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Territoires à " alimentation positive ", une (r)évolution citoyenne



  • Face à la crise de confiance envers une alimentation hyperindustrialisée et mondialisée, les territoires se sont fortement mobilisés. Les territoires sont une échelle permettant de créer plus facilement de la cohérence entre des politiques trop segmentées (agriculture, santé, environnement, éducation…), de créer des synergies entre acteurs, de la transparence, de la confiance, et de la solidarité. Ils agissent aujourd’hui en véritables laboratoires de l’innovation sociale.

    La Fondation Daniel et Nina Carasso accompagne ce vaste mouvement pour permettre à ces énergies de se concrétiser en systèmes alimentaires durables d’avenir.

     

    La France connait un véritable foisonnement d’initiatives alimentaires locales.

    Pour les pouvoirs locaux, l’alimentation est au cœur de nombreux enjeux cruciaux : souveraineté alimentaire, santé publique, justice sociale, aménagement des territoires, gestion des déchets, emploi, gestion des terres et des ressources naturelles, attractivité touristique, protection du patrimoine culturel et de la biodiversité, éducation…

    De plus en plus, les collectivités françaises cherchent à reprendre le contrôle de leurs systèmes alimentaires. Elles suivent ainsi l’exemple de villes pionnières de l’alimentation durable, en s’inspirant souvent des innovations qui éclosent à l’étranger. En témoignent les dynamiques fortes des Transition Towns[1], de la Déclaration de Rennes[2] et du Pacte de Milan[3], ou encore le soutien croissant qu’elles apportent aux circuits courts ou à des mouvements comme Mon restau responsable[4]. En octobre 2015 à Milan, 113 grandes villes dans le monde, dont 7 métropoles françaises, se sont engagées à développer des systèmes alimentaires territorialisés vecteurs d’équité sociale et économique.

    En 5 ans, la Fondation Daniel et Nina Carasso a soutenu plus de 145 projets en France (parmi plus de 830 reçus) et 36 en Espagne (cf. encart), qui ne constituent qu’un aperçu des dynamiques à l’œuvre  dans ces deux pays. Si la société civile est très active, de plus en plus de projets sont portés par des collectivités qui souhaitent se saisir de la question alimentaire. En France, le Ministère de l’agriculture a dénombré en juin 2016 plus de 60 projets alimentaires territoriaux (PAT). La loi d’avenir de 2014 du Ministère de l’agriculture a d’ailleurs renforcé leurs capacités d’action sur l’alimentation5, et l’hexagone se couvre progressivement d’un maillage de plus en plus serré d’initiatives territoriales, tandis que des réseaux de collectivités s’organisent pour faire valoir leurs revendications6. Cet élan des territoires est encore récent, mais foisonnant. Certains prennent le temps de la concertation, d’autres favorisent l’action politique rapide. Des collectivités pionnières œuvrent depuis près deux décennies, de plus en plus innovent en développant des approches pragmatiques, systémiques et ambitieuses, beaucoup observent et s’inspirent de l’existant.

    Les leviers d’action sont nombreux et aujourd’hui connus, même si des efforts restent à accomplir pour faciliter leur mise en œuvre : l’agriculture urbaine, la restauration collective, la protection du foncier agricole, l’accompagnement des filières locales, la mise en place de conseils alimentaires consultatifs (food councils), la lutte contre le gaspillage, le développement de nouvelles infrastructures… La mise en place de politiques alimentaires concertées questionne tant les structures politiques que le rapport des citoyens à l’espace public et à la solidarité, avec un objectif partagé : renforcer la résilience des territoires en favorisant le respect de l’environnement, de l’économie locale, de l’équité, de la santé et du vivre-ensemble.

    De nombreux freins à l’action des collectivités existent cependant : certaines contraintes inscrites dans le code des marchés public, la complexité et les difficultés de coordination inhérentes à la stratification territoriale, ou encore le manque de coordination dans la mise en œuvre des différentes politiques publiques. Les collectivités françaises disposent aussi de marges de manœuvre sous-exploitées pour orienter le système alimentaire : les Plans locaux d’urbanisme, les Schémas de cohérence territoriale, les agendas 21 sont autant d’outils mobilisables.

