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Le logement de demain, pour une meilleure qualité de vie



  • Facteur clé de l’intégration sociale avec l’emploi, le logement n’est pas seulement le lieu où les ménages passent le plus de temps et pour lequel ils consentent leurs plus fortes dépenses. Il est aussi un marqueur social et, à ce titre, contribue à la construction de l’image, du statut et de l’identification sociale de ses occupants.
    L’attachement au logement, perçu comme lieu positif et rassurant en contrepoint d’un monde en pleine mutation va de pair avec l’augmentation de la précarité familiale et professionnelle.
    Aujourd’hui, les problèmes liés au logement concernent non seulement les plus démunis mais également toutes les catégories de population : classes moyennes, personnes âgées, handicapées, familles nombreuses, jeunes ménages, étudiants…
    Malgré des réalisations et des prestations de qualité, le logement actuel, à de notables exceptions près, reproduit des plans standards, dépourvus d’imagination, réduisant au minimum la vraie innovation et ignorant l’impérieuse nécessité de prendre en compte la crise énergétique et le développement des énergies renouvelables.
    Parce que construire aujourd’hui engage l’avenir sur plus d’un siècle, les propositions du Conseil économique et social visent à inciter tous les acteurs du logement et principalement les élus et les pouvoirs publics à adopter une approche globale et qualitative, essentielle pour répondre aux attentes des Français et de la société.
    Ces propositions sont guidées par la recherche de la combinaison des trois facteurs du développement durable : l’efficacité économique (coût accessible au plus grand nombre) l’exigence sociale (la mixité) et la prise en compte des critères environnementaux.
    Les efforts financiers à consentir seront largement compensés par la diminution des coûts d’entretien, la baisse des charges, sans oublier le coût difficilement chiffrable du mal vivre. Par le sentiment de valorisation et de dignité que ces logements apporteront ainsi aux populations concernées, les surcoûts initiaux seront vite amortis.
    Il n’est plus temps de se demander si c’est possible ou si c’est coûteux, de se freiner en se disant que ce sera difficile et compliqué. Il s’agit de savoir quand on commence, en se dotant des moyens normatifs, techniques et financiers pour y parvenir.

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    I - LE CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL CONSTATE

    Depuis le début des années cinquante, le parc de logements a été considérablement modernisé. La période de la Reconstruction puis celle des Trente glorieuses ont permis de remplacer et construire un habitat plus hygiénique (les trois éléments de confort : WC intérieurs, salle d’eau, chauffage central sont présents dans 91 % des logements) et plus spacieux. Il subsiste néanmoins environ 10 % de logements présentant des critères d’insalubrité et de surpeuplement notamment dans le parc ancien des centres-villes. Si l’effort sur cette partie du parc est primordial, il doit aussi se porter sur son ensemble s’agissant de sa qualité environnementale.

    Une profonde évolution des modes de vie…

    L’évolution démographique est marquée par le vieillissement important de la population (en 2004 les plus de 75 ans représentaient 8,7 % de la population, en 2050 ils constitueront le quart). Les effets conjugués de la décohabitation plus tardive des enfants en raison de l’allongement des études et des difficultés d’emplois et d’une forte instabilité familiale conduisent à une augmentation significative du nombre des ménages et donc des besoins de logements. Divorces, séparations,

    formation de nouveaux couples mais aussi vieillissement et handicap expliquent la pénurie de logement et influent sur la nature de la demande (taille des logements, configuration de l’espace).

    et une transformation des modes d’habiter…

    Les rythmes de vie de chacun des membres de la famille s’autonomisent et transforment les modes d’habiter. Avec la mise en place des 35 heures, le développement du télétravail, la décohabitation tardive des enfants, l’habitat est devenu multifonctionnel. L’utilisation des espaces a évolué. La cuisine se transforme en lieu de convivialité et les chambres deviennent trop exiguës pour y travailler, se reposer, recevoir ses amis (surtout les enfants), se divertir et contenir bureau, bibliothèque, chaîne Hi-Fi, ordinateur, téléviseur… Enfin, le manque d’espace (bureau, chambre d’amis…), de rangements et… d’ouverture sur la nature sont le plus souvent dénoncés.

    … qui orientent les attentes des ménages…

    Elles se portent majoritairement sur l’accession à la maison individuelle (80 % des propriétaires de leur logement). Ce rêve les conduit le plus souvent à s’éloigner des centres villes devenus inaccessibles en raison du prix du foncier qui représente entre 30 et 50 % du coût total de l’habitation.
    Les Français souhaitent aussi des logements plus spacieux, moins bruyants et plus sains.

    … alors que les innovations technologiques qui existent, peinent à s’imposer

    Les taux d’endettement des ménages, parfois excessifs en raison des prix élevés des logements, les conduisent encore trop souvent à considérer l’innovation comme un surcoût. De leur côté, promoteurs et bailleurs hésitent à introduire une innovation, pas toujours bien acceptée par une clientèle peu encline à privilégier dans ses choix des matériaux ou des techniques nouvelles qu’ils jugent insuffisamment éprouvés dans le temps. Cette même réserve se vérifie auprès des constructeurs et des entreprises.
    Afin de respecter les engagements gouvernementaux souscrits à Kyoto, d’offrir à chacun un logement de qualité, le Conseil économique et social formule des propositions susceptibles d’améliorer la qualité de vie des français. S’inscrivant dans une politique de développement durable, elles devraient répondre à leurs attentes et mobiliser l’ensemble des acteurs du secteur dans cet objectif.


