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Une agriculture familiale plus résiliente face aux effets du changement climatique



  • En Guinée, le Gret et ses partenaires appuient depuis 1995 la structuration des filières agricoles familiales et contribuent à améliorer les conditions de vie des producteurs et entrepreneurs ruraux. Les projets mis en œuvre au cours des années ont permis d’amorcer une transition agroécologique, mais aussi d’assurer une meilleure distribution de produits locaux de qualité, dans les campagnes comme dans les villes.

    L’agriculture familiale et paysanne représente 65 % de l’activité dans les zones rurales en Guinée. Elle occupe une place centrale dans les questions démographiques, économiques, sociales et nutritionnelles, et joue un rôle important dans la préservation des écosystèmes et des ressources naturelles. Son renforcement constitue un enjeu majeur pour le développement et l’équilibre de la société guinéenne, dans un contexte de croissance démographique, d’exode rural, de migration, d’implantation progressive des entreprises agro-industrielles, d’augmentation des besoins et de changement des habitudes alimentaires.

    L’épidémie de maladie à virus Ebola a accentué ces difficultés en empêchant les exportations des produits locaux dans la sous-région, et en réduisant la capacité des acteurs agricoles à produire, transformer et commercialiser leurs produits sur le marché intérieur de 2015 à 2016. Les changements climatiques viennent eux aussi aggraver ces facteurs de vulnérabilité. En Guinée, l’évolution de la température de surface est estimée de 4°C à 5°C selon les régions d’ici à 2100, tandis que l’élévation du niveau de la mer concerne les 300 kilomètres de côte. Ces modifications risquent d’entraîner en Guinée une submersion des plaines agricoles au Sud, tandis que la multiplication des sécheresses aiguës et des inondations au Nord du pays perturberont le calendrier agricole et affecteront la sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations.

    Le choix de l’agroécologie

    Le projet Sécurité alimentaire, résilience et agroécologie en Guinée (Sara), mené de 2016 à 2019 par le Gret et ses partenaires – la Maison guinéenne de l’entrepreneur (MGE), la Fédération des paysans du Fouta Djallon (FPFD), le CCFD-Terre Solidaire – est ainsi intervenu en réponse à l’épidémie de maladie à virus Ebola et aux effets des changements climatiques. Ses actions ont soutenu le développement de plusieurs filières vivrières et maraîchères (riz, huile de palme, oignon, maïs, pomme de terre) cruciales pour l’alimentation des familles et la sécurité alimentaire, et s’est distingué par sa démarche agroécologique mise en œuvre en Guinée forestière et en Moyenne Guinée. Ces actions ont été complétées par un renforcement des activités économiques de transformation et de commercialisation permettant aux acteurs de vendre des produits diversifiés et de qualité et de promouvoir les produits locaux en quantité suffisante dans les marchés urbains et ruraux.

    Le projet Sara a permis d’identifier et de mieux comprendre les contraintes auxquelles les exploitations familiales font face à travers des diagnostics agroécologiques et agraires, des études menées dans les différentes régions naturelles, ainsi que par plusieurs ateliers nationaux de réflexion participative autour de ces problématiques. Les familles paysannes ont pu prendre conscience de leurs impacts positifs et négatifs sur leur environnement naturel direct, notamment par la répétition de certaines pratiques agricoles néfastes, mais aussi l’utilisation excessive d’herbicides, d’engrais chimiques et de produits phytosanitaires, entraînant une diminution de la biodiversité du sol, pourtant essentielle au maintien de sa fertilité.

    Face à ce constat, les partenaires du projet ont étudié plusieurs pistes permettant aux exploitations familiales de continuer à cultiver plusieurs années sur un même sol tout en préservant sa fertilité et sa capacité de rétention en eau. La mise en place de pratiques agroécologiques s’est ainsi imposée.

    Ainsi, le Gret et ses partenaires, ainsi que l’Institut de recherche agronomique de Guinée (IRAG), le Centre régional de recherche agronomique de Guinée forestière et l’Institut de recherche pour le développement (IRD), ont mené plusieurs actions de concertations locales sur les ressources en eau, de recensement des difficultés auxquelles font face les exploitations familiales et paysannes, ainsi qu’une identification de plusieurs pratiques agroécologiques et innovantes permettant l’amélioration de la résilience de l’agriculture familiale face aux effets du changement climatique.

