées à appuyer la réalisation des objectifs de développement durable.

La Directrice exécutive de l’organisation de recherche sur les politiques en matière de science, de technologie et d’innovation, de la Tanzanie, Mme Bitrina Diyamett, a constaté que de nombreuses politiques, notamment en Afrique, ne sont pas fondées sur des faits en raison d’un manque d’expertise dans les domaines de la science, la technologie et l’innovation, avertissant en outre que si les décideurs ne maitrisent pas ces domaines, ils risquent de ne pas débloquer les fonds nécessaires pour renforcer les capacités en la matière. 

« Lorsqu’ils élaborent des politiques, les gouvernements doivent respecter non seulement les lois nationales, mais aussi les lois de la nature », a renchérit la Présidente de l’Académie des sciences des États-Unis, Mme Marcia McNutt, qui a averti que lorsque les dirigeants refusent d’écouter la science, ils mettent en danger le peuple. 

Cette dernière a aussi évoqué « ces temps d’incertitudes » que vivent les chercheurs aux États-Unis, la nouvelle Administration américaine semblant tourner le dos à la science et aux changements climatiques.

Au cours de cette journée, plusieurs mises en garde ont par ailleurs été formulées au sujet des conséquences néfastes que peuvent toutefois avoir la science, la technologie et l’innovation.

Professeur à l’Université d’Oxford, au Royaume-Uni, Mme Xiaolan Fu s’est notamment attardée sur l’impact de l’intelligence artificielle et de la robotique qui, a-t-elle avertit, risquent de faire disparaître 16% des emplois actuels.

Aussi a-t-elle plaidé pour l’adoption de politiques conçues pour favoriser des changements technologiques qui appuient le développement durable sans aller à l’encontre des intérêts des êtres humains. 

Ce Forum qui va se tenir jusqu’en 2030 s’inscrit dans le cadre du Mécanisme de facilitation des technologies, mandaté par le Programme d’action d’Addis-Abeba et le Programme de développement durable à l’horizon 2030, a opportunément rappelé, dans ses remarques de clôture, le Président de l’ECOSOC, M. Frederick Musiiwa Makamure Shava (Zimbabwe). 

Afin de permettre aux parties prenantes d’échanger entre les sessions, l’ONU est prête à mettre sur pied une plateforme virtuelle dans le cadre du Mécanisme de facilitation des technologies, afin de servir de passerelle entre les financements et les initiatives favorables aux objectifs de développement durable. 

Pour faire avancer les choses, le Coprésident du Groupe de 10 experts chargé d’appuyer le Mécanisme de facilitation des technologies, M. Bill Colglazier, a appelé à pérenniser le Mécanisme jusqu’en 2030.  Il a aussi plaidé pour un échange d’expérience avec d’autres foras similaires qui ont court à travers le monde, proposant en outre d’organiser des réunions régionales de même calibre que le Forum.

Les coprésidents du Forum, M. Macharia Kamau (Kenya), et M. Vaughan Turekian (États-Unis) ont salué, de leur côté, l’engouement qu’a connu cette deuxième édition du Forum. 

À noter que l’Assemblée générale organisera demain, mercredi 17 mai, à partir de 10 heures, une manifestation de haut niveau relative à la campagne pour la réalisation des objectifs de développement durable sur l’innovation.

FORUM DE COLLABORATION MULTIPARTITE SUR LA SCIENCE, LA TECHNOLOGIE ET L’INNOVATION POUR LA RÉALISATION DES OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Session 3: Enseignements tirés des moyens de renforcer l’influence de la science, de la technologie et de l’innovation sur les objectifs de développement durable– souligner le caractère intersectoriel de la science, de la technologie et de l’innovation

Cette table ronde a été l’occasion de souligner que la mise en œuvre des objectifs de développement durable dépend de l’adoption de mesures fondées sur des faits scientifiques.  Elle a notamment débouché sur une discussion sur la meilleure façon d’aider les décideurs à tenir compte de la science dans leurs décisions.  Le rôle des start-up dans l’économie nationale a aussi été mis en avant, ainsi que la nécessité de développer des programmes éducatifs qui enseignent des compétences numériques et techniques

