Vers quoi allons-nous avec les ruptures de câble de la SONABEL ?

Créé par le 20 fév 2015 | Dans : Energie

pylone

Les ruptures de câbles de pylône sont légion sur la ligne d’interconnexion Bobo – Ouagadougou. Durant l’année 2014, les ruptures se sont enregistrées aux dates suivantes :

-          28 Avril 2014, rupture de câble entre Boromo et Ouagadougou ;

-          14 mai 2014, rupture de câble à Boni dans le Tuy ;

-          1er Aout 2014, rupture de câble entre les pylônes 77 et 78 près de la ville de Boromo ;

-          26 septembre 2014, rupture de la ligne d’interconnexion Pâ-Zagtouli, pylônes 266 et 267 ;

Le mercredi 18 février 2015, l’on a encore constaté une rupture de câble, entre Boni et Houndé, qui a provoqué des délestages dans la capitale.  Avec la même rengaine, la nationale d’électricité s’est encore confondue en excuses dans sa fameuse annonce insipide que le service de communication se fait le plaisir de nous délecter à chaque rupture de câble :

« La SONABEL porte à la connaissance de sa clientèle du Centre Régional de Consommation de Ouagadougou (CRCO) que suite à une rupture de câble survenue …, la ligne d’interconnexion électrique Bobo/Ouaga est indisponible privant provisoirement le CRCO de la puissance importée de Côte d’Ivoire.
Cette situation est susceptible d’entraîner des perturbations dans la fourniture de l’électricité dans le centre de Ouagadougou et environnant.

En attendant de rétablir le transit normal de l’électricité dans les meilleurs délais, la SONABEL présente ses excuses à sa clientèle et aux usagers de l’électricité pour les désagréments consécutifs à cette situation indépendante de sa volonté ».

Cette situation appelle de notre part quelques d’observations portant sur l’inquiétante rupture des câbles et le besoin de repenser les modes de production de l’électricité.

Une rupture de câble inquiétante

La fréquence des ruptures de câbles sur la ligne d’interconnexion Bobo/ouaga est inquiétante. A partir les informations prises sur les sites de journaux en ligne ; l’on peut dire qu’en moyenne, on a au cours de l’année 2014, des ruptures de câbles de l’ordre de quatre (4), soit une rupture de câble tous les trois (3) mois. Pour une ligne d’interconnexion qui a été réalisée en 2010, il parait surprenant que les installations électriques devant conduire l’électricité en l’espace de quatre (4) ans montrent déjà des signes inquiétants de faiblesse. Il est nécessaire d’expliquer les raisons de cette forte fréquence de rupture de câble qui peuvent porter un préjudice important à l’activité économique des entreprises. Peut-on arguer que les installations sont de mauvaise qualité ? Pourquoi les problèmes de rupture se posent avec une aussi forte acuité sur la ligne d’interconnexion entre Bobo et Ouagadougou ? que convient-il de faire pour prévenir techniquement une telle situation qui risque d’empirer si l’on ne n’y prend garde ?

Contrairement à cette annonce laconique selon laquelle la SONABEL décline toute responsabilité quant aux ruptures de câble qui surviennent sur la ligne d’interconnexion ; je pense qu’il y a une réelle incapacité de cette société à faire face à ses obligations vis-à-vis de sa clientèle. Il absurde de croire que la variété de causes occasionnant les ruptures de câbles dédouane la SONABEL. La professionnalisation exige que la société garantisse une fourniture d’électricité paisible en trouvant les moyens innovants pour  réduire à des proportions acceptables les désagréments qui pourraient survenir dans le transit de l’électricité. Avec des délestages qui commencent en mi-février, il faut craindre sérieusement des répercussions de performance à tous les niveaux. Aucune couche sociale n’est épargnée par ces coupures intempestives qui ralentissent ou interrompent toute activité fonctionnant sur la base de l’électricité. Cette situation est aggravée avec des coupures d’eau de l’ONEA qui déstabilisent les moins prévoyants en quête de la ressource rare.  C’est pour toute ces raisons que le Pr Pierre Meyer indiquait aux abonnés (de la SONABEL) « d’utiliser les voies de droit appropriées –le recours aux actions judiciaires- pour obtenir réparation des dommages causés par les délestages » (Observateur Paalga, 22 mars 2010).

S’il faut sans doute féliciter tous ces agents qui travaillent comme des « forcenés » pour solutionner ces ruptures ; il est urgent d’aller vers des solutions plus performantes devant contribuer à prévenir des problèmes de ce type. Ces agents abattent un travail formidable dans des conditions parfois très difficiles et il convient de saluer leur sens du devoir. Une rupture avec les modes de production classique est en conséquence une nécessité pour réduire les peines de tous, du personnel de la SONABEL comme des populations.

pers_sonabel

Vers une rupture des modes de production ?

Fondamentalement ces ruptures intempestives nous rappellent que la disponibilité de l’électricité (l’offre en électricité tourne autour de 13% en milieu urbain et 1% en milieu rural où vivent plus de 80% de la population, Etude Prospective du secteur de l’énergie au Burkina Faso, 2010) n’est pas encore un acquis au Burkina Faso, et ce, malgré l’utilisation importante des énergies issues de la biomasse et des hydrocarbures. Certains acteurs avaient crié trop tôt victoire en espérant que la réalisation de l’interconnexion aurait mis fin au problème de délestage à Ouagadougou. Quelques années après ce grand projet mobilisé à coût de milliards, le Burkina Faso est toujours à la recherche du remède miracle pour offrir à chaque burkinabè l’occasion d’avoir de l’électricité chez lui et à moindre coût.

Monsieur Narcisse Sawadogo, Directeur Général de l’Energie, affirmait dans les colonnes du journal en ligne lefaso.net (en Avril 2013) que l’énergie solaire était certainement une des solutions possibles pour réduire notre dépendance aux pays de la sous-région (Côte d’Ivoire et Ghana). La solution étant d’aller vers la production d’énergies endogènes. Pour ce faire, le gouvernement de l’époque avait en projet la construction de centrales solaires à Zagtouli (30 megawatts), de deux (2) mini centrales photovoltaïques à Ouaga 2000 et à Kaya, et d’une centrale solaire (20 megawatts) à Mana en partenariat avec la société minière SEMAFO. Selon les propos du DG, ces investissements devraient voir le jour entre 2014 et 2015. Même si les quantités d’énergie qui sortiront de ces centrales sont dérisoires par rapport à la demande, ces projets constituent des initiatives encourageantes. Il convient en conséquence d’informer l’opinion publique sur l’état d’avancement de ces projets pilotes qui amorcent la transition énergétique vers des énergies propres et accessibles à tous.

