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A la rencontre de la surfriders Foundation Maroc: "Nous nous battons pour que tous les marocains prennent conscience de l'importance de la protection de l'environnement"



  • Dans notre quête de ces hommes, de ces femmes et de ces groupes qui travaillent pour le développement durable et la protection de l'environnement en Afrique, nous sommes allés à la rencontre de la Surfriders Foundation Maroc (SFM).

    Cette fondation oeuvre depuis quelques années pour la protection des plages et des océans à Agadir à travers de multiples initiatives telles que l'Opération "Coca Cola j'aime ma plage", l'initiative Océane, les actions solidaires dans les villages ou encore l'éducation à l'environnement dans les écoles de la région. Et il faut dire que ce combat est primordial car Agadir est la plus grande station balnéaire du Maroc. Et si son climat, qui est exceptionnellement doux tout au long de l'année, lui permet d'attirer une moyenne de 500 000 touristes ; c'est surtout de la propreté de ses nombreuses plages (qui sont considérées comme les plus belles du Maroc) et de la qualité de ses eaux que dépendra leur satisfaction et leur retour. La présence de Surfriders Foundation Maroc est donc plus que nécessaire et est déjà reconnue par de nombreux acteurs: l'association a ainsi remporté le trophée Lalla Hasnaa "Littoral Durable" en 2014, elle a organisé le 29 novembre 2015 l'événement "Agadir marche pour le climat" qui a été retransmis sur la chaîne 2M et elle est devenue une association incontournable dans le domaine de l'environnement à Agadir.

    C'est donc tout naturellement que nous avons décidé de rencontrer mlle Rkia Drouiche, la responsable de communication de l'association, pour échanger sur les actions de SFM et surtout sur ses ambitions en cette veille de COP22.

    Ecologique et Economique: Bonjour mlle, pouvez vous vous présenter et présenter Surfriders Foundation Maroc svp?

    Rkia Drouiche: Bonjour, je me nomme Rkia Drouiche et je suis la responsable communication de l'association Surfriders Foundation Maroc. Il s'agit d'une association marocaine qui est affiliée à Surfriders Foundation Europe et qui fait partie du réseau Surfriders Foundation. Sur le terrain, nous travaillons activement à la protection des océans et des plages en sensibilisant la population et en lui donnant les moyens d'agir localement.

    Ecologique et Economique: Qu'est ce qui a motivé la création de la SFM?

    Rkia Drouiche: la SFM a été fondée en 2010 par Christophe Rebicchini à la suite d'un constat: celui de la pollution des plages d'Agadir par les déchets aquatiques. En tant qu' européen vivant à Agadir, il a trouvé cette situation inacceptable et a décidé de regrouper toutes les personnes sensibles à la cause environnementale dans la ville, et même dans la région, pour fonder l'association. Et étant donné que la protection des océans et des plages a été dès le départ le cheval de bataille de l'association, son affiliation à Surfriders Foundation Europe (qui rappelons le lutte également pour les mêmes objectifs) était une suite logique et le nom de Surfriders Foundation Maroc également.

    Ecologique et Economique: Quelles sont les actions que Surfriders mène au quotidien?

    Rkia Drouiche: Au quotidien, Surfriders mène de nombreuses actions sur le terrain. Mais pour mieux les comprendre, il est indispensable de revenir à la stratégie. Nous sommes en effet convaincus que la sensibilisation passera d'abord par les enfants et c'est pourquoi nous misons énormément sur les actions éducatives.

    En termes d'actions de base pour l'éducation, je citerai les tournées de sensibilisation quotidiennes que nous organisons gratuitement dans les écoles publiques et de façon payante dans les écoles privées. Il s'agit pour nous de montrer aux enfants les effets de la pollution des océans sur la vie des animaux à travers des vidéos et des photos. Et nous poursuivons cette sensibilisation en été sur les plages en pratiquant des jeux tels que le jeu de l'eau: ce jeu qui consiste à organiser des courses entre enfants pour remplir une bouteille d'eau permet de leur faire prendre conscience de l'importance de l'eau. Par ailleurs, pour que les enfants retiennent les leçons et les mettent en pratique les éco-gestes chez eux, nous avons mis en place un programme de formation payant pour le personnel des entreprises pour que les parents soient eux aussi sensibilisés.

