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Nouveau livre : " 30 idées reçues sur le développement durable "



  • Entrevue avec ses auteurs principaux, Sofiane Baba (Professeur, École de gestion de l'Université de Sherbrooke) et Chantal Line Carpentier (chef du bureau de la Conférence des Nations unies sur le Commerce et le Développement - CNUCED), réalisée par Nicolas T. Parent, journaliste au quotidien La Voix de l’Est

    Le développement durable est omniprésent dans nos sociétés et les multiples défis environnementaux, sociaux et environnementaux auxquels l’Humanité est confrontée ne font que renforcer son importance. Le développement durable est défini par les Nations Unies comme un développement « qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. » Derrière cette définition à priori consensuelle réside en réalité un certain nombre de débats. Adopté et promu par les institutions internationales et les gouvernements, largement débattu dans la sphère universitaire, dénigré par d’autres, le concept de développement durable attise également une grande confusion. Cet ouvrage se veut justement didactique en se fixant pour objectif de rendre accessibles les grands débats et discussions qui façonnent le développement durable, tout en décortiquant les idées reçues les plus répandues. Le livre est structuré en 30 chapitres écrits par des experts et personnalités publiques incontournables en matière de développement durable.

    Le livre est disponible en version papier et numérique auprès de l’éditeur, JFD Éditions ou encore sur Amazon.

    « 30 idées reçues sur le développement durable » (2021) JFD Éditions (200 pages, 24,95$CAN)

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    Quelles sont les origines de ce projet de livre ? Comment le tout a démarré ? Quelle est la mission du livre ?  [Sofiane Baba]

    La mission de ce livre grand public sur le développement durable est double. D’une part, sensibiliser nos concitoyennes et concitoyens à l’importance des problématiques relatives à notre modèle de développement et à notre style de vie. D’autre part, vulgariser et rendre accessible au plus grand nombre les principaux sujets de discussion autour d’un enjeu de société civilisationnel, à savoir celui des équilibres fragiles entre besoins environnementaux, sociaux et économiques. Cette double mission est ainsi incarnée dans trente idées reçues, ou stéréotypes, qui sont déconstruits dans le livre de façon didactique.

    Le projet a démarré il y a bien longtemps, alors que j’enseignais la gestion du développement durable à HEC Montréal à de brillants étudiants pendant mon doctorat. Une de ces étudiantes m’a fait découvrir un livre passionnant du politologue Pascal Boniface intitulé « 50 idées reçues sur l’état du monde ». À travers quelques discussions, j’avais été aisément convaincu qu’un tel livre « de poche » serait utile pour démystifier le développement durable. Après quelques tentatives, et bien d’autres projets académiques en parallèle, le projet est mort-né. C’est finalement cinq ans plus tard, en 2020, que j’ai repris ce projet, convaincu qu’il fallait contribuer à la sensibilisation de nos concitoyennes et concitoyens.

    Que ce soit dans mon entourage ou avec mes étudiants, j’ai souvent été stupéfié de voir à quel point le développement durable, et plus largement les enjeux de société de fond qu’il symbolise, sont méconnus. Je pense que cela est dommage pour le débat de société qui doit avoir lieu sur notre modèle de société. J’ai l’intime conviction qu’une compréhension de ces enjeux est primordiale au 21e siècle pour quiconque souhaite cultiver sa conscience citoyenne faire des choix (démocratiques, de consommation, de carrière, etc.) éclairés et responsables vis-à-vis les futures générations.

    Quelles sont les thématiques abordées dans ce livre ? Pouvez-vous me faire un résumé du livre, dans vos mots, afin que j’ajoute une ou deux citations dans mon article. [Sofiane Baba]

    Le livre propose un survol des multiples facettes du développement durable à travers la déconstruction de trente idées reçues. Plusieurs thématiques sont abordées en filigrane : les définitions et l’historique du développement durable, son utilité et ses apports, les grands débats et critiques entourant le concept, et finalement son potentiel de mise en œuvre à grande échelle. Ce livre s’est voulu inclusif et ouvert sur la pluralité de perspectives qui animent les discussions autour du développement durable. Nous y retrouvons donc aussi bien des voix favorables au développement durable que des voix plus critiques, qui appellent par exemple à emprunter la voie de la décroissance comme alternative plus réaliste.

    Je suis d’avis que le sujet du livre est crucial pour la société et notre avenir collectif. Le sujet ne devrait pas être seulement l’affaire de quelques experts, universitaires et politiciens. La société civile dans l’ensemble doit aussi se l’approprier. Le chemin reste long, de mon point de vue, mais tout à fait réalisable.

    Pouvez-vous me parler des experts qui ont participé au projet ? J’imagine qu’ils ont des expertises et des connaissances variées. [Sofiane Baba]

    Le livre a impliqué 35 collaborateurs de qualité, notamment des universitaires, chercheurs, praticiens et experts. Ces collaborateurs ont des expertises et profils à la fois variés et complémentaires. Ils partagent en commun une fine compréhension des enjeux de société au cœur du développement durable. Citons par exemple Ahmed Djoghlaf (ancien secrétaire exécutif de la Convention sur la diversité biologique et Co-président du comité de négociation de l’historique COP 21 à Paris), Alain Webster (président du Comité consultatif sur les changements climatiques et professeur en économie de l'environnement à l'Université de Sherbrooke), Chantal Line Carpentier (haut fonctionnaire à l’Organisation des Nations Unies), Jean Cadieux (professeur à l’Université de Sherbrooke et principal artisan de la norme québécoise en développement durable, BNQ 21000), ou encore Thomas Mulcair (professeur invité à l’Université de Montréal, principal artisan de la Loi québécoise sur le développement durable et à la tête de plusieurs ministères).

