Une brève histoire du futur de la mobilité

En 2048, voitures autonomes et drones d’urgence cohabitent pacifiquement… Dans cet exercice de prospective, NAVYA imagine le futur de la mobilité.
Une brève histoire du futur de la mobilité

En 2048, voitures autonomes et drones d’urgence cohabitent pacifiquement. Dans cet exercice de prospective, NAVYA, entreprise française spécialisée dans la conception et la construction de véhicules autonomes, électriques et robotisés, imagine un scénario en trois épisodes. Avec Usbek & Rica, elle a cherché à questionner nos imaginaires.

2010 – 2020

Le temps des expérimentations

Depuis plusieurs décennies, beaucoup de capitales mondiales se caractérisent par des embouteillages quasi permanents. Trop de voitures, pas assez de places de parking… Tandis que services publics et infrastructures urbaines s’avèrent inadaptés ou insuffisants, malgré la bonne volonté et les efforts des pouvoir publics. Une poignée de nouveaux entrants – Uber, Lyft, Didi – lance alors, avec un succès foudroyant, une multitude de nouveaux services de mobilité privés : covoiturage, partage de véhicules, chauffeurs à la demande ou location courte durée qui « disruptent  » l’industrie du transport mondial. La prise de conscience des problématiques environnementales précipite également l’avènement des voitures électriques, rendues possibles par les progrès des batteries Ion – Lithium.

Sur le plan technique, capteurs électroniques, dispositifs de géolocalisation, techniques de reconnaissance visuelle et apprentissage des machines (deep learning) atteignent une maturité suffisante et peuvent se combiner parfaitement pour inventer de nouveaux types de véhicules. Dès le milieu des années 2010, la possibilité de voitures conduites par des ordinateurs, et pouvant circuler en toute sécurité, fait son chemin. Les expérimentations relatives aux véhicules autonomes se succèdent à un rythme soutenu, notamment aux États-Unis, Dubaï ou Singapour. Elles sont menées tant par les géants du numérique que par des constructeurs historiques, mais aussi par de nouveaux entrants, spécialisés sur le sujet.

Entre 2015 et 2018, l’entreprise NAVYA vend une soixantaine d’AUTONOM SHUTTLES, navettes autonomes et électriques, dans plus de 16 pays et présente en 2017 le premier robot-taxi sur le marché mondial : AUTONOM CAB. 

2020 – 2030

Un vent de renouveau

Les premiers taxis autonomes, sans aucun personnel humain à bord, entrent en service au tout début des années 2020, à Las Vegas. Certaines mégalopoles ont désormais adapté leurs infrastructures, installant bornes de signalement, stations de recharge et autres capteurs de signalisation virtuelle tout au long des artères. Certains AUTONOMS de grande capacité font rapidement de l’ombre aux anciens services de transport publics, tramway et bus notamment. En Allemagne, à partir de 2025, certains tronçons d’autoroutes sont entièrement réservés aux voitures et aux camions autonomes. En 2028, Las Vegas interdit la circulation des véhicules conduits par des humains sur le fameux Strip, principale artère de la ville.

À partir de 2022, les véhicules sont fréquemment équipés de panneaux solaires, servant de mode de recharge complémentaire de la batterie principale, ou utilisés pour alimenter les fonctions annexes (chauffage, écrans d’affichage). La recharge des véhicules électriques cesse d’être un problème, d’autant que les stations de recharge automatisées et sans câble se multiplient, sur les parkings et sur les routes.

Difficile démocratisation des drones

La livraison de colis, sur route ou par les airs, est de plus en plus assurée par des AUTONOMS, produits par de nouveaux entrants spécialisés ou des fabricants de véhicules autonomes. De multiples technologies, comme les batteries à nanofils d’or, les batteries lithium à l’état solide, ou les batteries graphène et aluminium-air parviennent à maturité, offrant d’énormes densités de stockage, des durées de vie accrues et des temps de recharge extrêmement courts, 50 à 100 fois inférieurs aux batteries Ion-Lithium 10 ans plus tôt.

Illustration réalisée par Johan Papin pour Usbek & Rica

Les progrès en matière de drones électriques laissent d’ailleurs entrevoir la possibilité de les utiliser pour le transport des personnes. Dès le début des années 2020, une myriade de nouveaux constructeurs présente des modèles de passengers drones (drones à passagers), brouillant les frontières entre voitures, hélicoptères et drones. Si leur faisabilité technique et leur intérêt potentiel sont démontrés, leurs inconvénients (zones d’atterrissage, sécurité, coût) freinent leur démocratisation.

Se déplacer devient ludique

À partir de 2025, taxis et navettes autonomes terrestres se généralisent. Se déplacer n’est plus une activité stressante, accaparant 100 % de l’attention, mais un moment privilégié et confortable, dévolu à la relaxation, au divertissement ou au travail. Trajets et services sont personnalisés aux besoins des usagers. Ramassages scolaires et trajets réguliers sont optimisés en temps réel, tandis que les écrans des véhicules affichent actualités, messages publicitaires et recommandations ciblées. Certains véhicules commencent à proposer des services complémentaires comme l’organisation automatique de réunions (fréquemment tenues à bord), ou la mise à disposition de jeux ou d’équipements ludiques. Cette mobilité personnalisée permet également une prise en charge beaucoup plus fluide des personnes à mobilité réduite.

2030 – 2040

L’âge d’or des AUTONOMS

À partir du milieu des années 2030, la majorité des voitures produites sont dépourvues de volant, pédales et autres leviers de commande. Conduire soi-même un véhicule tombe peu à peu en désuétude, tout comme le fait de posséder sa propre voiture. Comme pour le cheval à l’ère de la révolution automobile, la conduite devient un hobby, pratiqué dans les campagnes ou sur des circuits fermés.

