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Recyclage de combustibles nucléaires usés : l'affaire d'Orano la Hague


La France, grâce au groupe Orano (ex-Areva), exporte depuis plusieurs années son savoir-faire en matière de traitements des déchets nucléaires. La pratique, vieille de plusieurs dizaines d'années, permet de limiter l'impact de la filière nucléaire sur l'environnement.

Il n'y a pas que l'électricité nucléaire française qui s'exporte bien à l'étranger. L'Hexagone a acquis, au fil des années, une expertise solide en matière d'atome, et ce quelles que soient les étapes du processus de production. Et même de traitement des combustibles usés. Orano, le géant tricolore de l'énergie, a effectivement signé le 3 mai 2018 un contrat de faisabilité avec l'Ukraine pour traiter les déchets nucléaires issus des réacteurs de type VVER 1000 – à eau pressurisée (EPR) de 4ème génération. Qui se rajouteront donc aux déchets français.

Autorisés à "être moxés"

"Une étape importante pour Orano [qui] ouvrira la voie de la filière française du recyclage aux combustibles usés ukrainiens" pour Pascal Aubret, directeur de la Business Unit Recyclage du groupe français. "C'est également une nouvelle marque de reconnaissance du savoir-faire et des compétences du site Orano la Hague" selon lui. L'usine, située dans la péninsule du Cotentin (Manche), s'apprête par conséquent à recevoir du combustible usé ukrainien, dont elle devra séparer les matières recyclables (96 %) des déchets ultimes (4 %).

Tel est, effectivement, l'enjeu industriel porté par le site français : assurer le cycle fermé du combustible nucléaire - comme pour d'autres filières : papier, verre, etc. -, fondé sur la préservation des ressources naturelles et la limitation de l'impact sur l'environnement. Deux critères primordiaux, à l'heure de la transition écologique. Ainsi, le recyclage effectué à la Hague doit éviter de recourir à l'importation de matières premières fossiles par exemple ; et "il permet une économie d'uranium naturel allant jusqu'à 25 %" indiquait Orano dans un rapport publié en 2016.

S'agissant du plutonium, environ 10 % de l'électricité tricolore est produite à partir de combustible MOX, mélange d'oxyde de plutonium issu du traitement des combustibles usés et d'oxyde d'uranium, utilisé par les centrales françaises depuis plus de 40 ans. Aujourd'hui, 24 réacteurs (sur 58) sont autorisés à "être moxés", ce qui fait de la France le premier pays européen en matière de cycle fermé nucléaire. Quant à l'uranium recyclé, équivalant à un combustible à uranium enrichi à un taux de 3,7 %, il est mis en œuvre depuis 1999 par Orano.

Expédition vers l'étranger

Concrètement, "une fois les matières uranium et plutonium extraites du combustible usé pour recyclage, les déchets les plus radioactifs (produits de fission) sont concentrés et conditionnés de manière sûre, stable et durable dans une matrice de verre". C'est la "vitrification". Tandis que les premiers - nommés "matières fissiles" - sont conditionnés puis entreposés à la Hague, ceci à des fins de réutilisations par leur "propriétaire", les seconds – nommés "produits de fission" -, conditionnés en colis de déchets, seront stockés à plusieurs centaines de mètres de profondeur. C’est le projet Cigéo situé dans la Meuse et qui devrait accueillir les premiers déchets hautement radioactifs d’ici 2030-2035.

Petite précision cependant : comme le rappelle l'article L. 542-2 du code de l'environnement, "est interdit le stockage en France de déchets radioactifs en provenance de l'étranger ainsi que celui des déchets radioactifs issus du traitement de combustibles usés et de déchets radioactifs provenant de l'étranger". Depuis 1977, Orano (à l'époque COGEMA) prévoit d'ailleurs dans certains contrats signés avec les électriciens étrangers, une clause lui donnant la possibilité d'expédier des déchets conditionnés de la Hague vers leur pays d'origine.

Cette possibilité étant devenue obligation, depuis une loi de 1991, le groupe français, devenu au fil des années leader mondial en la matière, a commencé à expédier vers l'étranger ses premiers conteneurs de déchets vitrifiés - en 1995 au Japon - et compactés (les moins radioactifs) - en 2009 aux Pays-Bas. Le tonnage entreposé annuellement à la Hague ayant quant à lui peu évolué en dix ans, puisqu'il est en moyenne égal à 58,5 tonnes, réparties entre la France (67,7 %) et le Japon (27,6 %). Mais également, de manière résiduelle : Allemagne, Australie, Belgique et, bientôt, Ukraine.

 

Auteur :  Benoit Boulard

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