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Analyse de l'impact des activités anthropiques sur la forêt classée d'Agoua au centre-ouest du Bénin



  • Par Arsène Salifou, spécialiste en agriculture et agroforesterie durable. Article tiré du mémoire de Master 2 d'Arsène Salifou, à l'Université Senghor d'Alexandrie, Département Environnement, spécialité Gestion des Aires Protégées, soutenu le 26 mars 2017.

    Intérêt du sujet

    Depuis la période coloniale jusqu’aujourd’hui, les forêts classées en Afrique ont été gérées sans partage par les États. Ce qui a accru les risques de dégradation des sols et la perte de la biodiversité.

    Au Bénin, les formations végétales qui en 1976 couvraient 60% du territoire béninois, connaissent un recul important. En effet en 1990, selon l’Inventaire Forestier National cité par CENAGREF (2013), les formations forestières sont évaluées à 4 923 000 ha, soit 44% de la superficie totale du territoire national. Elles sont passées de 2007 à 2015 de 2,7 millions d’hectares à 2 millions d’hectares, soit de 19% à 14,07%. En clair, en moins de 40 ans, soit de 1976 à 2015, la perte de la couverture végétale au Bénin est estimée à 45,93%.

    La forêt classée d’Agoua qui a fait l’objet du Mémoire de Master 2 et qui fait l’objet du présent article, est connue pour la qualité de ses sols à dominance ferrugineux adaptés à la culture de l’igname qui est la principale culture de base de la zone. De plus, les terres cultivables par habitant sont passées de 4,11 ha/habitant en 1990 à 1,78 ha/habitant en 2012 et sera de 1,43 ha/habitant en 2022 (Myêhouénou, 2013). Cette situation a amené les populations, en l’occurrence la jeunesse à s’adonner à la coupe du bois énergie et de services, à la chasse et la pêche dans la forêt classée d’Agoua en vue de faire face aux charges familiales. Ce qui a entrainé une forte érosion de sa biodiversité estimée à 70% (Sinsin, 2011). C’est donc pour analyser l’impact des activités anthropiques sur la forêt classée que l’étude a été menée.

    Méthodologie

    La méthodologie adoptée est axée sur la recherche documentaire et l’enquête de terrain à travers l’entretien direct et le focus groupe. Ainsi, au total, sur 9 293 ménages agricoles, 17% ont été enquêtés, soit 238 personnes. La dynamique des formations végétales entre 1994 et 2014 a été utilisée pour évaluer le degré de régression des formations végétales dans la forêt classée d’Agoua à travers des images satellitaires Landsat-TM de 1994 et l'Orthophotoplan de 2014 disponibles au niveau du CENATEL/Bénin. Cette méthodologie a permis d’atteindre les résultats suivants.

    Résultats

    L’analyse des résultats obtenus montre que l’agriculture est la principale activité responsable de la dégradation de la biodiversité dans la forêt classée d’Agoua (70%). Il s’en suit la coupe du bois énergie et de services avec respectivement 20% et 10%. Ce fait a entrainé sur la période 1994-2014 une variation des superficies dans chaque formation végétale cartographiée. Les forêt galerie (-0,31%), forêt dense sèche (-0,92%), forêt claire et savane boisée (-10,87%) et savane arborée et arbustive (-8,63%) ont connu une diminution des superficies. Tandis que les plantations (4,78%), les mosaïques de champs et jachères (15,88%) puis les agglomérations (0,06%) ont connu une augmentation de leurs superficies. Cette régression de l’ensemble des formations naturelles estimée à 70% a entraîné la perte de l’habitat et des espèces animales et végétales au sein de la forêt classée d’Agoua. Et il va s’en suivre une disparition progressive des espèces clés telles que Afzelia africana et Pterocarpus erinaceus puis Colobus vellerosus et Tragelaphus spekei.

    Bibliographie

    Centre National de Gestion des Réserves de Faunes (2013), Analyse de mise en œuvre de la catégorisation actuelle des Aires Protégées du Bénin et Proposition d’une nouvelle catégorisation des Aires Protégées de la République du Bénin selon les nouvelles lignes directrices de l’UICN. CENAGREF/PAPE, Cotonou. Rapport d’étape : Mission d’appui. 66 pages.

    Myêhouénou, A. T. L. (2013), « Stratégies d’adaptation paysannes face à l’accroissement de la pression foncière dans la Commune de Bantè au Bénin ». Mémoire de Maitrise. DGAT/FLASH/UAC. 66 pages

    Sinsin, B. (2011), « Nature conservation in West Africa: Red List for Benin ». Internat. Inst. of Tropical Agriculture. 365 pages.

    Informations complémentaires

    Memoire de Master 2 écrit sous la direction de Yelkouni Martin, Ouedraogo Paul, Pouget Louis Edouard

    Crédit photo : Arsène Salifou

    Article sélectionné par Hakim Bejaoui, membre du groupe JFDD, dans le cadre de l'l’Initiative Jeunesse de lutte contre les changements climatiques.

    À propos de l'initiative jeunesse

    L'initiative jeunesse de lutte contre les changements climatiques a pour objectif de sensibiliser les jeunes francophones aux changements climatiques. Elle permet également de faire connaître les actions et l’engagement de la jeunesse francophone pour lutter contre les changements climatiques sous la forme d’une série d’articles.

    [IJLCC]

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