Je voudrais aussi attirer l’attention de tous sur la fameuse expression selon laquelle « plus rien ne sera comme avant ». Appliqué au domaine de l’électricité, il y a de fortes chances que cette expression fasse l’effet d’un « électrochoc » si l’on n’envisage pas une véritable démocratisation de la gestion et de la promotion de l’énergie dite endogène au Burkina Faso. La politique de l’énergie au Faso doit cesser d’être une affaire de quelques technocrates incapables de s’inscrire dans des dynamiques d’autonomisation véritable dans la production de l’électricité.  Autant les états généraux de la justice sont nécessaires pour refonder ce pouvoir autant la cristallisation des attentes des populations par des espaces de dialogues, dédié au secteur économique y compris l’énergie,  constituent un passage obligé pour construire une politique inclusive dont les réformes emporteront une adhésion citoyenne. Sans doute, cette conscience collective née avec l’insurrection populaire doit continuer d’essaimer dans tous les espaces de la vie publique. Car, c’est au prix de l’interpellation, de la veille et d’actes désintéressés au profit de l’intérêt commun que nous parviendrons à construire une société forte qui replace l’homme au centre du développement. De ce point de vue, au-delà de la SONABEL, nous, citoyens, avons tous un devoir solennel d’une maitrise de l’énergie ; il nous faut nécessairement éviter tout gaspillage dans nos bureaux et domiciles et inciter à la construction de maisons et d’installations moins consommateurs d’énergie. Evitons donc les comportements égoïstes et  une attitude à l’endroit de la SONABEL qui consiste à jeter « le bébé avec l’eau du bain ».

Yda Alexis NAGALO

Cadre d’Action des Juristes de l’Environnement / Burkina Faso

nagalose@yahoo.fr ou cajeburkina@yahoo.fr

Album Photo du Panel n°O1/2015

Créé par le 17 fév 2015 | Dans : Photos

 

 THEME CENTRAL

DROIT DE L’ENVIRONNEMENT ET DROITS DE L’HOMME

 UNIVERSITE AUBE NOUVELLE

SAMEDI 14 FEVRIER 2015

 8H00 – 12H00

20150214_091816

Cérémonie d’Ouverture

De Gauche à droite: Monsieur ZIBARE (Small Action To Save Africa), Dr SAMOWA (DG de l’U-AUBEN) et Yda Alexis NAGALO (CAJE/BF)

 

20150214_134727

Bureaux 2SA, CAJE/BF et Panélistes

20150214_134550

Photo de famille

 

20150214_102021

Panel 1: Droit à l’environnement et droits de l’homme

De Gauche à Droite: Me BONKOUNGOU, M. Jessie J. OUEDRAOGO, M. Robert ROUAMBA et M. DABO Abdoul Latif (Modérateur)

20150214_115404

Panel 2: Le droit à un environnement sain dans tous ses états

De gauche à droite: M. Riva BONKOUNGOU, M. Fabrice OUEDRAOGO, Mme Stella ZEBA et M. Pierre BAZONGO (Modérateur)20150214_134234

Remise d’une attestation de satisfecit à Monsieur Jessie OUEDRAOGO

 

Règlementation de la protection de la faune et droits des populations locales : quelles conciliations ?

Créé par le 16 fév 2015 | Dans : Protection des ressources naturelles

faune et agric

Le Burkina Faso abrite sur son territoire d’importantes ressources naturelles. Des zones arides et sahéliennes du Nord aux forêts arrosées du Sud, le pays donne à découvrir une diversité de ressources fauniques et floristiques. Les ressources fauniques, représentent un capital considérable et un facteur d’attraction des visiteurs. Le Burkina Faso est ainsi reconnu comme étant une destination privilégiée  pour découvrir la faune de l’Afrique de l’ouest.  Plus de 2/3 de la population d’éléphants de la sous-région se trouvent sur son territoire. A cela s’ajoute plus de 35 espèces de grands mammifères comme l’hippotrague, le buffle, le bubale, le phacochère, le cob de buffon et plus de 350 espèces d’oiseaux résidants. La partie Est, Ouest et Sud du pays  sont considérées  comme les domaines des grands herbivores et des carnivores tandis que le Nord abrite essentiellement de nombreuses  espèces d’oiseaux sédentaires et migrateurs.

De telles ressources fauniques, riches et variées, existent encore grâces à des mesures de protection qui ont été mises en place. Traditionnellement la conservation de la faune, sur le continent africain en général et au Burkina Faso en particulier, reposait sur le droit coutumier. En se référant à des coutumes ancestrales et des considérations religieuses une certaine  protection était accordée à la faune. Cette situation va pourtant connaitre une évolution avec la création de nouveaux Etats africains et la reconnaissance par la communauté internationale des menaces qui pèsent sur la biodiversité. La Haute Volta actuel Burkina Faso s’est  doté dès les premières années de son indépendance d’une armature juridique qui va gouverner l’ensemble de son environnement.  Cette armature juridique va tirer sa source tant des conventions internationales que de la loi fondamentale (Constitution) et d’autres instruments juridiques existants (législatif et règlementaire).

Sur le plan international, notre pays a ratifié des conventions à portée universelle et régionale  qui entrent dans le cadre de la protection de l’environnement en général et des ressources  de la faune en particulier. Il est partie à la Convention d’Alger du 15 septembre 1968, sur la conservation de la nature et des ressources naturelles. Cette convention à vocation africaine a été révisée le 11 juillet 2003 à Maputo. Partie également à la  Convention de Paris du  16 novembre 1972, sur la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel ; le Burkina Faso a bénéficié de la reconnaissance en 1977 de la biosphère de la mare aux hippopotames comme patrimoine mondial. Le complexe du parc W a lui aussi été  érigé  au titre des réserves de biosphères en 2002. Etant donné que les espèces  fauniques ignorent les frontières, les Etats sont appelés à la coopération  dans le domaine de l’environnement. Le Burkina Faso a ratifié en 1984, avec le Benin et le Niger un Accord relatif à la lutte contre le braconnage. Et plus récemment en  2008 il a conclu l’Accord de Cotonou du 11 février 2008 relatif à la gestion concertée de la réserve de biosphère transfrontalière du W qui s’étend sur le Burkina Faso, le Benin et le Niger. En plus de l’Accord de  coopération  avec le  Ghana, en matière de conservation des ressources naturelles partagées.

