CAMPBELLTON – Le gouvernement fédéral vient de resserrer les mesures de pêche afin de protéger les stocks de saumons de l’Atlantique, en baisse continuelle depuis quelques années. Désormais, les pêcheurs récréatifs devront remettre la totalité de leurs prises à l’eau.

Auparavant, les pêcheurs récréatifs pouvaient conserver leur récolte jusqu’à concurrence de quatre madeleineaux (plus de 35 cm, mais de moins 63 cm). Ce quota de rétention passe maintenant à zéro, la remise à l’eau étant obligatoire.

La mesure entre en vigueur pour l’ensemble de la région du Golfe, dont la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick. Elle fait suite aux recommandations du Comité consultatif ministériel sur le saumon de l’Atlantique et vise à appuyer les efforts de conservations de la ressource. Elle reçoit d’ailleurs l’aval de nombreux organismes, incluant la Fédération du saumon de l’Atlantique.

Selon le ministère de Pêches et Océans Canada, le nombre estimé de saumons de l’Atlantique en mer est passé de 1,7 million de poissons au milieu des années 1970 à environ 600 000 aujourd’hui, soit un déclin de 69 % en l’espace d’une quarantaine d’années, de là l’importance d’agir.

Au Restigouche, où la pêche récréative au saumon constitue une activité touristique générant plusieurs millions de dollars, on voit cette restriction d’un bon œil, mais pas sans une certaine crainte.

«On se doutait que ça allait bientôt être mis en place, car ça se parlait beaucoup dans le milieu. C’est certain que l’on peut s’attendre à une baisse de l’achalandage des pêcheurs dans les eaux publiques et celles réservées de la Couronne» explique David LeBlanc, directeur général du Conseil de gestion du bassin versant de la rivière Restigouche.

Il ajoute que la remise à l’eau est déjà courante depuis quelques années dans environ 95% des camps de pêche privés situés dans le bassin.

«Ça ne devrait pas avoir d’impact sur l’économie reliée aux camps, mais plutôt toucher les pêcheurs qui achètent leur licence pour les eaux publiques et de la Couronne», souligne-t-il, estimant entre 600 et 800 le nombre de madeleineaux récoltés chaque année par cette catégorie de pêcheurs.

«L’objectif de cette mesure est noble, mais plusieurs se demandent par contre si cela va vraiment changer les choses. Ici par exemple, on estime que la population de madeleineaux est composée à 95% à 98% de mâles. Ça n’aidera donc pas beaucoup au niveau du dépôt d’œufs dans le système. Mais en même temps, c’est certain que si on remet tous les saumons à l’eau, ça ne peut pas nuire. La mesure est toute récente, c’est difficile de dire avec exactitude ce qui en découlera. On est encore en train d’examiner le tout à l’heure actuelle», dit M. LeBlanc.

Et qu’en est-il du Québec dans tout cela, car la rivière Restigouche est une zone frontalière? Si la mesure annoncée par le fédéral ne touche que le Nouveau-Brunswick, cela signifierait en effet qu’une partie de la Restigouche – sa portion québécoise – n’est pas assujettie à cette nouvelle réglementation, donc que la rétention de saumon serait possible d’un côté, mais pas de l’autre de la rivière. «Nous n’avons toujours pas eu de confirmation à savoir si la mesure de remise à l’eau sera harmonisée avec le Québec. Il va falloir qu’on vérifie très sérieusement l’impact sur les eaux frontalières. On espère que cette zone grise se règlera rapidement afin qu’on ne se retrouve pas avec une pression de pêche accrue dans la rivière», soutient M. LeBlanc.

Questionné à ce sujet, le ministère soutient que les mesures de gestion s’appliquent effectivement seulement pour les détenteurs de permis du Nouveau-Brunswick et non pour ceux du Québec. Toutefois, il entend continuer ses discussions avec le Québec afin d’harmoniser les mesures de gestion pour le saumon de l’Atlantique dans les eaux limitrophes aux deux provinces.

 

Hameçon sans ardillon

La remise à l’eau obligatoire est accompagnée d’une autre mesure qui risque, selon M. LeBlanc, de faire grincer les dents de plusieurs pêcheurs de saumon, soit l’obligation d’utiliser des mouches artificielles avec hameçon simple sans ardillon. «Ça, je suis convaincu que ça va causer plusieurs désagréments, car on retrouve en grande majorité des hameçons à ardillon dans les boîtes à mouches des pêcheurs», explique-t-il.

L’ardillon est un crochet situé à l’arrière de l’hameçon. Il fait en sorte que le poisson a plus de difficultés à se décrocher. «Cette mesure est mise en place afin d’éviter les risques de blessures chez le poisson, car l’hameçon avec ardillon est parfois plus difficile à enlever. Les pêcheurs moins expérimentés pourraient par ailleurs avoir plus de difficulté à ramener une proie avec un hameçon régulier puisqu’il a plus de facilité à se décrocher», mentionne M. LeBlanc.

 

Augmentation du nombre de jours de pêche pour le bar rayé

Si Pêches et Océans Canada oblige la remise à l’eau du saumon de l’Atlantique, c’est une tout autre histoire pour ce qui est du bar rayé.

Le ministère annonce en effet un accroissement des possibilités de pêche récréative de ce poisson réputé comme prédateur de saumon. Cette initiative touche le sud du golfe du Saint-Laurent – dont les Maritimes – pour cette année ainsi que l’an prochain. Les données recueillies démontrent en effet que les populations de cette espèce – autrefois en déclin prononcé – se portent bien et sont en croissance, ce qui permet d’ajouter quelques jours à l’effort de pêche. Par rapport à 2014, sept jours ont été ajoutés à la période de pêche avec rétention et 31 jours ont été ajoutés à la période de pêche avec capture et remise à l’eau. De plus, une taille limite supérieure de 65 cm a été établie pour protéger les grands géniteurs et une taille limite inférieure de 50 cm pour minimiser la prise de poissons qui ne sont pas encore matures.

L’annonce de cette augmentation de l’effort de pêche pour le bar rayé réjouit d’ailleurs le directeur du Conseil de gestion du bassin versant de la Restigouche, David LeBlanc. «Ce sont des mesures qui vont augmenter la récolte de ce poisson, donc limiter la prédation envers le saumon. C’est également une alternative pour les pêcheurs qui désirent essayer autre chose que le saumon», dit-il.

La pêche récréative du bar rayé aura lieu cette année du 1er mai au 31 octobre 2015. Durant la période de rétention, les pêcheurs à la ligne pourront capturer et retenir un maximum d’un bar rayé par jour. Et comme pour le saumon, la pêche avec des hameçons à ardillon sera interdite.

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