Déclarations liminaires                             

M. AUGUSTIN JIANU, Ministre de la communication et de la société de l’information de la Roumanie, a souligné les bienfaits de la technologie et de l’innovation, que ce soit l’utilisation d’une application pour téléphone intelligent ou l’usage que font les dirigeants du monde des médias sociaux comme mécanisme de gouvernement.  Ces technologies ont transformé notre réalité, mais nous ne sommes pas toujours conscients de l’impact et de la nature de ce changement, a-t-il indiqué.  Il a donc estimé important d’élaborer un modèle qui permet aux pays d’utiliser la science, la technologie et l’innovation pour réaliser les objectifs de développement durable.

Le Ministre a ensuite indiqué que la Roumanie fait face à des défis dans le domaine de la création d’emplois, tout en enregistrant une augmentation du nombre de diplômés en science, en technologie, en ingénierie ou encore en mathématiques.

Il a reconnu que pour créer de nouveaux emplois et promouvoir l’innovation, son pays devra investir non seulement au niveau local mais aussi au niveau national, et ce, de manière efficiente.  Il a indiqué que les start-up sont essentielles à l’amélioration du PIB, notant que les pays ayant une importante « culture de start-up » ont démontré que la meilleure stratégie de distribution des ressources consiste à renforcer l’ambition, la créativité et l’esprit d’initiative d’une nation.

Pour la Roumanie, a-t-il poursuivi, la solution devient évidente: les priorités nationales doivent être traduites en des critères plus vastes ciblant les segments de l’économie qui doivent être développés.  Il a recommandé de distribuer les fonds aux start-up à l’issue de compétitions nationales larges et ouvertes.  En outre, en appuyant les projets susceptibles d’avoir le plus important impact au niveau social, économique et technologique, les gouvernements pourraient aligner leur investissement dans les start-up sur les priorités nationales.

M. PETER GLUCKMAN, Conseiller scientifique du Premier Ministre de la Nouvelle-Zélande, a indiqué que pour mettre en œuvre des objectifs de développement durable, les responsables politiques doivent adopter des mesures fondées sur des faits scientifiques ce qui, a-t-il affirmé, leur permettra de réaliser des progrès notables au niveau national.  Il a constaté que de plus en plus de pays mettent sur pied des mécanismes de conseils scientifiques à l’échelon national qui jouent un rôle important en matière de développement.  Il a ensuite engagé l’ONU à mettre davantage l’accent sur le partage de conseils scientifiques « cohérents et consistants » avec les États Membres.  Il a également émis des doutes quant à l’impact, sur le long terme, du Conseil scientifique consultatif  établi par le Secrétaire général, tout en en reconnaissant le potentiel.  Il a également recommandé d’envisager d’allier les recherches environnementales aux recherches fondamentales. 

Constatant par ailleurs que la réalisation des objectifs de développement durable est avant tout basée sur des décisions nationales, il a estimé nécessaire de tisser davantage de liens entre les recommandations mondiales et les organes nationaux de mise en œuvre.  Il s’est également inquiété de l’écart entre les besoins des pays en matière de science, technologie et innovation, et les ressources dont ils disposent.

Mme MARY SNAPP, Vice-Présidente de « Microsoft Philanthropy », a indiqué que le monde vit actuellement sa quatrième révolutionnaire industrielle dont le rythme est 10 fois plus rapide et « 100 fois plus mondial »  que les précédentes. Elle a signalé qu’une des préoccupations qui en découle est que les gains individuels ne seront pas aussi importants que les gains des Gouvernements ou des entreprises, et qu’il est de ce fait impératif de veiller à ce que personne ne soit laissé de côté. Il y aura des revers et il y aura des percées, et il faudra y faire face et s’y préparer, a-t-elle indiqué.

Selon Mme Snapp, les innovations se font dans trois principaux domaines. Tout d’abord des innovations physiques, comme, par exemple, les imprimantes ou les voitures autonomes; des innovations biologiques qui permettront d’améliorer les systèmes de santé et enfin des innovations numériques, notamment les applications pour téléphones intelligents.