    II - INSCRIRE LE LOGEMENT DANS UNE POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

    Cet engagement suppose une profonde modification des pratiques de l’ensemble des acteurs du secteur de la construction. Economiser l’énergie, les espaces et les paysages, favoriser le lien social doivent désormais présider à leurs préoccupations.

    A. Organiser une synergie en faveur de la qualité entre maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre qui ne parlent pas le même langage et dont la coopération est essentielle pour la réussite du projet. Ceci suppose :
    1. D’assister la maîtrise d’ouvrage dans son rôle de programmation :
    - en organisant une concertation, la plus en amont possible du projet avec les différents partenaires concernés et en s’entourant des compétences nécessaires ;
    - en s’appuyant sur un service d’instruction du permis de construire compétent, respectueux des délais requis ;
    - en sanctionnant des recours abusifs ;
    - en proposant une formation adaptée.

    2. De renforcer le rôle de l’architecte
    - asseoir le rôle de cette profession afin de mieux coordonner l’intervention des différents corps de métiers que constitue la maîtrise d’œuvre, garantir la bonne exécution du parti architectural du projet tel que défini dans les plans ;
    - améliorer la formation initiale et continue.

    3. De généraliser la démarche Haute qualité environnementale (HQE)
    - mieux diffuser cette démarche qui vise à maîtriser les impacts des bâtiments sur leur environnement en créant des intérieurs sains et confortables. Elle concerne toutes les étapes de l’élaboration et de la vie d’un bâtiment (depuis sa conception jusqu’à sa démolition). Elle peut s’appliquer aussi bien aux constructions neuves qu’à la réhabilitation ;
    - prévoir son application aux programmes prévus par la loi de solidarité et de renouvellement urbains avant de procéder à sa généralisation.

    B. Mieux utiliser les procédures
    1. Maîtriser et accroître l’offre foncière
    - par une accélération de l’adoption des PLU, le développement d’établissements publics fonciers ;
    - rééquilibrer la fiscalité en pénalisant la rétention de terrains classés constructibles mais non bâtis.

    2. Favoriser un urbanisme plus cohérent
    - par une simplification et une stabilité des textes et règlements existants et un ciblage des aides (PTZ…) sur les opérations évitant l’étalement urbain.

    3. Soutenir la rénovation
    - en augmentant sensiblement les moyens de l’ANAH qui intervient sur le stock de logements (environ 99 % du parc), et en aidant les propriétaires occupants ou bailleurs impécunieux à engager des travaux visant à économiser l’énergie ou utiliser les énergies renouvelables.

    C. Favoriser l’utilisation des matériaux, des techniques et équipements à haute performance environnementale
    1. Recourir aux matériaux naturels renouvelables (bois, pierre, terre, paille, chaume) dont les qualités techniques, plastiques et esthétiques sont sous employées notamment dans l’habitat individuel ;
    2. Renforcer l’isolation (notamment par l’extérieur) pour améliorer la performance thermique et soigner la ventilation qui permet d’assainir l’air ambiant des logements
    3. Améliorer les qualités phoniques, le bruit étant la première nuisance dénoncée par les Français
    4. Introduire les énergies renouvelables
    La combinaison de ces énergies, solaire (thermique et photovoltaïque), géothermie, éolien et biocarburants doit aider à couvrir tout ou partie les besoins énergétiques d’un logement. Mal connues, elles sont peu utilisées. Les moyens de l’ADEME, chargée de leur diffusion doivent être consolidés après évaluation régulière de l’efficacité de son action.

    D. Promouvoir la pratique du « coût global »
    En intégrant dans le prix d’un logement dès sa conception le coût des charges d’usage au coût d’investissement initial, les avantages attendus de l’introduction de certains équipements économisant l’énergie ou utilisant des matériaux énergétiquement intéressants, seront mieux perçus et appréciés.


    III – RÉPONDRE AUX ATTENTES DES FRANÇAIS ET AUX ÉVOLUTIONS DE LEURS MODES DE VIE

    A. Construire des logements plus spacieux et plus flexibles pour s’adapter à la configuration des ménages, au vieillissement de la population et aux situations de handicap
    B. Offrir un environnement de qualité et sécurisé en appliquant le concept de prévention situationnelle et un urbanisme (commerces, services, transports) adapté
    C. Faciliter l’accession au logement en allégeant la charge initiale d’accession en séparant le foncier du bâti, et en recourant plus fréquemment à des baux emphytéotiques dont les modalités seraient à revoir
    D. Engager une réflexion visant à réformer le régime de l’hypothèque et à en diminuer le coût

    IV - MOBILISER LA FILIÈRE DE LA CONSTRUCTION POUR RÉPONDRE AUX ENJEUX

    A. Soutenir la recherche notamment dans les techniques et les équipements économisant l’énergie ou favorisant les énergies renouvelables, au niveau national et européen
    B. Accentuer l’effort d’industrialisation par la mise en place de filières intégrées suffisamment réactives pour pouvoir répondre à l’importance des besoins actuels et privilégier la filière sèche plus respectueuse de l’environnement
    C. Favoriser la création de pôles de compétitivité structurés et homogènes par filières et encourager par une meilleure concertation entre les différents partenaires et la diffusion de l’innovation
    D. Accentuer l’effort de formation et développer l’emploi afin de répondre aux besoins
    1. Informer et sensibiliser les jeunes sur les métiers du bâtiment et leur évolution ;
    2. Engager rapidement une réflexion entre l’Etat, les régions et le secteur du bâtiment sur les moyens financiers à mettre en œuvre ;
    3. Accroître l’effort de formation des salariés qui doivent être de plus en plus qualifiés ;
    4. Soutenir les actions visant à anticiper le vieillissement des effectifs salariés et confrontés à la transmission des chefs d’entreprise.
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