Au niveau interne, la Constitution adoptée le 2 juin 1991 annonce dès son préambule la prise de conscience du peuple souverain du Burkina Faso, de « la nécessité absolue de protéger l’environnement ». Elle consacre ainsi la nécessité de la protection de l’environnement en général. Quant aux richesses et les ressources naturelles, au terme de l’article 14, elles appartiennent au peuple et sont destinées à l’amélioration de ses conditions de vie. Par conséquent, la protection, l’exploitation et la valorisation des dites ressources sont soumises au respect par l’Etat et par les populations locales, des textes législatifs et règlementaires en vigueur. De nouveaux codes, plus adaptés, sont entrés en vigueur en 2011 et en 2013. Il s’agit  respectivement du Code forestier et du Code de l’environnement. Le premier qui nous sert dans cette analyse de principale référence, vise en particulier à établir une articulation harmonieuse entre la nécessaire protection des réserves  forestières, fauniques et halieutiques et la satisfaction des besoins économiques, sociaux et culturels des populations locales.

Selon l’article 71 de notre Code forestier, la faune se définit comme « l’ensemble des animaux sauvages, vivant en liberté dans leur milieu naturel ou maintenus en captivité, à l’exception des poissons, des mollusques et des crustacés ». En vue de la conservation de ces différentes espèces  et de leurs habitats, la loi a prévu la création des aires de protections fauniques sur l’étendue du territoire national. D’une douzaine d’aires protégées en 2008, le pays comptait en 2012, 27 aires protégées à but faunique sur un espace de 3 287 925 hectares. Les parcs nationaux; les réserves de faune (totales ou partielles); les réserves de la biosphère ; les sanctuaires; les ranches; les refuges locaux; les zones villageoises d’intérêt cynégétique constituent nos aires protégées. En vue d’établir une distinction entre ces aires, le législateur a pris le soin de les définir et de préciser leur mode de constitution. Une aire protégée de la faune burkinabè, peut être constituée soit par un acte législatif, soit par un acte réglementaire.  Par exemple, seuls les parcs nationaux, les réserves totales, les réserves de la biosphère et les sanctuaires sont constitués en vertu d’une loi. Les autres aires se constituent par voie règlementaire. Et si nous considérons, la théorie de la hiérarchie des normes juridique posée par H. KELSEN, il est juste de dire qu’une aire protégée constituée en vertu d’une loi, bénéficie d’une protection juridique supérieure à une aire constituée par un acte règlementaire. Cela se justifie fondamentalement plus sur le plan théorique que sur le plan  pratique, car un espace  protégé créé par une collectivité territoriale c’est-à-dire par voie règlementaire locale ; bénéficie en plus de la reconnaissance par la population locale d’une bonne protection. En outre, chaque aire faunique, une fois constituée doit  faire l’objet d’un plan d’aménagement qui est approuvé par le ministre de tutelle. Ledit plan définit les infrastructures à réaliser et précise les activités qui peuvent  être menées à l’intérieure de l’aire de protection. Il renseigne aussi sur la prise en compte ou non des droits des populations locales et riveraines. Malheureusement, au Burkina Faso de nombreuses aires protégées ne disposent pas ou ne respectent pas scrupuleusement ce document pourtant nécessaire à la mise en place d’une gestion harmonieuse et durable de notre faune. Cela est dû au fait que la volonté d’aller vers une mise en œuvre effective fait défaut;  et au fait que les plans d’aménagement manquent de légitimité. Ils sont parfois en déphasage total avec les premiers besoins des populations. L’Etat burkinabè est davantage encouragé à conjuguer à  la fois légalité et légitimité des plans d’aménagement de chaque aire. La volonté de protéger l’environnement et en particulier la faune, exige une prise en compte des besoins ou droits économiques et socio-culturels des populations locales. Une conciliation doit être toujours faite. Du reste, notre règlementation nous donne à voir selon les différentes aires, une conciliation plus ou moins réussie.

parcw

Dans les réserves partielles et les ranchs, les activités de chasse sont autorisées à la population locale. Dans le ranch de gibier de Nazinga la population est autorisée en plus de la chasse à y récolter le miel et cueillir des plantes médicinales. Au niveau des refuges locaux, les communautés  locales sont partie prenante à la gestion. Elles bénéficient du droit de définir les activités qui peuvent être autorisées à l’intérieur des refuges locaux.  Quant aux zones villageoises d’intérêt cynégétique, elles constituent des parties du terroir  des communautés de base et sont  affectées par elles à l’exploitation des ressources cynégétiques. Elles  mettent en emphase également la participation des populations locales à la gestion avec une prise en compte de certains de leurs droits économiques sociaux et culturels. La réglementation prévoit en effet, que les redevances et les taxes collectées dans le cadre de la gestion des refuges locaux et des zones villageoises d’intérêt cynégétiques soient reparties entre les budgets locaux et les organisations villageoises de gestion de la faune. Ainsi prévues, les ressources de la faune doivent revêtir un intérêt économique pour les populations locales. Elles doivent être une source de revenus considérable à travers les activités écotouristiques et commerciales  comme la vente de la chasse, des produits forestiers ligneux ou des produits artisanaux locaux. S’inscrivant  dans la dynamique d’une gestion  décentralisée des ressources faunique, le Code général des collectivités territoriales de 2004, permet aux collectivités d’organiser  leur espace rural en trois zones  que sont : la zone d’habitation, la zone de production et la zone de conservation. Avec la dégradation progressive de leur environnement, les communautés locales qui se sentent ainsi  impliquées dans la définition et la conservation de leur espace naturel ; sont motivées par le souci de pouvoir continuer de vivre sur leurs terroirs, de protéger leurs terres et de pouvoir les transmettre aux générations futures. L’exemple du village de Boumoana (Sud) est éloquent. Ses habitants frappés par la raréfaction des animaux qu’ils avaient l’habitude de chasser et face à la dégradation de leur espace naturel, ont formé un comité villageois de gestion des ressources de la faune afin de protéger les parties de leur territoire encore intactes. Avec neuf autres villages ralliés à la cause, l’ambition est de créer une zone inter-villageoise d’intérêt cynégétique.

Au-delà de ces exemples de conciliations, il faut aussi noter des atteintes non moins graves aux  droits fondamentaux des populations locales.