    Je suis particulièrement heureux que l’Honorable Elizabeth Dowdeswell, 29e lieutenant-gouverneur de l'Ontario, ait préfacé le livre. Madame Dowdeswell a été la troisième directrice exécutive du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE, 1992-1998) et la première dame à occuper cet illustre poste. Sa compréhension de ces enjeux remonte donc à bien loin et lui permet de poser un regard lucide sur nos réalisations et la suite des actions à entreprendre pour un avenir meilleur.

    Les ODD, c’est quoi exactement ? [Chantal Line Carpentier]

    Les ODD réfèrent à 17 objectifs de DD et 169 cibles négociés et adoptés par tous les pays dans le cadre d’un processus inclusif, participatif et collaboratif sans précédent sur une période de deux ans. Ils offrent donc pour la première fois de l’histoire de l’Humanité un ensemble universel et ambitieux d’objectifs et de cibles auxquels. Les ODD ont suscité une adhésion sans précédent grâce au processus de consultation inclusif, ouvert et transparent. De mon point de vue, le processus participatif et la gouvernance ayant conduit aux ODD sont exemplaires. Au total, ce sont 193 pays et des milliers d’acteurs de la société civile, des affaires, groupes de jeunes, femmes, etc. qui ont négocié ces objectifs.

    Ils couvrent ainsi toutes sphères de la société, et sont regroupés en 5P : planète, population, prospérité, partenariats, et paix. Bien qu’uto­piques en apparence, ils sont tout à fait atteignables pour peu que l’on soit sérieux dans les efforts de mise en œuvre. D’un point de vue pragmatique, il est vrai qu’il nous reste une courte fenêtre d’oppor­tunité pour les atteindre d’ici 2030, surtout après le recul découlant de la COVID-19. Néanmoins, les ODD sont encore plus importants maintenant qu’il nous faut collectivement rebâtir l’économie, et la rebâtir mieux. Comme un GPS, les ODD nous fournissent la feuille de route pour la mise en place de politiques à tous les niveaux de gouvernement, pour la gestion des entreprises, de l’innovation et de la technologie, et pour nos gestes de tous les jours afin de parvenir à un avenir meilleur pour tous et toutes.

    Pouvez-vous me résumer les chapitres auxquels vous avez contribué ? [Chantal Line Carpentier]

    J’ai contribué à plusieurs chapitres dans le livre du professeur Sofiane Baba. De manière générale, j’argue dans ces textes que les ODD sont une véritable chance pour l’Humanité, car c’est la première fois qu’autant d’acteurs politiques, civils et économiques ont pu uniformiser et s’entendre sur un langage commun visant à identifier les urgences pour un monde meilleur. J’argumente aussi dans ces chapitres que les ODD ne peuvent pas, et ne doivent pas, se limiter aux institutions internationales et aux experts. Il faut qu’ils soient vécus par tout un chacun. Les citoyens doivent ainsi se les approprier, car le changement peut certes provenir du haut, mais il est aussi impulsé par le bas. Finalement, je réitère dans ces chapitres que les ODD sont sans précédent. Ils offrent un guide pour atteindre un monde durable, inclusif, résilient et égalitaire, ce qui est nécessaire pour éviter les conflits et guerres, et donc pour maintenir la paix, qui est d’autant plus important considérant l’augmentation des inégalités engendrée par la pandémie. Nous savons comment les atteindre – en alignant les marchés financiers avec les ODD et en accélérant le virement vers l’économie verte, orange, bleue, juste et circulaire.

    Pouvez-vous me parler de votre rôle et de vos responsabilités professionnelles ? L'UNCTAD, c'est quoi ? [Chantal Line Carpentier]

    J’étais la coordinatrice de tous les acteurs non étatiques pour la tenue de Rio 20 (qui a donné lieu au mandat de négocier les ODD. Selon mon estimé, 30% des cibles et objectifs sont le résultat de pressions et de contributions des groupes de jeunes, femmes, secteur privé, les villes, etc. Tout de suite après la conclusion des négociations en juillet 2014, j’ai joint la CNUCED (conférence des Nations Unies sur le commerce et développement).  Je dois souligner que la CNUCED n’a jamais cru aux objectifs du millénaire (l’ancêtre des ODD, en quelque sorte). Ceux-ci s’adressaient aux effets et non aux causes de la pauvreté et des inégalités. Par exemple, les défis systémiques au cœur du système commercial, financier et fiscal qui défavorisent les pays moins nantis étaient relativement ignorés par les objectifs du millénaire. Avec l’avènement des ODD, la CNUCED a changé d’approche puisqu’elle les a aisément soutenus en raison de leur capacité à questionner fondamentalement les causes des enjeux de société du 21e siècle. C’est ainsi que j’ai joint la CNUCED qui a pour mandat d’appuyer les pays en développement à rattraper les autres à travers des moyens de mise en œuvre tels le commerce, le financement, les technologies, la coopération, les investissements, etc.  Certaines des cibles sont des moyens de mise en œuvre (dénotées avec des lettres).

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