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Lettre des Aires Protégées d'Afrique - Juin 2018



  • La NAPA n°120 parle de l'application des lois pour la conservation des AP en Afrique. Elle rappelle nos formations en ligne sur la gestion des AP, le suivi écologique, l'application des lois et la conservation des espèces - inscriptions ouvertes sur papaco.org/fr/moocs.  

    Edito Geoffroy MAUVAIS Coordinateur du Papaco

    De la vraie nature de nos parcs...

    Les derniers mois ont été riches en accidents, souvent graves, dans certains parcs d’Afrique. Je ne parle pas des drames engendrés par la lutte anti braconnage qui sont, eux-aussi, de plus en plus fréquents et violents, mais bel et bien des accrocs entre faune sauvage et visiteurs.

    On pourrait dire qu’ils sont inhérents à la nature même de ces territoires et que le fait de se retrouver dans un milieu naturel nous expose au risque tout aussi naturel du prédateur ou de l’animal sauvage aux réactions incontrôlables. C’est exact et cela ne fera qu’augmenter, mécaniquement, au fur et à mesure que le nombre de visiteurs croît. Mais ce n’est pas tout. Une partie des accidents recensés est désormais liée à des comportements nouveaux, tant de la part des visiteurs que des gestionnaires de la faune. Et donc de celle-ci.

    Les touristes, enfin beaucoup d’entre eux, ne perçoivent plus les parcs africains comme des territoires hostiles dont ils sont les hôtes temporaires exposés aux risques de la nature. Ils entrent déjà saturés d’images et ne frémiront qu’à peine à la vue d’un éléphant, encore faut-il qu’il soit tout près et qu’il agite les oreilles. Armés de leur portable, ils voudront filmer ce qui peut être « mis en ligne » et il n’y a rien de plus désastreux pour cela qu’un lion plongé dans son activité préférée, la sieste. Il faudra s’approcher pour zoomer et sortir l’animal d’un pixel, et faire du bruit pour l’extraire de son sommeil. Il faudra s’approcher encore pour saisir une image hors du commun, quelque chose qui fera le buzz et les plus enhardis tenteront le selfie sur fond d’hippopotame ou de léopard.

    Quitte à sortir du véhicule pour que les copains puissent mieux cadrer et immortaliser l’instant éphémère où, justement, le touriste étourdi reprendra pleinement conscience de sa mortalité. Et l’hippo une bouchée. Un signe ne trompe pas : les visiteurs viennent désormais en safari sans jumelles pour observer et sans zoom pour photographier. Ils s’attendent à ce qu’on les approche des animaux jusqu’à les toucher ou presque. Mais les touristes inconscients ne sont pas seuls en cause.

    De plus en plus d’accidents se produisent parce que les animaux perdent conscience de la nature dangereuse de l’humain, qu’ils avaient pourtant apprise pendant des millénaires. Et cela se produit essentiellement parce qu’on les conditionne à cela. Une étude conduite sur dix années consécutives dans les années 90 recensait 7 accidents fatals dans les parcs d’Afrique du Sud dont trois étaient liés au lion et deux aux hippopotames. Depuis le début de cette seule année 2018, déjà deux décès sont à déplorer, l’un causé par un lion et l’autre par une girafe. Dans les deux cas, il s’agissait d’animaux « habitués » à l’homme au sein de réserves privées où l’on manipule aisément les animaux pour les rendre plus « approchables »...

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