"Si les forêts françaises n'étaient plus gérées durablement, le pays émettrait 118 millions de tonnes de carbone, soit 38% de plus ", estime dans un rapport (1) , le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER). Aujourd'hui, les émissions de la France dans l'atmosphère s'élévent à 85 millions de tonnes de carbone.
Selon le document, la substitution et le stockage de carbone par la forêt et le bois représentent au total chaque année 33 millions de tonnes de carbone.
Un tampon vis à vis des pollutions aux nitrates
Autre service rendu par cet espace naturel d'après le rapport : la forêt limite l'érosion des sols, évite le ruissellement et joue un rôle tampon vis à vis des pollutions aux nitrates.
Ainsi une zone forestière de cinq mètres de large le long des rivières peut dépolluer 80 % des nitrates présents. Les villes de La Rochelle, Chenay ou encore Saint-Etienne ont ainsi choisi de préserver leur ressource en eau de cette manière. Cette dernière a d'ailleurs acquis mille hectares de forêts, que gère l'ONF. La région Poitou-Charentes mène également des expérimentations : sa mesure "boisement de terres agricoles", inscrite au Contrat de Projets Etat Région 2007-2013, permet aux collectivités, associations, propriétaires privés et établissements publics, de bénéficier de subventions.
"Si elle coûte donc plus cher au départ, la solution du boisement assure en fait et à court terme de substantielles économies, détaille le Centre régional de la propriété forestière (CRPF) de Poitou Charentes, l'eau ne nécessitant ensuite plus qu'un traitement très léger pour être consommable".
Selon ce dernier, pour une quantité d'eau récoltée de 1.000m3/ha/an, le surcoût engendré par une gestion forestière en périmètre de captage serait de 0,01 à 0,05 euros/m3. Un des obstacles de cette démarche est toutefois la possibilité de maîtrise foncière.
Si la forêt rend de nombreux services écologiques, sa valorisation et la filière bois doivent faire face à de nombreuses difficultés. Ainsi malgré un doublement de sa surface en 200 ans, pour arriver aujourd'hui à 16,4 millions d'hectares, elle est au cœur de conflits d'usage entre bois énergie, industrie et construction-rénovations 21029.
237 réseaux de chaleur au bois en 2012
Le secteur du bois énergie devrait prendre une place plus importante à l'avenir. Le gouvernement souhaite porter à 23% d'ici à 2020 la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique dont 11 Mtep issues de la biomasse.
Besançon, Saint-Denis, Colmar ou Nantes, depuis 1998, le nombre de réseaux de chaleur est en croissance. Même si la France reste en dessous de la moyenne européenne sur ce sujet. Fin 2012, elle comptait 237 réseaux de chaleur au bois dont les 2/3 situés en zone rurale (puissance individuelle inférieure à 1.500 kW et souvent à 500 kW), selon le rapport du CGAAER. Les secteurs collectifs, tertiaires et industriels disposent quant à eux de près de 5.000 installations de biomasse énergie (en fonctionnement ou en cours d'installation) pour une production annuelle de 1,6Mtep.
Ces installations ne font toutefois pas l'unanimité. Si de plus en plus de particuliers optent pour le chauffage au bois, celui-ci a été pointé du doigt pour sa contribution à la pollution atmosphérique.
"L'augmentation des rendements énergétiques de plus de 30% en moins de dix ans s'est accompagnée d'une réduction des émissions de polluants dans les fumées, souligne le CGAAER, les émissions de monoxyde de carbone qui étaient supérieures à 1% avant l'an 2000 se situent aujourd'hui à moins de 0,3 %. Les taux de particules ont aussi drastiquement diminué : 500 mg/Nm3 avant 2000, entre 60 et 90 mg/Nm3 selon l'appareil aujourd'hui". Selon le document, il serait toutefois souhaitable que le renouvellement des équipements de chauffage bois se fasse à un rythme plus rapide que le taux actuel de 4% par an. Parmi les installations les plus performantes selon le CGAAER, figurent les nouveaux poêles à granulés, les inserts modernes ou les poêles à bûches affichant le label Flamme verte.
"Dans le secteur industriel, agroalimentaire, papier-carton, industries du bois et matériaux de construction en particulier, 109 projets représentant 0,6 Mtep/an sont réalisés ou en voie de réalisations à la suite des appels à projet lancés par l'Ademe de 2009 à 2013", note le CGAAER. Selon ce dernier, les installations faisant appel à une ressource extérieure en biomasse utilisent ou utiliseront à 70% de la plaquette forestière.
Maison en bois : une croissance de 10% par an
Autre secteur en progression : celui de la construction. Depuis une quinzaine d'années, les maisons en bois se développent en France avec un taux de croissance annuel moyen de 10%, selon le CGAAER. En 2012, 12% des maisons individuelles en secteurs diffus et près de 20% des extensions étaient construites en bois.
"L'objectif de développer les constructions en bois accroît la demande de bois résineux, pointe le CGAAER. Il ne faudrait pas que le développement, souhaitable et déjà bien engagé, de cette forme écologique de construction conduise à augmenter les importations de bois étrangers".
La forêt française se compose à deux tiers de feuillus (2) et un tiers de résineux (3) . "Là où les conditions écologiques s'y prêtent, la plantation de résineux sera opportune, estime le CGAAER. Dans le même temps, il faut accroître la recherche pour utiliser plus et mieux les bois de feuillus dans la construction".
A ces contraintes s'ajoute la nécessaire prise en compte de l'adaptation au changement climatique et les risques que ce dernier comporte. La surface sensible aux feux de forêts pourrait atteindre ainsi 7 millions d'hectares à l'horizon 2040. " Mais, en même temps, le réchauffement climatique, sans en être la seule cause, contribue à l'accélération de la production biologique de la forêt", contre-balance le CGAAER.
Selon le document, le rôle de stockage du carbone atmosphérique par la forêt à travers le mécanisme de la photosynthèse serait renforcé. "Dès lors que [la forêt] est bien gérée, régulièrement renouvelée et exploitée, elle est une véritable pompe à carbone qui capte le carbone atmosphérique et le stocker", ajoute-il.