Dans les parcs nationaux nos populations sont dépossédées de tous droits d’usage traditionnels. Ils n’ont aucun droit de pâturage, de chasse, de défrichement, d’exploitation agricole…  Un tel régime juridique, très restrictif, n’est pas sans conséquence sur la vie des riverains du parc national du W (dans la Tapoa),  du parc national de Pô  ou du parc national d’Arly (région  de l’Est). Même si des mesures compensatrices sont prévues, elles ne sont pas toujours satisfaisantes. Et occasionnent d’autres frustrations au sein des populations. De plus en plus nous assistons à l’expropriation de certains espaces pour cause d’utilité publique. Il se trouve que l’usage ce droit par l’Etat ou ses collectivités ne fasse pas toujours l’objet d’une communication suffisante avec les  populations qui  vivent sur ces espaces.  Toute chose qui peut provoquer des incompréhensions, et susciter des comportements prédateurs liés à un très fort sentiment de confiscation des ressources. Aux yeux des villageois  les aires protégées sont devenues les seules bonnes terres, telles qu’ils les avaient connues autrefois, et sur lesquelles ils pensent avoir des droits. Aujourd’hui, ces habitants sont considérés comme   des prédateurs assoiffés de gibier et de terres fertiles à défricher alors qu’ils ne cherchent qu’à survivre par la satisfaction de leurs besoins quotidiens. Au lieu d’être un facteur de développement économique local, les aires protégées de la faune voire des ressources naturelles sont devenues, comme le disait  Sournia (1990) ‘‘des garde-manger entourés par la faim’’. Raison de plus pour aller au-delà  des actions de protection physique du territoire pour améliorer les conditions naturelles favorables à la survie des populations locales.  Par ailleurs, si elles ne sont pas exclues des aires protégées, les populations riveraines sont parfois menacées par l’augmentation des troupeaux d’animaux dans ces aires qui, ne font pas l’objet de  contrôles réguliers par les services techniques de l’environnement. Il n’est plus rare que des villageois se plaignent de la destruction de leurs cultures agricoles par les éléphants, les phacochères et les singes, qu’ils n’ont même pas le droit de chasser. Il est même question d’un nouveau type de conflit. Le conflit hommes-éléphants.  A titre illustratif, autour de la réserve de faune partielle de Pama (Est), des éléphants ont  détruit les cultures des villages riverains. Ces grands mammifères ne se sont pas limités aux cultures puis que des arbres entiers, importants pour la suivie des populations ont été déracinés.  Le conflit hommes-éléphants gagne donc du terrain. Pour exprimer leur ras le bol,  près de 300 ressortissants des villages environnants de la commune de Niangologo (Sud), ont organisé une  marche de protestation le 26 janvier dernier contre les dégâts causés par les éléphants dans leurs champs. Ailleurs, dans la région de la boucle du Mouhoun, des populations  assistent à la traversée de leurs  zones d’habitation par des troupeaux de pachydermes ; ce qui n’est pas sans risque pour leur vie. Pour tous ces dommages occasionnés par des animaux protégés, un procès-verbal de constat doit être établit afin que l’Etat indemnise intégralement les victimes. Cependant,  cette procédure est rarement suivie par les victimes. Et elles ne bénéficient d’aucune indemnisation. La survenance de toutes ces situations montre à suffisance les défaillances et le manque de planification pour un suivi à long terme des espèces protégées dans notre pays.

Pour une prise en compte  du respect strict des droits fondamentaux des populations, l’administration de l’environnement gagnerait  à être bien renforcée en ressources humaines et matérielles. De  nombreuses collectivités territoriales ne disposent pas toujours d’un service des eaux et forêts. La faune  et la flore sont des ressources d’une importance capitale pour le Burkina Faso. Au-delà des retombées économiques qu’elles génèrent pour l’ensemble du pays, les aires protégées constituent  un patrimoine inestimable à préserver. Nos autorités l’on comprit et se sont engagées dans cette voix. Toutefois, la préservation de ce patrimoine ne doit pas  enfreindre les droits fondamentaux des populations locales. D’où la nécessité de veiller au respect de la réglementation en vigueur ainsi que la création d’autres cardes juridiques et communicationnels propices pour que  les populations soient elles-mêmes protectrices des aires protégées qu’elles côtoient depuis des siècles.

Banatié Abel KOUSSOUBE

Membre du Cadre d’Action des Juristes de l’Environnement / Burkina Faso  (CAJE/BF)
ab.koussoube@gmail.com ou cajeburkina@yahoo.fr

CONFLITS FONCIERS AU BURKINA FASO : VIVEMENT LE SUR « SCEAU » SALVATEUR DE L’ETAT !

Créé par le 16 jan 2015 | Dans : Droits fonciers

cf

La récurrence des conflits fonciers est un fait au Burkina Faso à l’instar de nombreux pays africains. En effet, si les périodes qui ont suivies la crise des prix alimentaires en 2007 ont vu se produire une ruée vers les terres agricoles suscitant dans la foulée l’apparition du concept d’« accaparement des terres », il convient de souligner que les sources et la nature des conflits en matière foncière sont diverses. Des querelles entre agriculteurs et entre agriculteurs et éleveurs du fait de l’accès et de l’utilisation fortement compétitifs du foncier et des ressources naturelles en milieu rural aux profondes discordes liées aux lotissements et à l’habitat en milieu urbain et périurbain, ce sont autant de conflits liés au foncier. L’on en appelle à la responsabilité de l’Etat quant à la sécrétion concertée de mécanismes efficaces de gestion foncière avec l’ensemble des acteurs ; les « vrais » acteurs.

Il convient de noter que la question foncière, qui n’est d’ailleurs pas nouvelle, est de plus en plus au cœur de l’actualité, notamment depuis 2007 où l’acquisition de terres à grande échelle dans les pays en développement a considérablement évolué du fait de la crise des prix alimentaires. Elle mobilise des acteurs locaux, à savoir des agriculteurs, des éleveurs nomades mais aussi de nouveaux acteurs qui ont découvert en la terre un véritable moyen de sécurisation d’investissements. Les acquisitions privatives de l’espace par les nouveaux acteurs est, en cela, en nette progression. Les populations locales, en majorité rurales ou devenues urbaines du fait des remembrements, tirent également leurs moyens d’existence de la terre à travers l’agriculture et les ressources naturelles renouvelables tout en y déposant légitimement leurs habitats renforçant ainsi une certaine pression foncière.

Après les nombreux cas de conflits relayés par la presse notamment dans les régions de la boucle du Mouhoun, du centre ouest, du centre sud, c’est le cas de Nioko II dans l’arrondissement 19 de la ville de Ouagadougou qui défraie la chronique notamment par sa flagrance tout en se distinguant des autres par son caractère périurbain. Une grande superficie de cette localité aurait été vendue à la Société de Construction et de Gestion Immobilière au Burkina (SOCOGIB) au grand dam des populations locales, pis à l’insu d’aucune autorité coutumière locale comme révélé dans le journal télévisé de 20h de la RTB du 11 janvier dernier. Que faut-il retenir de cette situation ?