La panéliste a toutefois constaté que les promesses technologiques n’ont pas été totalement exploitées, dénonçant notamment le fait que 60% de la population mondiale n’a toujours pas accès à des services Internet abordables et de qualité.  Mme Snapp a appelé à promouvoir une éducation qui enseigne des compétences numériques et techniques, ainsi qu’à une meilleure maîtrise, sécurisation et compréhension des données sur la santé, l’éducation et l’environnement, entre autres.  La panéliste a aussi jugé nécessaire de développer l’entreprenariat local qui utilise la technologie.  « Nous devons utiliser la technologie même si on sait qu’elle peut nous bouleverser », a plaidé Mme Snapp.  

Débat interactif

Pourquoi les gouvernements n’acceptent-ils pas les avis scientifiques? C’est suite à cette question posée par un représentant de la société civile que le délégué de l’Éthiopie a demandé des conseils pour convaincre les universitaires à travailler avec les gouvernements, tandis que son homologue de la Zambie a voulu savoir par quels moyens aider les ministres à comprendre l’importance de la science, la technologie et l’innovation. 

Reconnaissant que la science est souvent difficile à expliquer, la Vice-Présidente de « Microsoft Philanthropy » a notamment recommandé aux scientifiques de traduire le langage scientifique en termes simples et compréhensibles non seulement à l’intention des décideurs politiques mais aussi pour le public.  « Il est important de rétablir la confiance entre les universitaires et les décideurs politiques », a-t-elle d’ailleurs estimé.

« La science ne fait pas de politique », a réagi le Conseiller scientifique du Premier Ministre de la Nouvelle-Zélande qui a engagé les deux parties à faire l’effort de se comprendre mutuellement.  Il a également avancé que l’appréhension des gouvernements à utiliser les technologies de l’information et de la communication, découle souvent du fait qu’ils ne les maitrisent pas et n’en comprennent pas toujours les avantages.  La science doit s’adapter à cette situation, a-t-il estimé.  

La représentante de l’Alliance durable pour les océans a ensuite voulu savoir comment faire en sorte que la science, la technologie et l’innovation profitent aux jeunes entrepreneurs, ce qui a valu au Ministre de la Roumanie de revenir sur la nécessité d’expliquer, à la population, le rôle, l’importance et les implications de la science, de la technologie et de l’innovation.  Il a aussi recommandé d’appuyer le développement d’idées dans ces domaines.

Le délégué de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) a par ailleurs préconisé de vulgariser et de diffuser dans toutes les langues, y compris la langue française, le savoir relatif à la science, la technologie et l’innovation. 

Cette table ronde était modérée par Mme HEIDE HACKMANN, Directrice exécutive du Conseil international des unions scientifiques et membre du Groupe des Dix- TFM.

Session 4: Les plans et politiques nationaux en matière de science, de technologie et d’innovation en vue de la réalisation des objectifs de développement durable

Les participants à cette table ronde ont partagé l’expérience de leur pays en matière de politiques relatives à la science, l’innovation et la technologie.  De ces exposés, on retient que chaque pays a mis en place des institutions censées promouvoir des solutions innovantes aux problèmes auxquels elle fait face, y compris, depuis deux ans maintenant, l’impératif de réaliser les objectifs de développement durable.

Au début de cette session, Mme Rebecca Firth a présenté le projet « Missing Maps » qui s’appuie sur le travail réalisé par l’équipe humanitaire OpenStreetMap (HOT) et d’autres acteurs de la cartographie afin de localiser les lieux, dans le monde, où vivent les personnes les plus vulnérables.  Ainsi, les régions vulnérables aux crises sont identifiées et cartographiées en prévision de crises.  Lorsqu’une catastrophe se produit, les humanitaires et les autres intervenants peuvent utiliser les cartes déjà disponibles, économisant de fait un temps précieux pour sauver les vies.  Le projet vise à cartographier les lieux les plus vulnérables du monde dans un délai de deux ans.

