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Dossier COP8 : Le Sahel, une zone vulnérable



  • Le mot ''Sahel'' est d'origine arabe. Il signifie ''rivage''. Un rivage où l'écologie et le climat rendent à nouveau la vie possible après le franchissement des milliers de kilomètres de désert saharien s'étendant au sud des pays du Maghreb. La sous-région sahélienne correspond à une bande de terre qui borde l'extrême frange du Sahara. C'est un espace allant du Tchad au Cap-Vert et couvrant une superficie de 5,4 millions de Km2 pour une population supérieure à 50.000.000 d'habitants.

    Le Sahel est une zone de transition entre le Nord aride et la forêt tropicale verdoyante qui longe la côte maritime. Le couvert végétal du Sahel est composé de buissons, d'herbes et d'arbres rabougris qui deviennent de plus en plus denses au fur et à mesure qu'on descend vers le Sud.
    Les récoltes sont aléatoires. Les seules plantes viables sont celles qui résistent à la sécheresse. Toutefois, les Fleuves Niger et Sénégal qui traversent la zone permettent quelques cultures d'irrigation. L'Élevage est une activité importante, mais la saison sèche trop longue oblige les pasteurs à diriger leurs troupeaux vers le Sud. Aujourd'hui, le terme ''Sahel'' s'applique autant à une zone agro-climatique qu'à une entité "géopolitique". Car la zone traverse un certain nombre d'États couramment appelés ''sahéliens'', regroupés au sein d'une organisation commune : le CILSS (Comité Inter-États de Lutte contre la Sécheresse au Sahel).


    Caractéristiques du Sahel :

    . Fortes variations climatiques allant de 200 mm à 2500 mm et une irrégularité pluviométrique.
    . Prédominance de l'agriculture et de l'élevage : plus de la moitié de la population active est
    employée dans ces sous-secteurs qui contribuent pour près de 40% au PIB.
    . Forte croissance démographique (environ 3,1 %) et une urbanisation très rapide dont le taux d'accroissement est estimé à 7%.

    L'urbanisation et la croissance démographique constituent les principales mutations qui touchent le Sahel et vont affecter durablement les conditions de la sécurité alimentaire des ménages et de la région dans son ensemble. Déjà plusieurs pays de la région comptent de l'ordre de 50% d'urbains, pour une moyenne régionale située aux alentours de 30%. Le Sahel devrait doubler sa population d'ici 25 ans, et comptera vraisemblablement plus de 100 millions d'habitants en 2020. La moitié de cette population vivra en ville et s'approvisionnera essentiellement au travers du marché.
    Au plan économique, la plupart des pays sahéliens ont retrouvé des taux honorables de croissance économique au cours de la dernière période. Mais cette croissance reste insuffisante au regard de la dynamique démographique pour parvenir à faire reculer sensiblement la pauvreté. D'autant plus, que les Etats peinent à définir des politiques efficaces de réduction des inégalités sociales.

    L'espace sahélien s'intègre de manière croissante dans les espaces régionaux d'intégration économique. La libéralisation des échanges au sein de l'UEMOA et de la CEDEAO a contribué à une structuration accrue des opérateurs économiques et commerciaux au sein de l'Afrique de l'Ouest. Cependant, l'existence de plusieurs zones d'intégration monétaire, économique et commerciale a conduit à des disparités préjudiciables à l'émergence d'un véritable marché unique doté d'institutions fonctionnant sur la base de règles communes, prévisibles et fondées sur le droit. L'existence également de multiples politiques tarifaires aux frontières avec les marchés internationaux induit encore des flux de réexportation fondés sur des disparités fiscales. Lorsque ces disparités de taxation s'appliquent à des produits importés provenant de pays octroyant des subventions importantes aux exportations, elles privent les pays sahéliens de la capacité de protéger efficacement leurs propres filières de production.

    Au plan agricole, les systèmes de production connaissent des évolutions fortement différenciées. Dans les zones sahélo-soudaniennes, les systèmes de production, fondés sur une exploitation minière des ressources naturelles, reposent sur les céréales sèches et la jachère longue. La productivité y reste très faible et l'accroissement des besoins des ménages ruraux se traduit par une pression foncière accrue qui remet en cause les modes traditionnels relativement efficaces de gestion de la fertilité des sols. L'augmentation des productions est intégralement imputable à l'augmentation des surfaces mises en valeur. Dans les zones plus arrosées ou bénéficiant de la maîtrise de l'eau, correctement connectées sur les marchés nationaux, régionaux ou internationaux, on assiste à une mutation importante des systèmes d'exploitation. L'accès au crédit et aux intrants permet une réelle intensification et une diversification des productions, au profit du riz et du maïs, ainsi que des cultures maraîchères.

    Au niveau écologique, le contexte sahélien se manifeste par la dégradation des écosystèmes qui se traduit par une dégradation importante des terres et plus généralement des ressources naturelles mises en valeur par les populations (cueillette, bois/énergie, etc.). Les réserves foncières en général et forestières en particulier, encore importantes jusqu'ici, sont l'objet de nombreuses convoitises tant à des fins de production agricole, qu'à des fins de prélèvement de bois/énergie. Ces évolutions font naître de sérieuses inquiétudes sur la gestion de la fertilité des sols, dans la mesure où le système de jachère rentre là aussi en crise, sans que le rapport bétail/cultures soit déjà en mesure de représenter une alternative.

    Au plan politique, les pays sahéliens s'inscrivent aussi dans le mouvement général d'intégration politique, au sein de l'espace CEDEAO (hormis pour le Tchad et la Mauritanie, respectivement insérés dans l'espace CEMAC et UMA). Le Sahel se trouve ainsi confronté à une double rupture caractérisée d'une part par les déséquilibres économiques et l'insécurité alimentaire dont sont victimes les couches sociales les plus défavorisées, et d'autre part par les déséquilibres du milieu biophysique résultant des effets climatiques et de l'action de l'homme. L'insécurité alimentaire et la pauvreté constituent les deux faces du même problème et se nourrissent mutuellement. Quelques chiffres clés permettent de situer dans le Sahel l'ampleur des phénomènes de paupérisation et d'insécurité alimentaire : environ 30% des sahéliens soit 17 millions de personnes connaissent encore les affres de la faim. Près de la moitié de la population vivrait en dessous du seuil de pauvreté ; 58% des sahéliens n'ont pas accès aux services de santé, 39% n'ont pas accès aux médicaments et aux vaccins essentiels et 39% n'ont pas accès à l'eau potable.

    Combinant des interventions relevant de la prévention et de la gestion des crises conjoncturelles d'une part, et des interventions s'inscrivant dans le long terme d'autre part, les acteurs et les décideurs sahéliens ont demandé au CILSS d'élaborer et/ou de suivre la mise en ouvre d'un certain nombre de programmes régionaux dont (i) le cadre stratégique de sécurité alimentaire durable (CSSA) conçu dans une perspective de lutte contre la pauvreté, (ii) Le Programme d'Action Sous-Régional de Lutte contre la désertification en Afrique de l'Ouest et au Tchad (PASR-AO) et (iii) le programme d'action de Ouagadougou (PAO) sur la population et le développement durable.
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