(Agence Ecofin) - AEO-3, le nouveau rapport du PNUE publié jeudi dernier, alerte les dirigeants africains sur les problèmes de santé publique directement liés aux risques environnementaux.
La diarrhée, les infections respiratoires et le paludisme représentent 60% des impacts connus de l'environnement sur la santé. 28% des maladies en Afrique sont liées aux risques environnementaux.
Les particules fines -les polluants atmosphériques qui ont le plus grand impact sur la santé humaine- sont une préoccupation majeure dans les zones pauvres rurales où l'accès limité aux cuisinières et aux carburants propres a des effets considérables sur la santé en raison de la pollution de l'air intérieur. La pollution de l'air en Afrique peut être de 10 à 30 fois plus élevée que les limites fixées par l’OMS, affirme le rapport.
80% de la population rurale en Afrique dépend des médicaments traditionnels récoltés dans la nature, aujourd’hui menacés de dégradation.
Le rapport met également l’accent sur la préparation insuffisante des Etats africains aux changements climatiques.
Pour Terezya Huvisa (photo), ministre d'État de l'Environnement de Tanzanie, « les gouvernements africains ne sont que trop conscients des défis auxquels est confronté le continent en termes d'impacts environnementaux sur la santé humaine. Il existe d'importants efforts en cours pour lutter contre ces problèmes, y compris la mise en place de nombreuses politiques pertinentes».
Les messages clés et les recommandations politiques du rapport AEO-3
Etat de l'Environnement
Le rapport AEO-3 a établi les messages ainsi que les recommandations ci-dessous à partir des dernières données disponibles sur la qualité de l'air, la biodiversité, les produits chimiques et les déchets, l'eau pure et les installations sanitaires et les terres. Les données disponibles sur les liens entre l'environnement et la santé doivent être mises à jour.
Les données disponibles incluent également les faits et chiffres suivants:
La qualité de l'air
La faible combustion des carburants solides utilisés pour la cuisine et le chauffage en Afrique rurale ainsi que la mauvaise ventilation ont souvent pour résultats une pollution de l'air intérieur qui est de 10 à 30 fois plus élevée que les limites posées par l'OMS.
Les estimations du nombre de décès causés par la pollution de l'air extérieur sont de 800 000 morts dans le monde chaque année, pour la plupart dans les zones urbaines, 40 000 de ces décès surviennent en Afrique. En Angola, 6,9% des maladies au niveau national sont imputables à l'utilisation de carburant solide, au Malawi les chiffres sont de 5,2%.
Biodiversité
La diversité biologique de l'Afrique maintient la santé humaine dans la mesure où elle représente une source importante de nourriture, de médicaments et de services écosystémiques: 80% de la population rurale de l'Afrique dépend de la médecine traditionnelle. Au Zimbabwe, 50 espèces de champignons, 25 espèces de fruits et 50 espèces de feuilles légumineuses sont récoltées à l'état sauvage.
L'exploitation incontrôlée et la fragmentation des habitats naturels menacent la biodiversité des plantes médicinales et la valeur de la sécurité alimentaire. La surexploitation et le changement climatiques contribuent également à la dégradation de la biodiversité et les déséquilibres dans les relations prédateur-proie peuvent favoriser les conditions d'éclosion d'une maladie.
Les changements ou les perturbations des habitats sont causés par les barrages, la destruction des récifs coralliens et la pêche à la dynamite. Par ailleurs, la conversion des forêts naturelles et des prairies en terre arables crée également des conditions qui peuvent favoriser les vecteurs des maladies.
Les produits chimiques et les déchets
Les risques sanitaires en Afrique proviennent des produits agrochimiques, les polluants organiques persistants, les stocks de produits chimiques, les déchets électroniques et les déchets du pétrole.
En côte d'Ivoire, le centre national de recherche agronomique à Abidjan estime que 65% des maladies dont souffrent les maraîchers, les producteurs de coton, les producteurs de mangues et les consommateurs sont dues aux pesticides.
La Communauté de l'Ogoni dans le delta du Niger au Nigéria est exposée aux hydrocarbures qui se trouvent parfois en quantité élevée dans l'air extérieur et l'eau destinée à la consommation. De plus, les membres de la Communauté de Nisisioken Ogale consomment de l'eau de puits contaminés par le benzène, connus comme carcinogène, à des niveaux 900 fois plus élevés que les limites posées par l'OMS.
Le changement climatique
La quatrième évaluation du Panel intergouvernemental sur le changement climatique a découvert que l'Afrique se réchauffe plus vite que la moyenne mondiale et la température pourrait augmenter de près de 3 à 4° Celsius en moyenne au cours du siècle. Cela fait du changement climatique un enjeu majeur pour la santé et l'économie en Afrique dans la mesure où les maladies sensibles au climat sont susceptibles de se propager avec le réchauffement. Il s'agit notamment de la fièvre de la vallée du Rift, qui touche aussi bien les populations que le bétail. Le choléra, la méningite et le paludisme liés au réchauffement et aux inondations apparaissent dans des zones jusqu'alors non exposées. Il s'agit des hauts plateaux du Kenya, du Rwanda et de la Tanzanie. Les effets du réchauffement en Afrique sont également susceptibles de se traduire par une réduction du rendement des cultures et de la productivité du bétail, par des pénuries d'eau potable et par des déplacements de population dans certaines régions.
La pollution et l'assainissement
La pollution causée par l'homme en Afrique provient des eaux usées non traitées, qui s'infiltrent dans les puits naturels et qui proviennent des latrines, de la pollution au nitrate des nappes souterraines due aux fertilisants, de l'eau riche en calcium libéré par les mines de phosphates et de l'eutrophisation des bassins de rétention en raison de la pollution organique.
La majorité de la population africaine manque d'eau potable. Cela représente environ 1/3 de la population en Afrique sub-saharienne soit 330 millions de personnes sur les 884 millions de personnes qui n'ont pas accès à l'eau.
Bien qu'en 2010 le nombre de personne utilisant des sources améliorées d'eau potable a augmenté de 11% depuis 1990, seulement 60 millions de la population sub-saharienne ont un accès à l'eau potable.
L'Afrique du Nord est la seule région qui a dépassé les cibles de l'Objectif de développement du Millénaire avec une couverture d'accès qui est passé de 72% en 1990 à 8
Les terres
Sur une période de plus de 50 ans à partir de 1950, une superficie de 0,5 millions de km carré de sols a été dégradée. Plus de 60 % de la population du Burkina Faso, de l'Ethiopie, du Lesotho et du Mali vivent sur des terres dégradées.
Les changements dans l'utilisation peuvent également altérer l'écologie des maladies humaines, ce qui rend les populations plus vulnérables aux infections. Les effets indirects sur la santé de la dégradation des terres incluent la propagation des maladies infectieuses au cours de la migration des populations.
Il est estimé que l'Afrique représente 70% des terres louées ou achetées pour produire des récoltes destinées à l'agriculture pour l'alimentation ou les bio-carburants. Ce qui a des impacts sur la sécurité alimentaire et les conditions de vie.
Le rapport complet peut être consulté sur: www.unep.org/pdf/aeo3_Fr.pdf