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L’irresponsabilité paternelle et la violence économique inquiètent les organisations de femmes en Haïti



  • Posté le vendredi 25 novembre 2005
    par Ronald Colbert


    P-au-P, 25 nov. 05 [AlterPresse] --- Les organisations féministes en Haïti ont placé la célébration du 25 novembre 2005, Journée Internationale contre la violence faite aux femmes, sous le signe de la mobilisation pour dénoncer l’irresponsabilité paternelle et la violence économique, qu’endurent les femmes en divers points du territoire national, suivant les informations rassemblées par l’agence en ligne AlterPresse.

    Pour le respect des droits des femmes et des enfants de pères inconnus, les organisations de femmes pressent les autorités judiciaires d’arrêter des mesures en vue de contraindre les pères récalcitrants à prendre soin de leur progéniture et de réduire les coûts fixés pour la mise en œuvre des requêtes.

    De nombreuses femmes vivent, aujourd’hui en Haïti, avec des enfants abandonnés par leurs pères, sans aucune pension alimentaire. Plusieurs de ces enfants n’ont pas d’actes d’état civil.

    Les procédures pour l’obtention de pension alimentaire, par les femmes, demeurent longues, ennuyeuses et coûteuses, d’autant que les juges tendent à traîner en longueur lorsque les requêtes leur sont soumises.

    Il faut entre 1,500 et 7,500 gourdes (1 dollar américain = environ 45 gourdes, en novembre 2005) pour initier une requête judiciaire. Non seulement la majorité des femmes abandonnées ne dispose pas de ce montant, mais aussi cette somme ne suffit pas souvent, fustigent les militantes interrogées par AlterPresse.

    Depuis plusieurs mois, et également en prévision de la Journée Internationale contre la violence faite aux femmes, célébrée le 25 novembre, les organisations féministes entreprennent tout un train d’activités visant à sensibiliser les actrices et acteurs sur les problèmes rencontrés par les femmes d’Haïti. Sur tout le territoire national, des journées et rencontres de sensibilisation ont eu lieu.

    Ces activités ont culminé en un sit-in tenu, le 25 novembre 2005, devant le siège du Ministère de la Justice à Port-au-Prince, par la Coordination Nationale de Plaidoyer pour les Droits des Femmes (CONAP), qui regroupe diverses organisations nationales de femmes.

    A l’occasion de la manifestation du 25 novembre 2005, les femmes ont revendiqué contre l’irresponsabilité paternelle et en faveur de la délivrance gratuite, par tous les médecins assermentés, de certificats médicaux aux femmes victimes de violences, dont le viol.

    L’organisation Kay Fanm, qui a participé à la manifestation, compte offrir, à la fin de novembre 2005, une formation sur les consignes à observer en cas de viol et les traitements à suivre contre les maladies sexuellement transmissibles, dont le Syndrome Immuno-Déficitaire Acquis (SIDA).

    Dans la foulée, le Ministère à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes (MCFDF) a marqué cette journée par « une séance de sensibilisation sur la violence faite aux femmes » et la projection d’un documentaire intitulé « Sou Chimen Egalite pou yon Sosyete san Vyolans sou fanm » (Sur le chemin de l’égalité pour une société sans violence faite aux femmes).

    Les responsables du MCFDF avaient aussi projeté de distribuer des dépliants sur le certificat médical et le décret sur les agressions sexuelles aux participantes et participants à cette table ronde.

    Les organismes de défense et de promotion des droits des femmes entament régulièrement des démarches auprès des autorités étatiques allant dans le sens de leurs revendications.

    Le 21 novembre 2005, l’organisation Solidarité des Femmes Haïtiennes (SOFA) a exposé, au cours d’une rencontre avec le MCFDF, un ensemble de doléances en vue d’encourager, par des actions concrètes, une politique globale d’Etat pour combattre la violence sur les femmes, dont l’ampleur se révèle alarmante, au vu des cas enregistrés par les organisations féministes.

    Ces derniers mois, plus d’une centaine de cas de violences sexuelles (viols) et économiques sur les femmes ont été transmises à la SOFA, pour accompagnement, par le ministère à la condition féminine et aux droits des femmes.

    Contrairement aux souhaits des organisations de femmes, le Ministère haïtien de la Justice n’a pas encore publié de communiqué appelant les juges à ne pas refuser les certificats médicaux délivrés par des médecins assermentés, autres que ceux prêtant leurs services à l’Hôpital de l’Université d’Etat d’Haïti.

    Les responsables du MCFDF, qui se sont montrés très ouvertes aux desiderata, ont demandé à la SOFA de consigner, dans une lettre formelle, l’ensemble des propositions formulées, a indiqué Olga Benoît à AlterPresse.

    Le 23 novembre 2005, dans une réunion avec l’Inspection Générale de la Police Nationale d’Haïti (PNH), les responsables de la SOFA ont fait état de 13 cas de femmes de policiers, violentées (bastonnade, blessures, irresponsabilité paternelle) par leurs maris, enregistrés entre juin et octobre 2005 pour la plupart.

    La SOFA a aussi attiré l’attention de l’Inspection générale sur les cas de policiers qui prétextent de problèmes de carburant, pour ne pas intervenir lorsqu’ils sont sollicités, notamment sur les cas de violence faite aux femmes. Elle a sollicité des informations sur le suivi qui a été assuré par la PNH, en relation avec le cas d’une jeune fille violée par 7 hommes à Pétion-Ville.

    Tout en ayant pris l’engagement de convoquer immédiatement les policiers en question, l’Inspectrice générale en chef de la PNH, Gessie Cameau Coicou, a souhaité que ces femmes de policiers portent plainte directement auprès de l’Inspection générale de l’institution policière. Plusieurs d’entre elles ont déjà déposé des dossiers de plainte auprès de la justice civile, a rapporté Olga Benoît à AlterPresse.

    Le 23 novembre 2005, au cours d’un rassemblement dans la capitale haïtienne, la Coordonnatrice généralede la SOFA, Évelyne Larrieux, avait évoqué deux cas de violence conjugale enregistrés ces derniers jours dans le pays.

    « A Abricot (GrandeAnse, sud-ouest d’Haïti), une femme a été attachée aux cornes d’un bœuf qui l’a traînée à travers les rues de la ville. Cet acte a été posé par son mari à la suite d’un malentendu ».

    A Jacmel (Sud-Est d’Haïti), une autre femme s’est retrouvée avec son utérus endommagé, des suites de violences physiques exercées sur elle par son mari, ce qui enlève à cette femme toute chance d’enfanter dans le futur.

    Selon Évelyne Larrieux, ces actes ne doivent pas rester impunis. [rc do apr 25/11/05 17 : 30]
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