Le sauvetage de l’île d’Anticosti ne doit pas servir à financer le saccage de la Gaspésie, ont unanimement affirmé 27 groupes citoyens et environnementaux lors d’une conférence de presse tenue à Montréal hier.

À cette fin, les groupes exigent que les négociations en cours entre le gouvernement Couillard et Pétrolia, au sujet de l’annulation des projets d’exploration pétrolière et gazière sur l’île d’Anticosti, se fassent en toute transparence et ne mènent pas à des subventions déguisées aux projets de la compagnie en Gaspésie.

D’une seule voix, les groupes ont demandé que l’entente ayant mené à la création d’Hydrocarbures Anticosti soit rendue publique, comme Pétrolia elle-même l’avait d’ailleurs proposé en juin 2016[1], et que la population du Québec puisse ainsi avoir l’assurance qu’aucune indemnité superflue ne sera versée à la compagnie. Selon eux, il serait inadmissible que les contribuables québécois versent un seul dollar de trop à Pétrolia, d’autant plus que cette compagnie junior lourdement subventionnée par le Québec est en voie de passer aux mains de la pétrolière albertaine Pieridae Energy Limited et a admis envisager des opérations de fracturation hydraulique pour ses deux projets les plus avancés en Gaspésie. L’un de ces projets, Haldimand, se trouve à quelques centaines de mètres d’un quartier résidentiel de Gaspé. L’autre se situe à proximité de Murdochville, dans des sous-bassins des légendaires rivières à saumons Darthmouth et York.

Complaisance gouvernementale

Rappelons que Pétrolia et Corridor Resources ont mentionné un montant de 200 millions de dollars comme base de négociation et que le ministre des Finances du Québec a alors indiqué disposer de « montants considérables » pour indemniser les partenaires[2]. Ces propos témoignent d’une complaisance inquiétante de la part du gouvernement, selon les groupes, car tout porte à croire que le pétrole d’Anticosti coûterait plus cher à extraire que ce qu’il rapporterait, même à des prix beaucoup plus élevés que ceux qui ont cours présentement. Les groupes soulignent aussi la vive opposition des Innus et du maire de l’Île-d’Anticosti, qui ont clairement indiqué leur intention de barrer le passage à Pétrolia.

Les signataires du communiqué s’opposent catégoriquement à tout projet d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures au Québec. Ils pressent le gouvernement du Québec d’imiter le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l’État de New York, le Vermont, le Maryland, les Pays-Bas, l’Allemagne et la France, entre autres, qui ont interdit la fracturation hydraulique ou imposé un moratoire illimité sur l’utilisation de cette technique. Ils citent aussi en exemple l’Irlande, dont le président doit signer d’ici quelques jours une loi interdisant la fracturation hydraulique.

Les groupes estiment qu’au lieu d’encourager la dévastation des paysages, des nappes phréatiques et des rivières de l’Est du Québec, le gouvernement devrait s’employer à relancer l’économie de l’île d’Anticosti et de la Gaspésie sur une base durable, en investissant dans la préservation de leur beauté naturelle et dans des secteurs économiques pérennes correspondant à leurs avantages distinctifs. D’ailleurs, le secteur pétrolier et gazier crée moins de deux emplois par million de dollars investis, alors que les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique en créent quinze[3]. Patrick Bonin de Greenpeace en a profité pour rappeler qu’aucun nouveau gisement d’hydrocarbures ne devrait être exploité si le Québec veut respecter l’Accord de Paris et atteindre ses cibles de réduction des gaz à effet de serre.

La conférence de presse s’est déroulée en présence de Martine Ouellet, cheffe du Bloc Québécois et députée à l’Assemblée nationale, ministre des Ressources naturelles de 2012 à 2014; et Manon Massé, co-porte-parole de Québec Solidaire, qui vient de déposer le projet de loi 990 visant à interdire la fracturation hydraulique.

Source : EAU Secours !