M. ABDULLAH LOOTAH, Directeur général de l’Autorité fédérale sur les statistiques et la compétitivité des Émirats arabes unis, a indiqué que le Gouvernement avait déclaré 2014 comme l’année de l’innovation afin de promouvoir l’esprit d’innovation au sein du public.  Une stratégie nationale pour l’innovation a été lancée la même année pour renforcer six objectifs de développement.  Il a notamment indiqué que le pays s’efforce d’améliorer les services publics en misant sur l’innovation tout en mettant l’accent sur le capital humain.   En janvier 2017, le Comité national pour la réalisation des objectifs de développement durable a été mis sur pied, et ses membres ont pour mission de trouver des solutions innovantes pour la réalisation des 17 objectifs.  Le Comité fait des rapports qui sont ensuite transmis au Conseil des ministres.

M. MICHIHARU NAKAMURA, Conseiller du Président de l’Agence nationale japonaise de la science et de la technologie, a indiqué que le Japon a décidé de véritablement miser sur l’innovation pour réaliser les objectifs de développement durable.  Il a invité les parties prenantes à travailler en synergie pour forger des sociétés dans lesquelles la technologie est utilisée pour le bien de tous.  On a besoin de mettre en valeur les ressources humaines pour que les technologies puissent être utilisées au niveau des communautés, a-t-il aussi souligné avant de présenter le plan national du Japon qui s’appuie sur cinq points et qui vise à atteindre l’objectif « 5.0 » qui verra la science, la technologie et l’innovation pleinement intégrées dans la vie sociale.

De même, les universités japonaises ont initié des travaux de recherche afin de contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable.  Un livre, publié par les autorités nationales, présente les « meilleures pratiques du Japon dans la réalisation des objectifs de développement durable ».  Le panéliste a ensuite plaidé pour la mise en valeur des ressources humaines et pour le partage de la technologie avec les pays en développement.

 Mme MARCIA MCNUTT, Présidente de l’Académie des sciences des États-Unis, a parlé des activités de son institution qui présente des rapports au Gouvernement des États-Unis et donne ses avis sur les questions de société.  Elle a cité l’exemple de 2009 sur la justice qui a démontré que l’application de la peine de mort était sujette à controverse, étant donné que les preuves qui guident les condamnations ne résistent pas souvent aux démonstrations scientifiques.  Elle a indiqué que grâce à ce rapport, le Gouvernement a mis un frein à l’application expéditive des peines capitales dans le pays. 

La panéliste a toutefois déploré les nombreux cas où les dirigeants refusent d’écouter la science « à leurs risques et péril », mettant ainsi en danger le peuple.  Elle a souligné que lorsqu’ils élaborent des politiques, les gouvernements doivent respecter non seulement les lois nationales, mais aussi les lois de la nature.  Elle a plaidé pour l’implication de la population dans la prise de décisions, prévenant en outre que la science soit s’adapter au contexte culturel local pour pouvoir être acceptée par la population.

Après ces exposés, le représentant de la Chine a indiqué que son gouvernement entend créer des zones modèles où seront expérimentées des approches novatrices pour la réalisation des objectifs de développement durable, en tenant compte de la contribution de la science, la technologie et l’innovation.

Le Qatar s’est pour sa part félicité d’avoir alloué 2,8% de son produit intérieur brut (PIB) à l’innovation et le pays est en train de terminer la construction de son observatoire sur la science et les technologies. 

« Ces exposés de pays sont bien beaux, mais qui va accepter de partager son expertise avec les pays en développement? » s’est toutefois interrogée la déléguée du Swaziland, suite à quoi le représentant des Émirats arabes unis a rappelé que l’objectif de développement durable 17 porte sur la création de partenariats.  La représentante du grand groupe des enfants et des jeunes a pour sa part plaidé pour un partage à l’échelle mondiale des connaissances dans les domaines de la science, la technologie et l’innovation.  

« Qui va aussi nous accompagner? » a demandé à son tour, sur le ton de l’humour, la représentante de l’Académie des sciences des États-Unis.  En ces temps d’incertitudes, avec la nouvelle Administration américaine qui semble tourner le dos à la science et aux changements climatiques notamment, les chercheurs des États-Unis se posent des questions, a-t-elle notamment expliqué.  

