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Condamnation de Monsanto : une victoire pour les droits humains, un avertissement à l'industrie agrochimique



  • Deux experts des droits de l’homme des Nations Unies ont salué la décision d’un tribunal californien d’accorder une indemnité de 289 millions de dollars à Dewayne Johnson, le jardinier d’école américain atteint d’un cancer qu’il attribue au glyphosate, un herbicide produit par l’entreprise Monsanto.

    Le 10 août 2018, le jury du tribunal supérieur de Californie à San Francisco a déclaré que Monsanto était responsable du cancer de M. Johnson et a condamné l'entreprise américaine à verser 39 millions de dollars en indemnité et 250 millions de dollars en dommages-intérêts punitifs.

    La décision judiciaire reflétait l'évaluation faite en 2015 selon laquelle le glyphosate (un composant du principal produit de désherbage de Monsanto) était classé par le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme « probablement cancérogène pour l'homme ».

    « Le jugement reconnaît les relations causales potentielles entre le cancer et les herbicides à base de glyphosate de Monsanto, y compris RoundUp, et la négligence de la société en omettant d’informer les utilisateurs des risques de cancer », ont déclaré Hilal Elver, Rapporteure spéciale sur le droit à l'alimentation, et Dainius P%u016Bras, Rapporteur spécial sur le droit à la santé physique et mentale. Pour les deux experts, la décision du tribunal californien constitue une « reconnaissance significative des droits humains des victimes et des responsabilités des entreprises chimiques ».

    « L'utilisation dangereuse et excessive des produits chimiques a des effets négatifs sur un large éventail de droits humains, notamment le droit à la vie, à l'alimentation, à l'eau, à la santé et à un environnement sain », a déclaré Mme Elver.

    En collaboration avec le Rapporteur spécial sur les incidences sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux, Baskut Tuncak, l’experte a soumis en 2017 au Conseil des droits de l'homme un rapport qui affirme qu'une quantité importante de recherches scientifiques confirme les effets néfastes des pesticides, démontrant un lien définitif entre l'exposition et la santé humaine.

    Les dommages à l’écosystème constituaient également un défi, exacerbé par les dénis systématiques fondés sur des recherches financées par l’industrie agroalimentaire, sur la gravité et même la réalité des dommages causés par ces produits chimiques.

    Selon le jugement du tribunal californien, « les documents internes de l’entreprise » démontrent que Monsanto sait depuis des décennies que le glyphosate, et en particulier le Roundup, pourrait causer le cancer.

    Une décision de justice tardive

    Le plaignant, M. Johnson, souffre d’un cancer en phase terminale et les médecins disent qu’il est peu probable qu’il vive au-delà de 2020.

    « Nous regrettons que la décision soit arrivée trop tard car M. Johnson souffre d’un cancer en phase terminale. Aucune compensation monétaire n'est suffisante pour sa vie », ont déclaré les deux experts », qui ont fait part de leurs plus sincères condoléances pour sa douleur et ses souffrances et loué « son courage et sa volonté inébranlable de lutter pour ses droits ».

    Le verdict rendu contre Monsanto intervient quelques semaines avant la publication d'un rapport sur les droits des travailleurs agricoles que Mme Elver présentera à New York à l'Assemblée générale des Nations Unies. S’ils saluent le jugement, les deux experts de l’ONU restent toutefois prudents, rappelant que la décision du tribunal californien, « même si elle est significative en soi, fera l'objet d'un appel, et ce n'est pas définitif ».

    Mme Elver et M. P%u016Bras voient dans la condamnation de Monsanto « un avertissement substantiel » aux entreprises agroalimentaires et aux sociétés chimiques pour « qu’elles évitent de tels résultats néfastes, mettent en place des mesures de précaution en cas de doute sur les impacts des produits et donne la priorité à la santé et aux droits humains avant le profit ».

    Communiqué de l'ONU 

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