     

    Soutenir et accompagner les  projets les plus prometteurs

    Le rôle de la Fondation Daniel & Nina Carasso consiste à donner davantage de moyens aux porteurs de projets les plus prometteurs, à identifier avec eux de nouvelles pistes de solution, à soutenir la diffusion des apprentissages et des bonnes pratiques. Pour cela, elle agit directement et avec les 145 partenaires français qu’elle soutient financièrement, à plusieurs niveaux :

    -       Soutenir l’action de collectivités pilotes dans l’expérimentation et la capitalisation d’initiatives pionnières ;

    -       Accélérer le développement d’outils de politiques alimentaires adaptées à la diversité des contextes culturels, juridiques, environnementaux et socio-économiques, pour faciliter la transition des territoires ;

    -       Explorer certains leviers d’action, comme la restauration collective, afin de renforcer des politiques agricoles, économiques, environnementales et nutritionnelles locales ;

    -       Soutenir l’expérimentation et la diffusion de pratiques agricoles et alimentaires durables, par la recherche participative ;

    -       Repenser les modalités de l’aide alimentaire pour garantir sa pérennité, améliorer l’accès des personnes vulnérables à une alimentation de qualité et garantir leur dignité ;

    -       Encourager l’insertion professionnelle et sociale de personnes isolées dans des chaines de valeur durables (production, transformation, distribution…) ;

    -       Promouvoir une approche multidisciplinaire dans la recherche internationale sur les systèmes alimentaires, et concevoir des projets de recherche stratégiques tournés vers les nouveaux fronts de recherche, etc.

     

    Quelques exemples de la vitalité et la diversité d’actions à l’échelle des territoires.

    Mouans Sartoux, pionnière depuis plus 20 ans sur la question de la politique alimentaire locale. En 2012, première ville française de plus de 10 000 habitants à servir des repas 100% bio dans ses écoles.

    La ville de Mouans-Sartoux développe depuis plus de 20 ans une politique de maintien des espaces agricoles sur son territoire ainsi que de soutien à la production et à la consommation locale, notamment à travers des outils comme l’Agenda 21 et le plan local d'urbanisme (PLU). Après avoir notamment réussi à approvisionner la cantine scolaire en 100% bio depuis 2012, les associations de la commune appuyées par la ville souhaitent renforcer cette dynamique par la création d’une Maison de l’alimentation durable. Soutenue par la Fondation, ce lieu permettra d'aider à l’installation de nouveaux agriculteurs, et comprendra un laboratoire de transformation. Cette Maison permettra également de sensibiliser les consommateurs, et de conduire des actions d’évaluation, capitalisation et diffusion de l'expérience acquise. Ce succès repose notamment sur la création d’une régie municipale agricole.

    BioVallée, territoire de transition alimentaire, énergétique et écologique

    3 communautés de communes, regroupant 55 000 habitants, développent une politique alimentaire locale intégrant les enjeux environnementaux, nutritionnels et socio-économiques : elles soutiennent les agriculteurs locaux respectueux de l’environnement, appuient des filières équitables et soutiennent des coopératives de transformation et distribution, améliorent la qualité des produits alimentaires dans les cantines scolaires, sensibilisent élus et consommateurs. A l’échelle du territoire, le projet financé par la Fondation organise la mise en réseau des acteurs autour d’une logistique optimisée et partagée pour le développement des circuits courts. Avec une implication forte des citoyens, les collectivités en transition souhaitent atteindre 80% de produits bio et locaux dans les cantines, une forte réduction du gaspillage, et une forte sensibilisation aux pratiques alimentaires saines et durables.

    IUFN – International Urban Food network

    L’IUFN est une association française dont l’objectif est d’appuyer  les collectivités élaborant des politiques alimentaires locales. Le projet soutenu par la Fondation concerne quatre territoires pilotes (Conseil régional du Centre-Val de Loire, Pays Loire Nature Touraine, Métropole de Bordeaux et Ville de Lyon). Il vise à réaliser un état des lieux des pratiques et acteurs innovants, à expérimenter des mécanismes de gouvernance alimentaire inclusifs, et à faciliter la diffusion des enseignements via des guides méthodologiques. Ce projet ambitieux agit à différentes échelles territoriales pour analyser la complémentarité des niveaux administratifs et développer des outils de gouvernance adaptée pour chacun.