    Une amélioration de la qualité sanitaire et nutritionnelle des produits

    La situation de malnutrition chronique et l’insécurité alimentaire relativement élevée au début des interventions dans les différentes zones du projet, notamment en zone rurale, apparaît comme un paradoxe. En effet, le niveau de vie des acteurs agricoles étant relativement bas, les partenaires du projet ont cherché des moyens de leur permettre de tirer de meilleurs revenus de leurs activités tout en améliorant et diversifiant leur alimentation à base de produits locaux de qualité, notamment auprès des enfants et des femmes enceintes et allaitantes.

    Les actions du projet ont permis une création de valeur ajoutée liée à l’amélioration de la qualité des produits et à une meilleure organisation de la commercialisation. Le travail sur l’étuvage et le décorticage amélioré du riz permet par exemple de produire du riz plus nutritif mais également de baisser le taux de brisures ce qui donne une valeur plus élevée au produit final, et dans le même temps, en utilisant des foyers adaptés, de réduire l’impact sur la consommation de bois.

    Avec la mise en place du Réseau Böra Maalé Fanyi en Basse Guinée, le projet a permis de poursuivre la création de valeur ajoutée des produits de la filière riz à tous les maillons de la chaîne. Une négociation inter filière a ainsi permis de répartir la valeur ajoutée créée entre les acteurs de manière consensuelle, avec des discussions régulières sur le prix afin de correspondre aux coûts réels de production et à la demande du marché.

    En Guinée Forestière, au niveau des filières riz et huile de palme, c’est encore l’amélioration de la qualité des produits, à travers l’élaboration et la diffusion de guides de bonnes pratiques, au moins autant que l’organisation de la commercialisation, qui permet de générer une valeur ajoutée supplémentaire.

    Dans une approche intégrée, l’alphabétisation fonctionnelle facilite l’accès des petits producteurs à l’assistance technique et au conseil de gestion. Elle leur permet de mieux analyser les fondements technico-économiques de leur pratique à travers le conseil de gestion et le conseil à l’exploitation familiale ; enfin, elle renforce la participation aux organisations paysannes (OP) ainsi que, directement ou indirectement, la gouvernance de ces organisations. Par ailleurs, l’alphabétisation permet également d’introduire des notions de sensibilisation à l’alimentation des nourrissons, des jeunes enfants et des femmes enceintes et allaitantes, avec la diffusion de boîtes à images sur différentes thématiques. Des démonstrations culinaires sont également réalisées par des points relais de nutrition identifiés dans chaque groupement, en montrant comment préparer des repas nutritifs à base d’aliments locaux de qualité. Une boutique Consommons guinéen a vu le jour au cours du projet et permet de valoriser les produits locaux dont le riz Böra Maalé Fanyi et le café Ziama, accompagnés par le Gret.

    Le projet Sara a ainsi permis d’initier certaines démarches pour améliorer significativement la sécurité alimentaire et nutritionnelle des acteurs agricoles sur le long terme. Les bases sont jetées et les acteurs se sont engagés vers une amélioration de leurs pratiques. Les enjeux climatiques et de dégradation des écosystèmes sont au cœur des problématiques des projets pour lesquels le Gret va poursuivre ses appuis aux acteurs à partir de fin 2019, en Guinée forestière et en Basse Guinée notamment.

     

    En savoir plus sur le projet Sara

    Vers une autonomisation de l'agriculture familiale en Guinée - Filière riz

    Vers une autonomisation de l'agriculture familiale en Guinée - Filière huile de palme

    Consulter la boîte à images agroécologie (Partie 1 et Partie 2)

    Consulter les guides de bonnes pratiques de production de riz

    Consulter les guides de bonnes pratiques de production d’huile de palme

    L’huile de palme en Guinée, une filière pleine de ressources


    Le projet Sara a été réalisé grâce au soutien financier de l’Union européenne. Le contenu de cet article relève de la seule responsabilité du Gret et ne peut aucunement être considéré comme reflétant le point de vue de l’Union européenne.

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