02/10/2018 3 min

« L’impact de l’environnement sur le risque de cancer est réel mais reste difficile à évaluer » : 3 questions au Pr Gérard Lasfargues, directeur général délégué au pôle Sciences pour l’expertise

Malgré les progrès médicaux, les cancers demeurent la première cause de mortalité en France.  Si le tabagisme actif, la consommation d’alcool ou encore une alimentation déséquilibrée restent les principales causes de mortalité par cancer, l’impact de l’environnement sur le risque de cancer est réel mais reste difficile à évaluer.

Cancers et environnement, quels sont les enjeux de la recherche ?

Les facteurs environnementaux jouent un rôle important dans les maladies chroniques, notamment les cancers. Ainsi, selon les estimations de l’OMS, la pollution de l’air est responsable d’un décès sur six dans le monde et 19 % des cancers seraient dus à des facteurs environnementaux. Certains agents cancérogènes sont bien identifiés : amiante, radon, cadmium, arsenic, particules en suspension dans l’air, rayons ultraviolets, certains polluants chimiques… D’autres font l’objet de travaux et de recherche comme certains pesticides ou les nanoparticules. L’un des enjeux de la recherche en santé environnement est d’établir, sur la base de connaissances scientifiques solides, des liens de causalité entre certains cancers et des expositions à des agents chimiques, physiques ou biologiques. Les obstacles méthodologiques à surmonter sont souvent liés à la difficile mesure des expositions, notamment des faibles doses, et à l’existence de délais parfois très longs entre l'exposition et l'apparition de la maladie. Evaluer les expositions combinées, par exemple à plusieurs produits chimiques, et les risques associés constitue un défi scientifique. De nombreux programmes de recherche sont en cours sur cet enjeu d’avenir, tout comme sur la question de l’exposome, c’est-à-dire l’ensemble des expositions d’un même individu au cours de son existence, quelle qu’en soit l’origine.

Qu’en est-il des cancers liés à une exposition professionnelle ?

Les cancers liés au travail sont également sous‐estimés comme en témoigne l’écart entre les données de reconnaissance en maladie professionnelle et le nombre estimé de cancers annuels (plusieurs milliers) en France. Les données collectées dans le cadre du Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P), que l’Anses coordonne, permettent d’en savoir plus sur les secteurs d’activité et les situations les plus à risque, mais aussi de mettre en évidence de nouvelles situations d’exposition ou de métiers à risque. Ainsi, dans 42 % des cas de cancers liés au travail notifiés par le RNV3P, l’amiante est incriminé, loin devant les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) (6,5% des cas). Ces cancers touchent majoritairement les métiers de la métallurgie et de la construction mécanique ou encore les métiers du bâtiment.

Comment l’Anses se mobilise sur ces sujets ?

L’Anses pilote le financement de projets de recherche en santé-travail et santé-environnement afin de soutenir les avancées des connaissances scientifiques dans ces domaines. Ainsi chaque année,  6 à 8 millions d'euros sont mobilisés dans le cadre du programme national de recherche Environnement-Santé-Travail (PNR EST). Les projets financés contribuent à développer de nouvelles connaissances afin de mieux comprendre les mécanismes d’action de certains contaminants dans le développement de cancers. Ils contribuent également à explorer de nouvelles pistes de recherche pour prévenir les cancers liés au travail ou à l’environnement, une des priorités des plans nationaux contre le cancer. Pour répondre à ces enjeux, l’Anses travaille également en étroite collaboration avec les acteurs de la recherche tels que Aviesan et l’Institut national du cancer, afin de mutualiser les synergies en faveur de la lutte contre le cancer.