Un rapport publié par la Wildlife Conservation Society (WCS), Fauna & Flora International (FFI) et l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) montre qu’entre 1995 et 2015, la population de gorilles de Grauer (Gorilla beringei graueri ) est passée de 17 000 à environ 3 800 individus. Selon les auteurs de ces travaux, cette diminution de 77 % de la population en vingt ans justifie le classement du gorille de Grauer en « danger critique d’extinction » (CR), d’après les critères de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN).
« Le Cirad a contribué à cette étude en fournissant les outils et l'expertise statistique ayant permis d'estimer la taille de la population résiduelle de Gorilles à partir d'un échantillonnage partiel », explique Ghislain Vieilledent, chercheur au Cirad et co-auteur du rapport. Le logiciel hSDM, développé par les scientifiques du Cirad, a notamment permis une estimation fine de l'aire de distribution du gorille de Grauer.
Pouvant atteindre 1,83 m pour un poids de 225 kg, ce gorille est le plus grand primate actuel. Les représentants de cette sous-espèce peuplent les forêts orientales de la République démocratique du Congo (RDC), entre la rivière Lualaba et la frontière du Burundi-Rwanda-Ouganda. Malheureusement pour les grands singes, depuis 1996, l’est de la RDC est en proie à l’insécurité et à l’anarchie. L’afflux massif de réfugiés ayant fui le Rwanda suite au génocide de 1994 a déstabilisé le secteur, entraînant deux guerres civiles successives. Bien que le dernier conflit soit officiellement terminé depuis 2003, de nombreuses milices se sont installées dans la région et ont établi des camps d’exploitation minière pour financer leurs opérations. Or, étain (cassitérite), tungstène, diamants ou coltan (métal utilisé dans les téléphones mobiles et l’équipement informatique) sont extraits hors de toute réglementation par des mineurs tirant en partie leur subsistance de la viande de brousse. En raison de leur taille, les grands singes (gorilles et chimpanzés, également très touchés quoique dans des proportions moins importantes) comptent parmi les espèces les plus prisées, et font l’objet d’un braconnage important.
Désarmement des milices, régulation des sites miniers, sensibilisation des populations locales, développement de ressources financières alternatives à l’exploitation minière, suivi et protection des populations de gorilles, mise en place de réserves communautaires, relocalisation des villages situés dans les réserves… Les mesures à prendre pour remédier à cette situation et freiner l’effondrement des populations de gorilles de Grauer nécessitent d’importants moyens humains et financiers, ainsi qu’une volonté politique sans faille. Le chantier est d’envergure, mais c’est le prix à payer pour éviter de perdre l’une des quatre sous-espèces de gorilles connues. En effet, si son déclin se poursuit au rythme actuel (environ 5 % par an), le gorille de Grauer pourrait disparaître d’ici quelques années.
Communiqué du Cirad
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Source : Cirad
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