Cette séance était animée par M. BILL COLGLAZIER, professeur au Center for Science Diplomacy, Association américaine pour le progrès de la science, et Coprésident du Groupe de 10 experts chargé d’appuyer le Mécanisme de facilitation des technologies.

Session 5: Renforcement des capacités scientifiques et technologiques et des capacités d’innovation en vue de la réalisation des objectifs de développement durable

Au cours de cette session, les participants ont émis des recommandations en matière de renforcements des capacités scientifiques et d’innovations qu’ils ont adressées aux gouvernements, au secteur privé et au système des Nations Unies.  Elles visent à libérer le potentiel de la science, de la technologie et de l’innovation pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable, surtout dans les pays en développement.

Au préalable, les participants ont écouté Mme JIWON PARK présenter le travail de CodePhil, une ONG gérée par des étudiants, qui vise à autonomiser et connecter les jeunes vivant dans les zones rurales des Philippines en les aidant à maîtriser la culture numérique.  M. BAILEY ULBRICHT a ensuite parlé du travail de Paper Airplanes qui utilise la vidéo pour enseigner les langues et des techniques de marketing aux personnes vivant dans des zones de conflit afin de les aider à suivre des études et à obtenir un emploi.

Déclarations liminaires

M. GEOFFREY S. BOULTON, Président du Comité pour les données scientifiques et technologiques (CODATA), a indiqué que le passage au numérique, deux décennies plus tôt, a déclenché une révolution historique en termes d’accès et de dissémination de l’information, créant un potentiel d’acquisitions socioéconomiques et favorisant le développement de l’innovation.  Il a souligné que l’on peine encore à en comprendre toutes les conséquences, mais qu’à l’heure actuelle, les données sont devenues un capital des plus importants et un outil puissant.  La communauté scientifique saisit toutes ces occasions offertes par la révolution numérique. M. Boulton a souligné l’importance de promouvoir la science de manière équitable dans le monde, relevant toutefois que bien que la pratique scientifique se fait dans le cadre de silos nationaux.  Il a aussi constaté que la question du financement demeure un défi, exhortant les entités nationales à fournir des ressources suffisantes à l’éducation et à la recherche. Il a également jugé nécessaire de tenir compte de l’impact de l’automatisation sur la main-d’œuvre dans le monde.

S’agissant des renforcements des capacités des individus, M. Boulton a suggéré la création de plateformes en Afrique et en Amérique latine, notant le potentiel, en la matière, de la coopération Sud-Sud.  Il a aussi plaidé pour une meilleure formation de personnes qui s’occupent des données. 

Mme BITRINA DIYAMETT, Directrice exécutive de l’Organisation de recherche sur les politiques en matière de science, de technologie et d’innovation, de la Tanzanie, a dit que le développement durable ne pourra être réalisé que si les pays pauvres acquièrent des capacités technologiques et les utilisent de façon inclusive.  Elle a insisté sur l’importance de bien former les scientifiques, de fournir une éducation de qualité dans les domaines de la science, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques, mais aussi de combler le fossé entre les hommes et les femmes.  La panéliste a souligné que les marchés ne peuvent allouer les ressources nécessaires à l’innovation, et que l’élaboration de politiques est de ce fait essentielle. Elle a constaté que de nombreuses politiques, notamment en Afrique, ne sont pas fondées sur des faits en raison d’un manque d’expertise dans les domaines de la science, la technologie et l’innovation.  En outre, dans les pays les plus pauvres, l’innovation dépend aussi du transfert de technologie.

Mme Diyamett a appelé à une meilleure formation des décideurs politiques, soulignant que si les décideurs ne comprennent pas la science, la technologie et l’innovation, ils risquent de ne pas débloquer les fonds nécessaires pour renforcer les capacités en la matière.  Elle a également recommandé au secteur privé et industriel de se former dans la gestion de l’innovation.  Il faut en outre examiner l’impact de l’automatisation sur la réduction des coûts dans les pays en développement.