    Mis à part ces actions, nous sensibilisons également les adultes et nous parcourons les villages pour porter le message.

    Ecologique et Economique: Comment les populations vous accueillent t'elles et quels sont les obstacles que vous rencontrez?

    Rkia Drouiche: L'accueil sur le terrain dépend des catégories auxquelles nous nous adressons. Parce qu'ils sont assez sensibles et qu'ils aiment beaucoup les animaux, les enfants sont en général très réceptifs. Nous constatons avec joie que de nombreux enfants qui suivent nos formations mettent en pratique les éco-gestes. Et le constat est le même dans les villages: parce qu'ils vivent en contact direct avec la nature, leurs habitants sont en effet très réceptifs et s'impliquent généralement rapidement dans les actions. Pour vous donner un exemple concret, le fait de dire à un berger que ses animaux peuvent mourir en avalant du plastique le fait tout de suite comprendre et agir et c'est le même cas pour les pêcheurs.

    En ville, les choses ne sont pas aussi simples car s'il y a des citoyens qui sont conscients, il y en a également qui ne le sont pas et qui ne veulent surtout pas recevoir de leçons. Nous avons rencontré à maintes reprises des personnes qui refusaient de jeter leurs déchets dans des poubelles mais qui, paradoxalement, souhaitaient avoir des plages propres.

    Ecologique et Economique: Comment expliquez vous ce phénomène et quelles peuvent en être les solutions?

    Rkia Drouiche: A mon avis, il s'agit d'une question de mentalité et surtout du rôle que chacun se donne par rapport à la protection de l'environnement. Car pendant que certaines personnes agissent pour la protection de l'environnement, d'autres pensent que c'est à l'Etat d'agir.

    De ce fait, la ou les solutions ne peuvent être le fait d'un ou plusieurs individus mais plutôt le fait d'une collectivité et plus largement d'un Etat. Et sur ce point, je dois dire que l'organisation prochaine de la COP22, en plus d'être une grande fierté pour notre pays, a permis un éveil des consciences dans le domaine de l'environnement.

    Vous avez certainement pu voir que depuis plus de 2 mois, l'opération d'interdiction des sacs plastiques au Maroc a débuté et qu'elle se passe plutôt bien. Vous avez également vu que depuis le début du mois de juillet, le documentaire "il suffit d'ouvrir les yeux " passe régulièrement sur les chaînes nationales accompagné de nombreux reportages sur les initiatives environnementales au Maroc. Et les choses commencent progressivement à changer dans la vie quotidienne. Nous voyons maintenant les marocains utiliser des sacs de courses pour aller au marché,, des pots en verre ou en plastique pour conserver leurs aliments et ils sont de plus en plus nombreux à proposer des innovations durables. Pour nous, c'est un très bon début.

    Ecologique et Economique: Justement, comment voyez vous les cinq prochaines années à Agadir et quelle sera la place de SFM dans ce contexte?

    Rkia Drouiche: Comme je le disais plus haut, la préparation de la COP22 a insufflé un renouveau pour la cause environnementale au Maroc et il y a fort à parier que le mouvement s'intensifiera dans les prochaines années. Mais pour parvenir à des résultats significatifs, il est nécessaire que les collectivités et les régions s'impliquent davantage tout comme il est indispensable que les citoyens prennent certaines choses en main. Les opérateurs touristiques ont par exemple tout intérêt à avoir des espaces propres et ne sont pas obligés d'attendre les collectivités pour passer à l'action;

    Bien entendu, SFM espère accompagner ce mouvement de protection de la nature. Et nous espérons le faire de manière renforcée et notamment avec davantage de moyens. Nous travaillons en effet sur de nombreux projets mais nos effectifs restent encore insuffisants. Par ailleurs, nous travaillons actuellement grâce aux subventions de l'ambassade de France et de nos différents partenaires mais nous sommes encore loin de nos objectifs. Et il serait temps que la collectivité nous aide davantage.