Notons que la forte demande sociale en matière d’accès à la terre perceptible du faite de la croissance démographique ainsi que les conflits qui en découlent suscitent des interventions de l’Etat dans la gestion du foncier au Burkina Faso. Des interventions qui paraissent parfois quasi conjoncturelle tant les conflits semblent ressurgir sous d’autres formes au fil des années. Des textes épars d’après les indépendances sur le foncier jusqu’à l’actuelle loi n° 034-2012/AN du 02 juillet 2012 portant Réorganisation Agraire et Foncière (RAF) qui a justement abrogé la loi antérieure n° 14/96/ADP du 23 mai 1996 portant elle aussi RAF, ce sont autant de dispositifs juridiques qui ont régis ou continuent de régir la terre au Burkina Faso. Des conflits multiformes relatifs au foncier et aux ressources naturelles ont cependant de tout temps persisté sous des formes aigues.

En août 2007 une Politique Nationale de Sécurisation Foncière en Milieu Rural (PNSFMR) est adoptée comme pour traduire la volonté de l’Etat de réguler définitivement l’accès au foncier et de sécuriser les droits fonciers en termes de prévention de conflits. En effet, cette politique s’est voulue participative (comme le veut les standards internationaux)  au regard des acteurs ayant pris part à son élaboration à savoir les organisations de producteurs, de femmes, les autorités coutumières et religieuses, les maires, l’administration déconcentrée et décentralisée, le secteur privé agricole. Elle a même suscité l’adoption des lois n°034-2009/AN du 16 juin 2009 portant régime foncier rural et 034-2012 précitée. Cependant il faut craindre que l’implication de certains acteurs ne soit faite pour légitimer formellement aux yeux de l’opinion nationale et internationale l’adoption d’une politique foncière qui serve en réalité les intérêts du seul Etat ou du moins des intérêts inavoués se camouflant derrière l’institution étatique ; le piège de l’ethnocentrisme est réel.

A l’analyse, cette intervention étatique a probablement, et ce serait dommage, écarté les droits fonciers endogènes de certaines populations autochtones. Au demeurant, le rapport de celles-ci à la terre en termes de droit est qualifié de « possession » comme il est clairement mentionné dans la loi sur le régime foncier rural. Cette intervention n’a visiblement pas tenu compte des spécificités locales au regard des diversités culturelles, notamment les droits fonciers existant, les modes de gestion foncière des populations locales, le terme « possession », dénotant une réserve face à une éventuelle reconnaissance des droits fonciers locaux. La possession foncière rurale étant, aux termes de l’article 6 alinéa 5 de la loi portant régime foncier rural, « le pouvoir de fait légitimement exercé sur une terre rurale en référence aux us et coutumes foncières locaux ». La « possession foncière » revêt ainsi une moindre valeur juridique eu égard au droit moderne, la référence à la notion de « pouvoir de fait » conduisant à ne considérer les « us et coutumes foncières locaux » que comme seulement des « commencements » de droit et donc non achevé; ce qui implique pour les possesseurs légitimes de terres d’accomplir des démarches administratives pour jouir pleinement de la propriété de leurs terres. Le possesseur ne dispose pas de droits sur la terre reconnus par le droit positif, qui lui ne raisonne qu’en termes de droits de propriété, quand bien même il détiendrait sa terre d’une succession lignagère comme c’est généralement le cas chez les populations locales. Celles-ci « squattent », au regard des lois modernes, sur les terres dont elles ont hérité et pour lesquelles elles ne détiennent pas de titre formelle justifiant leur titre de possesseurs légitimes. Manifestement le droit de l’Etat privilégie une logique occidentale. En effet, l’Etat du Burkina Faso intègre la forme républicaine de l’Etat qui fait peu de place aux droits endogènes dans sa sphère juridique. Il n’est donc guère surprenant que la loi portant RAF assure une réforme foncière sur la base du monopole foncier étatique et c’est ce « trop » de pouvoir étatique sur le foncier qui consacre l’ethnocentrisme qui a justement pour propriété de réduire à néant les droits endogènes et séculaires pour la plupart.

cfg

En outre, il n’est pas rare de constater sur le terrain un certain nombre de comportements susceptibles de créer des conflits sociaux. Il faut dire que certains invoquent la propriété étatique de la terre pour espérer un meilleur accès à la terre quand d’autres considèrent que si la terre appartient à l’État, c’est qu’elle appartient à tous. Les populations locales, elles, dénoncent naturellement le monopole foncier étatique au regard de la légitimité de leurs droits fonciers endogènes. Et que dire des collectivités locales qui mettent en avant leurs prérogatives de puissance publique pour disposer des terres au nom de « l’intérêt général » ? En témoigne le cas de Nioko II. Sur ce dernier aspect, il convient de souligner que la RAF définit les terres des collectivités territoriales à l’instar de celles de l’Etat central. Ces démembrements de l’Etat sont dotés de droits réels sur l’espace au niveau local de sorte qu’ils sont des relais de la gestion hégémonique du foncier par l’Etat. A l’image de l’Etat, celles-ci disposent légalement de grandes prérogatives sur les terres au détriment des populations locales et de leurs entités de gestion foncière.

En tout état de cause, la cohésion sociale et territoriale est confrontée à la réalité de l’existence de droits coutumiers qui ne doivent pas être ignorés par le législateur qui justifie son intervention dans la question foncière par la bonne gestion des demandes sociales et les conflits. La terre se veut dans nos sociétés lignagères un élément d’identité et de reproduction sociale. Elle permet ainsi de qualifier, d’identifier une communauté (la terre de telle ou telle famille ou clan, ou encore tribu). Elle est, somme toute, le patrimoine commun d’une communauté qui espère améliorer son quotidien à travers les diverses activités pouvant s’y mener et l’utilisation des ressources naturelles. Par ailleurs, la gestion du foncier au niveau local à une échelle nationale pose le problème de légitimité et surtout de capacité des acteurs locaux quant à une meilleure utilisation des espaces et même des ressources.

La RAF semble présenter des limites évidentes quant à la réelle implication des institutions locales de gestion du foncier comme indiquée par la PNSFMR. En tout état de cause, la concertation entre acteurs, par l’articulation des échelles de décisions, sera une dimension indispensable de la mise en place d’outils politico-juridictionnels de gestion du foncier à tous les échelons territoriaux d’où l’idée du sur « sceau » salvateur de l’Etat. Oui, l’Etat doit sortir de son apparent ethnocentrisme pour aller au-delà du droit positif d’inspiration coloniale aux fins d’une prise en compte effective des aspirations réelles des populations. Il doit oser ce pas original, ce sursaut impératif qui se veut inclusif et qui tranchera avec les méthodes habituelles de gestion du foncier. Ce serait une révolution copernicienne qui rapprochera incontestablement les positions jadis figées pour une cohésion sociale défiant toute divergence liée à la terre. C’est cette approche collectiviste de gestion du foncier qui, se voulant véritablement participative eu égard à la prise en compte des droits endogènes, constituera vraisemblablement un signal fort de la part de l’Etat. Oui, un sceau qui sera la marque indélébile consacrant définitivement la gestion participative et consensuelle des terres, éléments d’identité sociale et d’enjeux fortement conflictuels, de sorte que la paix sociale s’en trouve sauvée.