M. JAMES QUERRY, professeur associé à l’Université de Philadelphie, États-Unis, a attiré l’attention sur le rôle de la technologie géospatiale dans la réalisation des objectifs de développement durable, précisant que celle-ci permet de mieux comprendre les défis et les opportunités qui existent sur le terrain.  Il a appelé les scientifiques à développer une langue commune pour pouvoir travailler ensemble, les gouvernements à assurer le financement des recherches, et l’ONU à faciliter l’octroi de fonds et d’assistance technique, notamment aux pays en développement.

M. Querry a aussi plaidé pour un plus grand engagement citoyen, soulignant le rôle important que jouent les communautés dans les prises de décisions. Le panéliste a aussi appelé à fournir une assistance financière et technique pour créer des systèmes de partage de données, ajoutant que l’élaboration de politiques en la matière incombe aux gouvernements.

Débat interactif

La représentante de la Chine a indiqué que son Gouvernement a créé des plateformes de vulgarisation pour partager les connaissances, et organisé plus de 500 ateliers de formation pour des chercheurs de 130 pays.  Le représentant du Bangladesh a souligné l’importance du décloisonnement dans le domaine de la science, de la technologie et de l’innovation.

Cette table ronde a été animée par M. ROMAIN MURENZI, Directeur de la Division des politiques scientifiques et du renforcement des capacités à l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science, et la culture (UNESCO).

Session 6: Nouvelles frontières: l’évolution de la science, de la technologie et de l’innovation et ses conséquences en vue de la réalisation des objectifs de développement durable

La table ronde a permis de souligner que l’évolution de la science, de la technologie et de l’innovation, aura des conséquences à la fois positives et négatives, l’intelligence artificielle et la robotique pouvant, par exemple, remplacer les travailleurs.  Les appels se sont multipliés en faveur de l’adoption de politiques capables d’orienter ces changements de manière à appuyer le développement durable et non pas à l’encontre des intérêts des humains.     

En ouvrant la session, l’animateur, M. MIGUEL RUIZ CABANAS, Sous-Secrétaire aux affaires multilatérales et aux droits de l’homme au Ministère des affaires étrangères du Mexique, a estimé qu’il faut démocratiser la recherche afin qu’elle bénéficie à tous.

Mme XIAOLAN FU, professeur à l’Université d’Oxford au Royaume-Uni, a affirmé que les nouvelles frontières de la science, la technologie et l’innovation rendent l’impossible possible et apparaissent de ce fait positives pour l’autonomisation des hommes et femmes.  Elle a fait observer que l’intelligence artificielle aura des conséquences à la fois positives et négatives.  La robotique, a-t-elle expliqué, peut par exemple améliorer les conditions de travail, mais elle va également remplacer les travailleurs, surtout ceux qui n’ont pas une bonne formation.  Les grandes banques remplacent déjà les traducteurs par des logiciels, a-t-elle indiqué, précisant qu’il apparaît probable que 16% des emplois actuels seront perdus à cause de l’intelligence artificielle et de la robotique.  En outre, ce sont les travailleurs les plus âgés qui seront les plus affectés car leur âge ne leur permettra pas d’apprendre aisément de nouvelles manières de travailler.  La panéliste a plaidé pour l’adoption de politiques conçues pour guider les changements technologiques en faveur du développement durable et non pas à l’encontre des intérêts des humains.  Elle a aussi jugé nécessaire d’initier des politiques qui mettent en place des mesures alternatives pour réparer les tares et dérives de la technologie sur la société.  

Mme ELLEN JORGENSEN, Fondatrice de l’organisation GenSpace, basée à New York, a ensuite pris la parole.  Elle a expliqué que Genspace est une organisation à but non lucratif dédiée à la promotion de la science et qui entend promouvoir l’innovation scientifique au niveau de la base.  Elle a parlé de la biotechnologie et des recherches dans le domaine de la génétique et du séquençage des génomes qui ont des applications concrètes sur la vie de l’être humain.  Ces études peuvent, par exemple, permettre de sélectionner des semences les plus résistantes afin d’accroître la productivité agricole, a-t-elle indiqué.  On peut également modifier le génome des anophèles afin de réduire la morbidité et la mortalité relative au paludisme.  La panéliste a appelé à démocratiser la biotechnologie et à faire en sorte que cette science soit ouverte à tous et œuvre au bien-être général.  