    Terres en villes – Un réseau national pour un projet alimentaire territorial co-construit et partagé

    Réunissant à parité des collectivités et des chambres d’agriculture, l’association Terres en Villes vise à co-constuire les outils d’une gouvernance multi acteurs des systèmes alimentaires, en réunissant pouvoirs publics locaux, entreprises, associations et chercheurs. Ce projet expérimente, dans trois agglomérations pilotes (Lille, Grenoble et Lorient) des démarches articulant politiques agricoles, sociales, de développement durable et d’aménagement. Ces méthodes partagées sont élaborées avec la participation de scientifiques et d’usagers.

    Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme (FNH) : La FNH en partenariat avec le réseau Restau Co apporte des solutions pratiques aux acteurs de la restauration collective qui souhaitent améliorer la durabilité de leurs pratiques. Ce projet a déjà séduit plus de 200 restaurants collectifs. Il propose un portail internet dédié à l'échange d'information entre professionnels, la mutualisation des bonnes pratiques, le déploiement d'une méthode de certification participative pour accompagner et valoriser les établissements en transition, ainsi qu’un référentiel commun sur la gestion des déchets et du gaspillage, de l'approvisionnement, de l'information aux convives et formation des professionnels.

     

    Pour aller plus loin,

    En partenariat avec l’association RESOLIS, la Fondation Daniel & Nina Carasso a diffusé un état des lieux des pratiques des collectivités locales en faveur d’une transition agricole et alimentaire, qui témoigne de la vitalité et de la diversité des actions entreprises localement et de la mobilisation forte qui émerge des territoires.

     

    Focus sur l’Espagne

    La Fondation Daniel et Nina Carasso est présente en Espagne depuis 2014 au travers de sa délégation madrilène. Elle a soutenu 36 projets dans le cadre de son axe Alimentation durable, qui appuient et renforcent les initiatives alimentaires locales. Malgré un contexte qui leur est contraires, ces initiatives se consolident et croissent sur tout le territoire espagnol. En 2016, la fondation a aussi lancé en Espagne un appel à projets spécifiquement dédié aux systèmes alimentaires territorialisés. Visant à sensibiliser et accompagner les élus locaux et les consortiums d’organisations locales dans leur approche territoriale de l’alimentation. Cet appel fait suite à la signature du Pacte de Milan par de nombreuses villes espagnoles parmi lesquelles Madrid, Barcelone, Saragosse, Valence, regroupées sous le terme de « mairies du changement », mais aussi Cordoue, Grenade, Bilbao, Pampelune et de nombreuses autres villes de tous bords qui se rallient au mouvement. Sur 33 propositions reçues de 45 municipalités espagnoles, de toutes tailles et zones géographiques, 9 projets seront financés et accompagnés durant l’année 2017, centrés essentiellement sur les diagnostics territoriaux et la mise en place de conseils alimentaires.  Outre le développement des projets eux-mêmes, ces 9 projets, situés sur Valence, Saragosse, Valladolid, Vitoria, Córdoba, Baena, l’île de Menorca et Sobrarbe (territoire rural avec 8 communes), bénéficieront de la mise en réseau avec des expériences similaires. Egalement intégrée dans l’appel à projet, la capitalisation et l’échange des savoirs, ainsi que leur diffusion au-delà des initiatives elles-mêmes, se feront grâce à l’organisation collaborative de trois séminaires qui aboutiront à la publication d’un rapport annuel des avancées.

    Retenue parmi plus de cent villes intégrées dans la plateforme du Pacte de Milan, c’est la ville de Valence qui est en 2017 la capitale mondiale de l’alimentation. Elle accueillera, à ce titre, les réunions du groupe de projets suivis par la fondation, dont l’objectif est d’avancer dans la définition de politiques publiques (et de leur application effective) pour une alimentation saine et accessible pour tous les habitants des villes signataires, ainsi que d’impulser une production alimentaire durable sur les territoires abordés. 

     

    Pour suivre l’actualité de la  Fondation Carasso  @sustain_food

     

    [1] http://transitionnetwork.org/

    [2]http://regions-france.org/wp-content/uploads/2016/10/de%CC%81claration-finale.pdf

    [3]http://www.milanurbanfoodpolicypact.org/

    [4]http://www.restauration-collective-responsable.org/

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