Et maintenant, où en est l’écoblanchiment ?

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Par Tom Berille pour GaïaPresse

Plusieurs entreprises ont recours à l’argument écologique pour séduire les consommateurs. Photo : Unsplash

Arpenter les rayons de son supermarché et privilégier les articles davantage éco-responsables en cédant éventuellement un sur-prix. C’est un scénario que beaucoup reproduisent quotidiennement, parfois les yeux fermés. Pourtant, la plupart de ces produits « verts » présentent des techniques de commercialisation trompeuses. Une fois votre emplette réalisée, si ce label « produit 100% naturel » vous semble ambigu, vous êtes probablement face à une stratégie d’écoblanchiment.

Cette pratique -douce francisation du terme greenwashing- s’est faite une place importante au cours de la dernière décennie, à la fois dans les supermarchés et les grandes surfaces, à la télévision, sur les affiches, voire à la banque. En effet, pour faire vendre, certaines entreprises ont recours à des codes propres aux produits issus du développement durable ou de l’agriculture biologique. Sous l’emballage, pas ou peu de différences avec la concurrence. Ainsi un engagement environnemental anodin peut se voir habilement utilisé comme un argument publicitaire phare.

La liste des exemples n’est pas prête de
s’arrêter. Parmi eux, vous avez sûrement déjà oublié les bouteilles vertes du « Coca-Cola Life » introduites en 2013. Échec commercial ayant
rapidement disparu, il était présenté comme naturel en raison d’une part de
sucre substituée par de la plante de Stevia.

Des méthodes plus subtiles sont employées telles
que l’utilisation massive de la couleur verte sur les emballages ou même les
enseignes. Effectivement depuis 2007, MacDonald’s a progressivement remplacé
son rouge distinctif en Europe.

L’écoblanchiment s’étend au-delà du secteur de la
consommation, certaines banques y ayant recours en proposant des placements
dits éco-responsables. Un argument tronqué avec une part d’investissement dans
les industries lourdes et les énergies fossiles qui subsiste.

À l’initiative d’Underwriters Laboratories, une compagnie
indépendante de certification de produits, Sinsofgreenwashing.com recense les « 7 péchés de
l’écoblanchiment »
qui créent la confusion chez le consommateur. On y
trouve l’utilisation volontaire de termes vagues, d’arguments impertinents,
l’absence et la fausse revendication de certifications, l’invention d’icônes
assimilables à des labels. De plus, briguer une cause environnementale sans
lien avec le produit ainsi que se proclamer « vert » sans
avantages environnementaux entrent dans les « péchés ».

Sur ces critères, une étude du marché canadien a été
conjointement menée en 2017 au sein de trois universités dont celle de York. Un
échantillon de 100 produits de consommation commercialisés en grande surface a
été prélevé. Résultat : 94% des articles du panier étudié présenteraient au
moins deux signes d’écoblanchiment.

Basé sur un panier de 100 produits issus du marché canadien sélectionnés aléatoirement. Source des données :  B. Rahman, I. Ali, A. Nedelea. Mise en forme : Tom Berille

La même année que l’étude en question, le bureau de
la concurrence canadien a émis un communiqué de presse afin de mettre en garde
les entreprises sur leurs techniques de commercialisation. Il est alors rappelé
que celles-ci doivent veiller à la vérifiabilité, les
fondements, mais aussi l’exactitude et la
pertinence de leurs déclarations.

En revanche, une étude menée à l’Université
Paris-Dauphiné vient tempérer l’impact de l’écoblanchiment sur les décisions
des consommateurs. Notamment sur le secteur automobile, les sujets de
l’expérimentation ne seraient pas dupes et on ne constaterait pas d’effet
significatif sur leur perception du produit.

Évidemment l’écoblanchiment n’est pas le seul de la
famille. En parallèle, persistent les mêmes méthodes vantant de façon trompeuse
les aspects social et local des articles de votre chariot. Ces notions sont
intimement liées, en Europe, la consommation locale étant principalement
motivée par une préoccupation environnementale, constate une récente étude
(Observatoire Cetelem). Par exemple, en France 44% trouveraient l’avantage des
produits issus de circuits courts à travers leur impact -dû au transport-
allégé.

Récemment sorti dans les salles de cinéma, le documentaire «L’illusion verte » de Werner Boote, donne un aperçu de la problématique de l’écoblanchiment.

Face à une telle profusion de cette illusion, il faut
désormais compter sur la vigilance du consommateur. Bien sûr il n’est pas
écarté de voir apparaître une réglementation plus stricte à l’avenir.

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