M. JOSE RAMON LOPEZ-PORTILLO R., cofondateur du Center for Mexican Studies, a relevé que les sociétés et les institutions s’adaptent difficilement aux avancées rapides de la science, de la technologie et de l’innovation.  Il a mis en garde contre des applications malveillantes de la science qui pourraient conduire à des conséquences particulièrement dévastatrices.  Il a expliqué que les scénarios sont à la fois pessimistes et optimistes quant aux conséquences des avancées technologiques.  Il a appelé à des échanges à l’échelle internationale afin de minimiser les effets négatifs de l’évolution de la science, la technologie et l’innovation.  Le lien entre les universités, le secteur privé et les gouvernements seront importants pour coordonner ces innovations et assurer qu’ils profitent à tous, sous le contrôle de l’ONU, a-t-il précisé.

Débat interactif

Suite à ces interventions, les délégués de la Zambie et de la Tanzanie se sont inquiétés du fait que nombre des avancées évoquées ne profitent qu’à certains pays. 

Pour remédier à cet état de fait, le représentant de Practical action, une organisation de la société civile des États-Unis, a préconisé de partager les connaissances technologiques, notamment en faveur des pays en développement.

Il y a beaucoup d’argent dans la recherche, mais l’innovation qui en découle n’est pas toujours dédiée au développement durable, a toutefois regretté la panéliste de l’Université d’Oxford, tandis que le délégué de l’Organisation internationale de la Francophonie a appelé à tenir compte du principe de précaution afin d’éviter que les innovations ne deviennent des problèmes.

L’animateur de la session, M. Miguel Ruíz Cabañas du Ministère mexicain des affaires étrangères, a conclu en soulignant que les orientations des innovations, leurs conséquences positives ou négatives, dépendent grandement du bon vouloir des hommes politiques.  

Session 7: Contribuer à la mise en œuvre du Mécanisme de facilitation des technologies

Cette session a été l’occasion de faire le point sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Mécanisme de facilitation des technologies et dans la mobilisation du soutien financier et technologique nécessaires au Mécanisme.  Les participants ont abordé la question des renforcements des capacités en matière de science, de technologie et d’innovation et de la voie à suivre pour développer et maintenir la plateforme en ligne du Mécanisme de facilitation des technologies.

Déclarations liminaires                     

M. SHANTANU MUKHERJEE, Chef du Service de l’analyse des politiques, Division du développement durable au Département des affaires économiques et sociales (DAES), a indiqué que les trois étapes nécessaires au lancement de la plateforme en ligne du Mécanisme de facilitation des technologies ont été achevées.  Il a expliqué que différents types de mécanismes en ligne ont été répertoriés pour servir les usagers et que la  plateforme doit être conçue avec soin et être dynamique.  Des mutations importantes sont toujours attendues parce que la technologie évolue, a-t-il notamment indiqué, ajoutant que la plateforme ne sera efficace que si elle est suffisamment utilisée.  La question qui se pose maintenant est son financement, d’où la nécessité d’élaborer une stratégie qui assure sa viabilité future.  Il a aussi insisté sur l’importance de prendre des engagements sur le long terme. 

M. KLAUS TILMES, Directeur du commerce et de la compétitivité, Banque mondiale, a indiqué que plusieurs programmes de la Banque mondiale mettent l’accent sur la technologie et l’innovation dans le cadre du financement de start-up dans les pays en développement, en Afrique notamment.  Il a soulevé la question de savoir si les ressources sont utilisées de la manière la plus appropriée et effective au niveau international.  Le système des Nations Unies est-il suffisamment adapté à un monde en évolution constante? a-t-il notamment lancé.  Le panéliste a ensuite fait observer qu’il avait fallu un certain temps avant que les campagnes lancées en appui à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement aient un impact sur le terrain.  Il a par ailleurs appelé à un bon partage des tâches et à mobiliser le secteur privé.

