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Dossier COP8 : La communication participative et la lutte contre la désertification au Sahel



  • La communication participative et la lutte contre la désertification au Sahel

    La recherche pour le développement, tout comme la réalisation d’initiatives et de projets de développement, dépendent de la participation effective des populations. Ceci se pose d’ailleurs avec acuité dans le cadre de la lutte contre la désertification et des programmes nationaux qui, en application de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification, veulent s’appuyer sur les initiatives communautaires.

    Mais de quelle participation parle-t-on? De quelle manière est-elle comprise et pratiquée? Les communautés locales sont-elles simplement consultées ou mobilisées dans le cadre d’activités spécifiques, ou participent-elles vraiment à la prise de décision concernant la planification et la mise en oeuvre de ces initiatives?
    Ces questionnements nous aident à cerner le degré de participation véritable de la démarche. En même temps, ils soulèvent à leur tour la question du degré de communication véritable entre d’une part les chercheurs et les agents de développement et d’autre part les populations locales.

    En effet, la manière avec laquelle le chercheur ou l’agent de développement approche une communauté locale, l’attitude avec laquelle il interagit avec les différents groupes, la manière avec laquelle il recueille et partage l’information, l’espace qu’il ouvre afin que les membres de la communauté participent effectivement à la prise de décision, tout cela détermine le degré de participation dans la recherche ou l’activité de développement.
    La communication, et plus spécifiquement la communication participative pour le développement, est un outil qui catalyse cette participation communautaire au développement. À ce titre, sa démarche se prête bien à la recherche et aux actions de lutte contre la désertification.

    La communication participative pour le développement (CPD)

    Par le passé, la communication pour le développement a souvent été réduite à des activités de diffusion de l’information ou à des campagnes visant à persuader les gens d’adopter tel ou tel comportement et à les mobiliser dans le cadre d’actions spécifiques. Comme on le reconnaît aujourd’hui, ce genre de communication a eu peu d’impact. La communication véritable est une communication à deux sens, un dialogue. Et c’est le rôle premier du chercheur ou de l’agent de développement qui veut travailler avec les communautés locales d’établir ce dialogue initial avec et entre les différents groupes communautaires et de le nourrir tout au long de la démarche. Arriver avec un projet tout planifié et demander la participation des gens, ce n’est pas là une démarche participative.

    Le concept de “communication participative pour le développement” vient à la fois de la communication pour le développement et de la recherche participative.

    La communication pour le développement regroupe différentes pratiques : elles vont de la diffusion des innovations technologiques à la conscientisation populaire ; d’actions à large échelle s’appuyant sur les mass-media aux approches communautaires privilégiant les médias légers et la communication interpersonnelle. Au coeur de ce concept, on retrouve des échanges d’informations nécessaires pour résoudre un problème de développement et améliorer la qualité de vie de groupes spécifiques de population, ainsi que l’implantation de mécanismes d’analyse des besoins et d’évaluation à l’intérieur du processus de communication.

    La recherche participative est une méthodologie qui part de l’identification d’un problème par les personnes aux prises avec ce problème, l’identification de solutions, l’expérimentation de ces solutions, et se conclue par une évaluation qui permet ensuite soit de reprendre un nouveau cycle d’expérimentation, soit de diffuser les résultats. La communication participative pour le développement lie ces deux approches.

    On peut la définir comme: « une activité planifiée, basée d’une part sur les processus participatifs et d’autre part sur les média et la communication interpersonnelle. Elle a pour but de faciliter un dialogue entre différentes parties prenantes autour d’un même problème de développement, ou d’un but commun, dans l’objectif de développer et de réaliser un ensemble d’actions visant à résoudre ce problème ou à contribuer à la réalisation du but commun, et qui supporte et accompagne cette initiative. »

    L’expression « partie prenante » désigne à la fois les membres de la communauté, des groupes communautaires, des autorités locales ou régionales, des ONG ou des projets de développement établis, des services techniques des ministères, ou toute autre institution ou groupe travaillant avec une communauté spécifique, ainsi que les responsables administratifs et politiques qui sont ou devraient être impliqués dans l’initiative de développement. Ce genre de communication demande une attitude différente de la part du chercheur ou de l’agent de développement. Au lieu de mettre l’accent sur l’information ou la mobilisation, il doit plutôt faciliter les échanges entre les différentes parties prenantes afin qu’elles discutent d’un problème spécifique, identifient et mettent en oeuvre une initiative visant à expérimenter des solutions possibles à ce problème. Il doit aussi, dans le même temps, identifier ce qui est requis pour supporter cette initiative en termes de partenariats à établir, de connaissances et d’habiletés à acquérir, partager et développer. La démarche est d’ailleurs la même lorsque le point de départ n’est pas un problème spécifique mais une initiative visant à réaliser un but commun. Dans les deux cas, la communication participative pour le développement vient faciliter, instrumenter et appuyer la participation.

    Une autre manière d’appuyer une initiative de développement

    Bien souvent, par le passé, on a vu des initiatives de lutte contre la désertification être identifiées et planifiées par un programme national ou la société civile, qui demandent ensuite la collaboration des communautés locales. Dans une telle démarche, la communication sert d’abord à informer les membres de la communauté sur les différents aspects du problème sur lequel on les mobilise et la solution qu’on veut implanter avec leur concours et, dans un deuxième temps, à orchestrer cette mobilisation des communautés. On a pu constater cependant que cette manière de faire a peu d’impact réel. À la fin du projet ou lorsque le soutien financier s’épuise, les choses tendent à retourner à leur état initial. Il n’y a pas ce qu’on appelle aujourd’hui de durabilité. Il faut encore tout recommencer.

    Agir autrement, c’est d’abord changer d’attitude. Le chercheur ou l’agent de développement doit apprendre à voir les communautés locales non plus comme des bénéficiaires mais comme des parties prenantes. Il doit aussi être prêt à développer des partenariats et des synergies avec les autres intervenants institutionnels qui travaillent avec les mêmes communautés.

    La communication participative pour le développement offre une démarche pour travailler dans ce sens. Cette démarche est articulée autour de trois pôles ou séries d’activités :

    - Le premier pôle est lié à l’approche d’une communauté locale. Cela implique la manière d’établir les contacts initiaux avec une communauté, ainsi que les recherches et documentations préliminaires visant à la connaître davantage.

    - Le deuxième pôle d’activités consiste à impliquer la communauté et les autres partenaires disponibles dans la planification d’une initiative de développement. Cela implique d’amener les gens à:

    – identifier un problème spécifique lié à la désertification ;
    – discuter et découvrir les nombreuses dimensions de ce problème et à identifier des solutions possibles, répondant aux causes, non seulement mais aussi aux manifestations ;
    – prendre une décision sur des activités concrètes visant à expérimenter ou mettre en place ces solutions ;
    – identifier les conditions nécessaires en termes de connaissances, de partenariats et de conditions matérielles à mettre en place.

    -Le troisième pôle d’activités consiste à développer et mettre en oeuvre une stratégie de communication qui viendra appuyer la mise en oeuvre de l’initiative communautaire. Ceci implique :

    – préparer et mettre en oeuvre un plan de communication ;
    – faciliter le développement de partenariats autour de la réalisation de l’initiative ;
    – faciliter l’acquisition des connaissances et le développement des habiletés nécessaires ;
    – préparer un plan de partage et d’utilisation des résultats.

    [CCD-CDP8]
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