Les véhicules s’adaptent aux passagers, à leur santé et à leurs réactions émotionnelles. 

Dans le ciel, les premiers drones à passagers se généralisent, d’abord en 2029 avec des flottes privées. Seront ensuite autorisés les drones d’urgence, pour les hôpitaux et les services d’intervention en 2031, puis les passengers drones d’usage public, qui sont lancés en 2033 dans plusieurs villes américaines. Avant la fin de la décennie, on s’habitue, partout dans le monde, à circuler indifféremment au sol, dans les airs et sur les fleuves, via des services autonomes sur mesure. Les véhicules s’adaptent aux passagers, à leur santé et à leurs réactions émotionnelles. En particulier, les drones à passagers détectent angoisses, peur du vide et vertiges, et remplacent leurs parois vitrées par des images en réalité mixte incitant à l’apaisement.

Illustration réalisée par Matt Chinworth pour Usbek & Rica

Au niveau mondial, le nombre d’accidents enregistrés sur les routes atteint son taux le plus bas depuis 30 ans en 2035, tandis que les économies de productivité, notamment entraînées par la disparition des embouteillages, se chiffrent en centaines de milliards de dollars.

Dans les villes, parkings et stations-service sont reconvertis, le plus souvent en espaces verts ou en fermes solaires. Les premiers « aéroports urbains » voient le jour au milieu de la décennie, d’abord à Paris, San Francisco et New York. Installés sur des fleuves ou des stades reconvertis, ils accueillent les drones à passagers, dont le trafic est en augmentation constante.

Le rêve de la voiture volante

En 2037, entre sur le marché un luxueux SUV solaire à batteries ultralégères au graphène, dont la carrosserie est entièrement composée d’un alliage de pérovskite et de nanotubes de carbone. Il s’agit du premier SUV électrique qu’on ne recharge jamais ! La même année, on découvre le tout premier AUTONOM air/ terre. L’appareil est une confortable cabine sur roues dotée de rotors rétractables le transformant à volonté en drone à passagers. Au plus proche de l’idée populaire de « voiture volante » imaginée 100 ans plus tôt par la science-fiction, l’appareil fera le bonheur des New-Yorkais, première ville à l’adopter dès 2038.

La généralisation des Autonoms s’accompagne toutefois de mouvements de protestation. Plusieurs groupuscules militants, apparus dans les années 2020 et opposés par principe aux intelligences artificielles et aux robots, s’affirment et organisent des manifestations en Europe. Celles-ci sont vite minoritaires et disparaissent aussi vite qu’elles sont apparues.

2040 – 2050

Le MobiGrid, une ère nouvelle

La mobilité et le transport – sur terre, dans les airs, sur les fleuves et les mers – se caractérisent désormais par un vaste et fourmillant écosystème de plusieurs centaines de millions d’objets et véhicules intelligents et communicants, en mouvement permanent. L’ensemble forme le MobiGrid, se surimposant aux réseaux existants, et assurant le transport des colis, des marchandises et des personnes.

Les véhicules deviennent de véritables « centrales électriques sur roues »

Mobilité et gestion énergétique sont désormais indissociables. Au début de la décennie, on estime que 30 % des engins circulant sur le MobiGrid sont propulsés à l’énergie solaire. En retour, les véhicules deviennent de véritables « centrales électriques sur roues ». Les usagers les utilisent couramment pour alimenter leur domicile en électricité, ou recharger d’autres AUTONOMS.

L’immense majorité des déplacements est assurée par des AUTONOMS privés ou publics, voitures et navettes évoluant seules ou en pelotons, disponibles en accès libre dans la plupart des villes, qui abritent désormais 75 % de la population mondiale. Les Atonoms volants assurent près de 20 % des déplacements urbains des 20 principales mégalopoles en 2047, contribuant à flouter les frontières entre centres-villes et banlieues. En dehors des villes, les autoroutes, désormais toutes capables de recharger les véhicules en mouvement, sont exclusivement réservées aux AUTONOMS.

Lancement de navettes stratosphériques

Les seuls autres modes de transport pouvant concurrencer leur efficacité et leur sûreté sont des véhicules à ultragrande vitesse (UGV, ou UHS, ultra high speed) utilisés pour les longs trajets. Les TubePods (wagonnets propulsés dans des tubes à vide), les trains à lévitation magnétique (notamment utilisés en Chine et atteignant 1 000 km/h), ou les avions supersoniques (évoluant à Mach 2.5, soit 3 000 km/h) sont privilégiés pour les déplacements interurbains et internationaux. 

L’évolution marque ainsi la fin de la culture automobile.

 

De façon plus confidentielle apparaissent également au milieu de la décennie des lignes d’avions hypersoniques (frisant les 5 000 km/h) et des navettes stratosphériques, utilisées pour desservir les hôtels spatiaux en orbite terrestre basse.

L’évolution marque ainsi la fin de la culture automobile. En 2045 aux États-Unis, 90 % des individus de 18 à 35 ans n’ont pas de permis de conduire, et ne possèdent pas de voiture. Posséder son propre AUTONOM est très rare, tout comme l’était 30 ans plus tôt le fait de posséder un avion. L’immense majorité des véhicules en circulation sont des véhicules partagés optimisant les déplacements et offrant une expérience conviviale et relaxante de la mobilité.

 

> Initialement publié dans le magazine Autonoms, téléchargeable en français ou en anglais.

Illustration de une réalisée par Matt Chinworth pour Usbek & Rica. 

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