L’intégration des pratiques locales dans un cadre légal est une condition de l’acceptabilité du dispositif juridique de gestion du foncier au niveau locale. L’adoption de règles de gestion du foncier gagnerait à intégrer les pratiques locales qui survivent aux générations et aux individus. L’adoption en amont de coutumiers juridiques par exemple aurait probablement rendue plus efficient la prise en compte des acteurs locaux du foncier dans l’adoption de la politique foncière. Une codification ou même une identification complète des systèmes endogènes de gestion foncière pourrait nous éviter d’autres conflits même s’il faille donner le choix aux uns et aux autres quant à leur utilisation.

La nécessité d’adopter des outils juridiques de gestion foncière adaptés est désormais un impératif. Encore faut-il que ces nouveaux outils de gestion foncière ne soient pas imposés aux acteurs fonciers locaux au risque de ne pas rencontrer l’adhésion de ceux-ci. Il faut donc éviter d’adopter par le haut les règles juridiques de gestion foncière. Ce serait vouloir les imposer à leurs destinataires qui, il faut le rappeler, sont habitués à leurs règles de gestion endogènes de la terre très souvent caractérisées par l’oralité. Lesdites règles sont des pratiques locales qui bénéficient d’une légitimité auprès de ceux-ci car issues d’eux- mêmes. Nous devons donc aboutir à une savante articulation entre la gouvernance locale (droits endogènes) et la gouvernance républicaine (droit positif). L’enjeu ici est celui du « pluralisme juridique » ; la coexistence dans un même espace de plusieurs ordres ou systèmes juridiques concurrentiels.

    Mamoudou BIRBA

Afrique Internationale pour le Développement et l’Environnement au 21ème siècle/ Bureau National du Burkina Faso (AIDE21- Burkina)

Collaborateur du Cadre d’action des Juristes de l’Environnement (CAJE)

birbamamoud@yahoo.fr/ cajeburkina@yahoo.fr

LA NECESSITE D’UNE MEILLEURE IMPLICATION DANS LA LUTTE CONTRE LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES

Créé par le 15 jan 2015 | Dans : Lutte contre la pollution et les nuisances

 cc1

Il n’est plus permis de douter que les changements climatiques constituent de nos jours le défi écologique majeur jamais égalé que la communauté internationale doit relever dans une synergie d’action. Les changements climatiques sont indubitablement le corolaire de l’activité humaine qui pollue l’atmosphère le sol et les eaux.

En effet, selon le dernier rapport du Groupe d’Experts intergouvernemental sur l’évolution du climat(GIEC)  publié le 02 Novembre 2014, il est établi à un degré de certitude de 95% que l’activité humaine est la principale cause du réchauffement observé. Des 1990 le GIEC a démontré dans son premier rapport que les émissions des gaz dues aux activités humaines accroissent sensiblement la concentration dans l’atmosphère des gaz à effet de serre dioxyde de carbone, méthane, chlorofluorocarbone (CEC) et oxyde nitreux.

Ce rapport,  par ailleurs fait état de la hausse sensible de la température de 0,85o c en moyenne entre 1880 et 2012 et le  réchauffement climatique atteindra le pic de 4,8oc à l’horizon 2100 par rapport à la période 1986-2005 dans le scénario le plus pessimiste c’est-à-dire si les émissions des gaz à effet de serre continuent dans leur rythme actuel.

Nul n’est sans savoir que la course vers le développement économique est le centre névralgique des politiques publiques et privées. Toute chose qui ne milite pas en faveur d’un lendemain écologique radieux. Pire, on est tenté de dire sous réserve de porter le label d’un afro pessimiste que la lutte contre les pollutions a pris du plomb dans l’aile  eu égard  au phénomène de la révolution technologique, mère de l’industrialisation galopante et généralisée en méconnaissance des principes cardinaux du droit de l’environnement. Cette révolution technologique vient accroitre l’arsenal des moyens de destruction de l’environnement dont dispose nos contemporains.

Pour mémoire, il convient de rappeler  qu’il est établi depuis 90 que les gaz à effet de serre, parmi lesquels le co2, contribuent au phénomène de l’effet de serre planétaire qui est à l’origine du réchauffement climatique qui à moyen ou à long terme est à l’origine des changements climatiques. Si l’ampleur de ce phénomène fait toujours l’objet d’une controverse, leurs effets sont cependant bien connus. Il s’agit entre autre de la fonte des glaciers avec la montée du niveau des mers, l’amplification de la désertification, la multiplication des catastrophes et les menaces diverses sur les espèces animales et végétales.

La détérioration de la couche d’ozone et les changements climatiques constituent deux menaces globales auxquelles la communauté internationale est confrontée aujourd’hui. La globalité de la menace réside en ce qu’elle affecte l’environnement mondial et aussi au fait qu’aucun Etat ne peut de manière individuelle relever ce défis car tous les Etats y contribuent de manière diverses. Par ailleurs, les coûts de cette lutte sont exorbitants pour ne porter que sur la tête d’un seul Etat. C’est ce qui fait la quintessence de l’action internationale en la matière.

Cependant, force est de constater que la communauté internationale a fait preuve d’une intelligence créatrice légendaire en posant les jalons de cette lutte contre les changements climatiques. Malgré ces instruments, la question de la protection de l’environnement reste critique et comme l’adage le dit : on a beau chassé le naturel ; il revient aux galops d’où la taxation du droit de l’environnement de droit dormant selon le professeur Maurice KAMTO.

Les bases juridiques en la matière sont la convention cadre des nations unies sur les changements climatiques et son protocole, le protocole de Kyoto. Il  convient de rappeler que le Burkina a ratifié tous ces instruments. La 1ère convention comme toute convention cadre pose un minimum d’obligations à la charge des Etats parties. Ils doivent établir, mettre à jour, publier et communiquer à la conférence des Etats parties les inventaires nationaux des émissions anthropiques par leur source. Ils doivent également faire connaître les mesures nationales visant à faciliter l’adaptation aux changements climatiques et finalement une coopération internationale

Quant au protocole de Kyoto il constitue une sacrée évolution à une double facette même si du reste on reconnait que le protocole est arrivé à son terme en 2012 :

D’abord il impose aux Etats membres une réduction totale d’au moins de 5% de gaz à effet de serre par rapport au niveau de 1992. Les Etats membres sont invités à établir des programmes nationaux ou au cas échéant régionaux pour améliorer les qualités des coefficients d’émission des données sur les activités et les modèles locaux.