    Ecologique et Economique: A propos de vos projets, j'aimerais parler de l'événement Coca Cola j'aime ma plage qui se déroule depuis 5 ans maintenant. Comment en avez vous eu l'idée? Comment avez vous pu convaincre Coca Cola? Et plus largement, quelle est votre relation avec les entreprises?

    Rkia Drouiche: Effectivement, Coca Cola est notre partenaire depuis 5 ans pour l'organisation de l'opération "Coca Cola, j'aime ma plage". Il s'agit d'une opération de nettoyage des plages qui se déroule du 09 juillet au 4 septembre sur les plages suivantes: Aourir, Imouran, Taghazout, Madraba, Km25, Km 26, Imi, Ouaddar, Aghroud 1 et Aghroud 2 et Imessouane. Il est important de souligner que cette année, l'événement a pris une nouvelle ampleur puisque nous avons formé 45 jeunes, au lieu de 20 habituellement, pour collecter les déchets le matin et assurer la sensibilisation du public l'après-midi. Nous avons également travaillé de concert avec les associations spécialisées dans le tri et le recyclage des déchets de plage.

    Pour répondre à la question de la participation de Coca Cola, je vous dirai que cette collaboration n'a rien de surprenant. Coca Cola organise en effet une journée de nettoyage des plages à Agadir depuis maintenant 10 ans, c'est à dire bien avant la naissance de SFM, et est l'un de nos partenaires les plus importants dans la région. D'autres entreprises nous soutiennent également mais elle sont loin d'être majoritaires et nous accordent en général des moyens assez limités.

    Pour le moment, c'est surtout grâce à l'organisation des formations payantes pour le personnel, pour lesquelles nous délivrons un certificat, que nous nous faisons connaître petit à petit par les entreprises.

    Ecologique et Economique:Vous avez évoqué votre collaboration avec des associations spécialisées en tri et en recyclage et cette question nous interpelle. Quelle est l'utilisation qui est faite des déchets collectés sur les plages?

    Rkia Drouiche: Les déchets collectés sont envoyés à la décharge publique de la ville où ils sont triés et revalorisés. Actuellement, le recyclage ou la revalorisation des déchets est une activité très lucrative et vous pouvez d'ailleurs le voir sur les réseaux sociaux où les objets du quotidien retrouvent rapidement une seconde vie. De plus, le cours de certaines matières premières comme le verre ou encore le carton étant assez élevé, leur revente peut être assez lucrative. Et pour des personnes qui souhaitent entreprendre, cette activité peut parfaitement faire l'affaire.

    Ecologique et Economique: Avez vous un dernier message à lancer ?

    Rkia Drouiche: Je souhaiterais dire aux marocaines et aux marocains que notre pays est devenu l'organisateur de la COP22 au prix de nombreux efforts. C'est donc à nous de nous montrer à la hauteur en nous mobilisant pour la protection de notre environnement, de nos océans et de notre patrimoine naturel.

    Ecologique et Economique: Nous vous remercions pour cet entretien

    Rkia Drouiche: C'est à moi de vous remercier

    Depuis cet entretien, que nous avons réalisé sur la plage de Taghazout le 13 août dernier, la Surfriders Foundation Maroc poursuit ses activités. Elle s'apprête notamment à entamer les derniers jours de l'opération "Coca Cola j'aime ma plage" et à continuer des projets tels que les initiatives Océanes et les programmes Eco-Ecole. Elle prévoit également des tournées de sensibilisation dans les villages et sera présente à la COP22. Si vous souhaitez en savoir plus sur SFM et adhérer au mouvement, vous pouvez consulter le site.

     

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