Mme NINA HARJULA, membre du Conseil d’administration de Global Cleantech Cluster Association (GCCA) et Présidente du Conseil d’administration de « Nordic Innovation Accelerator » (NIA), a expliqué que le NIA a vu le jour suite au constat faisant état d’un manque de coopération internationale dans les domaines de la science, la technologie et l’innovation, tandis que la GCCA a été mise en place pour coordonner, au niveau mondial, les activités relatives à la science, la technologie et l’innovation ainsi que pour trouver les financements nécessaires à la recherche.  Elle a souligné les liens entre la croissance durable, une économie régionale résiliente, la sécurité de l’emploi et le bien-être, le tout étant facilité par le déploiement à large échelle de technologies à faible émissions de carbone.  Elle a aussi insisté sur l’importance d’avoir accès au capital, aux marchés et à la connaissance.

La panéliste a aussi évoqué l’organisation, depuis 2011, d’une compétition qui récompense les meilleurs innovateurs et à laquelle participent 700 entreprises chaque année.  Elle a par ailleurs précisé que le NIA vise à mettre en contact les entreprises en ligne. 

M. KURT VANDENBERGHE, Directeur de « Climate Action and Resource Efficiency », a indiqué que la politique européenne en matière de développement technologique privilégie une innovation plus ouverte, collaborative, en ligne, et basée sur des faits.  Le « Climate Action and Resource Efficiency » a investi 500 millions d’euros pour financer la recherche sur les maladies infectieuses, notamment, et a, par ailleurs noué, un partenariat avec l’Union africaine sur l’agriculture.  M. Vandenberghe a souligné la nécessité de la collaboration transfrontalière en matière de science, technologie et innovation qui sont, selon lui, une des solutions pour assurer la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Le panéliste a insisté sur la nécessité de « cocréer »  avec toutes les parties prenantes y compris les femmes.  Il a par ailleurs recommandé aux États Membres de consacrer 1% de leur PIB à la science, la technologie et l’innovation.

Débat interactif

À l’issue de ces interventions, la représentante de la Chine a indiqué que son Gouvernement a créé une banque de technologie verte pour appuyer sa politique de développement, tandis que son homologue du Bangladesh a mis en avant les 100 000 centres Internet qui ont été ouverts dans son pays ces dernières années.  Il a aussi indiqué que l’administration publique a été partiellement numérisée afin d’assurer une meilleure exécution des services.   

Le délégué de l’Organisation de la Francophonie (OIF) a toutefois regretté la faible présence du Mécanisme sur le continent africain, notant que celui-ci se trouve uniquement en Afrique du Sud.  

L’Afrique est plus que jamais laissée de côté, s’est exclamée la représentante de la Zambie qui a réclamé la refonte de l’Organisation mondiale du commerce, un investissement dans la science, la technologie et de l’innovation « pour rattraper le retard », et la création d’une « cartographie de la recherche » en Afrique afin d’appuyer la réalisation des objectifs de développement durable. 

Ses craintes ont été partagées par le représentant de la Banque mondiale, qui a jugé nécessaire de sensibiliser les dirigeants sur l’importance de la science, la technologie et l’innovation et leur apport à la réalisation des objectifs de développement durable. 

La représentante de « Nordic Innovation Accelerator » (NIA), a estimé de son côté qu’une gestion régionale du Mécanisme s’impose afin d’améliorer son efficacité et son utilité pour les gens qui vivent loin des centres.  Il faut un véritable engagement régional, a-t-elle souligné. 

Le Directeur de « Climate Action and Resource Efficiency », a par ailleurs appelé à trouver de nouveaux systèmes d’incitation pour les innovateurs et les scientifiques.  Il a aussi annoncé que l’Union européenne a créé un nouveau code de déontologie pour ses chercheurs afin qu’ils puissent répondre aux attentes de la société. 

Cette session était modérée par Mme HEIDE HACKMANN, Directrice exécutive du Conseil international des unions scientifiques (CIUS) et Présidente du Mécanisme de facilitation des technologies

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