CC2

La conférence de Lima tenue en Novembre 2014  devait servir du nouveau cadre juridique de la lutte pour la limitation  des émissions de gaz à effet de serre et portait les espoirs du relais du protocole Kyoto étant donné que le protocole de Kyoto n’est plus de mise.

Contre toute attente, la montagne a accouché d’une souris au grand découragement des environnementalistes et plongé le monde dans un océan de désespoir. Les différents Etats ont sacrifié la lutte contre la pollution sur l’hôtel des intérêts partisans et nationaux lors de cette conférence de Lima et le document juridique tant attendu n’a pu être adopté.

Néanmoins, Lima reste toujours un pôle d’espoir pour la réduction des gaz à effet  de serre car c’est le cadre juridique de la réduction des gaz à effet de serre en phase avec le temps surtout que Kyoto n’est plus de mise et parce que  les Etats n’ont pas pu adopter un instrument accepté de tous, il y aura la conférence de Paris de 2015 sur les changements climatiques .Ce qui nous donne d’espérer à cette victoire sur les changements climatiques.

  En définitive, nous disons que la lutte contre les changements climatiques est un défis lourd mais pas insupportable ni désespéré. Des politiques publiques doivent être adoptées dans le sens de la réduction des pollutions et en ce sens ; la loi sur l’interdiction de la production, la commercialisation et la distribution des sachets plastiques non biodégradables adoptée à l’unanimité des 107 votants le 20 Mai 2014 par l’assemblée nationale burkinabé  démontre la hargne avec laquelle les politiques veulent donner échos. Les politiques publiques doivent d’abord travailler dans le sens d’inculquer une pédagogie écologique à nos contemporains, et se départir de tout  comportement d’hésitation dans la prise de décisions courageuses s’inscrivant en droite ligne dans la limitation des émissions des gaz à effet de serre.

Il faut ensuite aller vers des dynamiques typiquement africaines qui offriront des solutions idoines pour s’adapter aux changements climatiques. Il faut de ce point de vue associer les décideurs, scientifiques et OSC compétentes pour définir une stratégie africaine et un plan d’action pour contrer efficacement les effets des changements climatiques sur le continent. Le Burkina Faso, en particulier, souffre des conséquences des effets des changements climatiques. L’Etat, au-delà de la mise en œuvre des conventions spécifiques sur les changements climatiques, doit définir une politique et un plan de gestion du climat qui est inclusif et participatif. Il faut préparer par des telles initiatives les populations locales à plus de responsabilité et d’actions pour la protection de la nature.

Au niveau individuel, chaque citoyen devra s’approprier les bonnes pratiques  de la lutte contre les changements climatiques et se laisser guider par un esprit éco-citoyen. Il nous appartient collectivement de faire la police de l’environnement à chaque niveau, gage de tout développement car ce serait un leurre que de prôner une croissance infinie dans un monde qui serait fini.

BAZONGO Pierre

Juriste de l’environnement

Membre du Cadre d’Action des Juristes de l’Environnement / Burkina Faso

pierrebazongo@yahoo.fr ou cajeburkina@yahoo.fr

La violation du droit à un environnement sain comme menace à la stabilité au Burkina Faso

Créé par le 12 jan 2015 | Dans : Environnement et Paix

guerre

Pendant longtemps, l’on a eu une approche restrictive des problèmes liés à la paix et à la sécurité en n’y prenant en compte que des questions éminemment politiques. Aujourd’hui, une telle approche ne peut qu’être rejetée si l’on analyse le comportement des organisations internationales et des États dans les actions visant la paix et la sécurité. Sont désormais pris en compte d’autres aspects liés à la santé et à l’environnement. À titre d’exemple, cela s’est ressenti dans les travaux du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine qui s’est plusieurs fois prononcée sur la maladie à virus ébola comme menace à la paix, la sécurité et la stabilité en Afrique de l’ouest. Aussi faut-il constater cet élargissement au niveau du Conseil de sécurité des Nations Unies qui a eu à considérer les questions liés au VIH/SIDA et la mauvaise gestion du genre comme des menaces à la paix.

Au Burkina Faso, alors que l’on est dans un processus de transition, il est plus qu’impératif de prévenir les différents facteurs pouvant compromettre la stabilité. À ce titre, un élément important qui ressort d’une analyse de la situation nationale est la question du droit à un environnement sain.

Le droit à un environnement sain a pour objectif d’assurer à l’homme un cadre de vie suffisant pour lui et pour les générations futures. Il a été affirmé à l’article 29 de la Constitution de juin 1991 en ces termes : « le droit à un environnement sain est reconnu ; la protection, la défense et la promotion de l’environnement sont un devoir pour tous ». C’est dans cette dynamique que le Code de l’environnement « vise à protéger les êtres vivants contre les atteintes nuisibles ou incommodantes et les risques qui gênent ou qui mettent en péril leur existence du fait de la dégradation de leur environnement et à améliorer leurs conditions de vie » (article 3). Il est également un droit fondamental comme le précise l’article premier de la Déclaration de Stockholm : « l’homme a un droit fondamental […] a des conditions de vies satisfaisantes, un environnement dont la qualité de vie lui permette de vivre dans la dignité et le bien être ».

Il se trouve donc être un droit de l’homme qui est également lié au droit de l’environnement. L’objectif de la présente contribution est de montrer que la violation de ce droit au Burkina Faso est une menace à la stabilité nationale et que l’État devrait prendre les mesures appropriées. Comme le disait Louis Pettiti, ancien juge à la Cour européenne des droits de l’homme, le respect des droits fondamentaux est une condition à satisfaire pour parvenir à la paix.

Jean Baptiste DUROSELLE nous enseigne que dans tout conflit, il existe deux éléments : une action de l’unité politique et une réaction de la population. Les évènements de fin octobre au Burkina Faso en sont un exemple patent. Partant de cet axiome, on peut distinguer quatre types de déclenchement des conflits : le déclenchement par décision ou déclenchement artificiel, le déclenchement par occasion, le déclenchement par contrecoup et le déclenchement par maturation. Le dernier cas semble correspondre le mieux à notre situation en raison du fait que les questions environnementales donnent rarement naissance à de vives contestations immédiates pouvant déboucher à des conflits, sauf dans des hypothèses de catastrophes naturelles spontanées comme celles de Fukushima, de Probo Koala, etc.

En général, les conflits qui naissent par maturation portent sur les questions liées au développement. En effet, il y a une prise de conscience collective croissante des droits et une négation grandissante de la situation alors existante. On peut citer à titre d’exemple le printemps arabe dans le nord de l’Afrique et même l’insurrection populaire contre le Président COMPAORÉ.

La maturation dont il est ici question porte sur trois facteurs intimement liés : la croissance démographique, les problèmes socio-économiques et le courant idéologique.

Au niveau de la démographie, on a une croissance exponentielle du nombre de personnes victimes de violation du droit à un environnement sain. On compte plus de personnes souffrant de nuisances sonores en raison de la prolifération des bars et des engins à moteurs. Il y a également plus de personnes qui respirent de l’air pollué émanent des véhicules à moteurs et des usines, etc. Vient ensuite l’épineuse question des mines et carrières dont l’impact sur le droit à un environnement a été plusieurs fois dénoncé sans suite importante, créant une pléthore de mécontents. À ceci s’ajoute une situation plus insidieuse qui touche de très nombreuses personnes à savoir l’utilisation des Organismes génétiquement modifiés (OGM) dans l’agriculture. Le problème est qu’une telle pratique a des conséquences sur la santé et l’environnement, ce qui pourrait à long terme, compromettre l’existence de l’agriculture familiale et créer du même coup un décalage énorme entre les ressources naturelles disponibles et les populations à satisfaire. Il se construit donc de jour en jour un potentiel bloc de résistance vis-à-vis de l’inaction de l’État pour empêcher ces nuisances de façon utile.

Sur le plan socio-économique, la maturation se fait par la contestation de plus en plus grande aux industries extractives surtout. Ces contestations ont un quadruple pendant. Premièrement, les populations sont profondément affectées par les activités extractives qui causent des délocalisations mal organisées en sus d’un dédommagement insuffisant. Deuxièmement, les populations riveraines font face à une inflation exorbitante qu’elle ne supporte que difficilement, justifiant la fuite des écoles, des champs et des pâturages pour un orpaillage clandestin et dangereux. Troisièmement, on note une pollution abondante avec une incertitude sur l’impact à long terme, ce qui met en question la viabilité dans ces espaces une fois les extractions terminées. Enfin, et dans une échelle nationale, il y a une insatisfaction générale quant à l’apport de ces activités extractives au développement du pays qui est infime relativement à la valeur de la matière exportée.

Ces éléments démographiques et socio-économiques viennent enfin donner force à un mouvement émergent prônant un meilleur respect du droit de l’environnement et spécialement du droit à un environnement sain. C’est la clé de voute du processus. Une fois les frustrations créées et entretenues, c’est l’idéologie environnementaliste qui viendra donner force aux revendications pour un meilleur cadre de vie, un environnement sain, moins de pollution, etc. L’ampleur de ces revendications est dépendante du niveau de frustration des populations. On pourrait alors avoir à faire à des mouvements de revendications incontrôlés qui peuvent compromettre la stabilité nationale.

 ecocide

Éviter ce conflit n’est pourtant point hors de porté. Les conflits par maturation sont par définition les plus faciles à prévenir dans la mesure où ils suivent un processus long avant de naître. Il ne faut tout de même pas les banaliser car une fois nés, ils prennent facilement des tendances radicales. Pour ce, l’État doit entreprendre deux catégories de mesures, la première étant sous l’angle des droits de l’homme et la seconde sous l’angle du droit de l’environnement.

Sous l’angle des droits de l’homme, l’État, au nom de ses engagements internationaux doit s’acquitter de trois obligations : respecter, protéger et instaurer le droit à un environnement sain. De façon succincte, respecter signifie que l’État évite d’intervenir ou d’entraver l’exercice du droit à un environnement sain. Protéger signifie qu’il doit cuirasser les individus et les groupes contre les violations dudit droit. Instaurer (ou mettre en œuvre, ou encore donner effet) signifie qu’il doit prendre des mesures positives pour faciliter l’exercice du droit à un environnement sain. Au niveau africain, et dans le cadre de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, on parle plutôt de quatre niveaux d’obligations : respecter, protéger, promouvoir et réaliser le droit à un environnement sain. Ces obligations ont d’ailleurs été rappelées par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples dans sa décision sur la célèbre affaire Ogoni rendue le 27 octobre 2001. Rappelons que cette affaire traitait de la violation du droit à un environnement sain des peuples Ogoni du Nigeria causée l’extraction pétrolière débutée dans les années 1960. Cette situation donna lieu également à des violences en raison de l’inertie du gouvernement face aux exigences des populations.

Sous l’angle du droit de l’environnement, les obligations de l’État sont plus nombreuses et contenues dans divers instruments juridiques. Pour l’essentiel, on peut retenir qu’il doit veiller au respect de la législation en matière de pollution et de nuisances de même que le cahier des charges des industries extractives. À cet effet, la relecture du Code minier et le renforcement des capacités de contrôle et de sanction de l’Etat seront capitales pour un meilleur encadrement des activités extractives. L’ensemble de ces mesures devrait être entreprises avec la participation des populations afin de bénéficier de la légitimité nécessaire.

Enfin, il est bien de savoir que la violation du droit à un environnement sain cause la violation de nombreux autres droits de l’homme, qu’ainsi la promotion d’un environnement sain est d’intérêt général et une obligation pour toutes les personnes physiques et morales et que « toute personne peut porter plainte devant les autorités administratives ou judiciaires compétentes afin de faire cesser les nuisances générées par les activités qui troublent la tranquillité, portent atteinte à la sécurité ou à la salubrité publique » (article 5 du Code de l’environnement).

Il serait désastreux que pour des raisons quelconques l’on soutienne un développement économique d’ailleurs vain en violation du droit à un environnement sain et en méconnaissance des enjeux sécuritaires et de paix.

Jessie Josias OUEDRAOGO

Membre du Cadre d’action des juristes de l’environnement / Burkina Faso (CAJE/BF)

jessiejosias@gmail.com ou cajeburkina@yahoo.fr

Loi portant code de l’environnement au Burkina Faso

Créé par le 08 jan 2015 | Dans : Législation nationale

fichier pdf loi n°006 portant code de l’environnement

Textes sur l’environnement à Madagascar

Créé par le 08 jan 2015 | Dans : Législation nationale

fichier pdf Madagascar – Textes environnement

Loi portant protection de l’environnement au Congo

Créé par le 08 jan 2015 | Dans : Législation nationale

fichier pdf CG_Loi_sur_la_protection_de_Environnement

Loi-cadre sur l’environnement en Republique du Benin

Créé par le 08 jan 2015 | Dans : Législation nationale

fichier pdf loi cadre sur l’environnement

123

Unegouttedespoirpourlecameroun |
Villaangelafrancosuisse |
Conseil syndical - le hamea... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Puppiesandkitty
| Ave91
| Arcenciel68