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Cacaoculture durable : Le Fonds africain pour le cacao (ACF) accompagne la société D2 Company Farmers Group dans sa dynamique de production d'un cacao certifié


Pour un meilleur accompagnement dans ses efforts de durabilité, la société D2 Company Farmers Group qui encadre les cacaoculteurs (dont 700 à peu près qui sont certifiés) en activité dans l’arrondissement de Ndikinimeki, département du Mbam-et-Inoubou, région du Centre, a saisi Rainforest Alliance. La démarche qui a prospéré a permis à l’entreprise déjà certifiée Rainforest Alliance de bénéficier d’un appui financier du Fonds africain pour le cacao (African Cocoa Fund, ACF en anglais), instrument financier mis en place par Rainforest Alliance, afin de supporter les efforts des producteurs ou des groupes de producteurs qui veulent aller vers la durabilité, qui y sont déjà ou qui en expriment le besoin, tout en les aidant à préserver les paysages locaux en Afrique de l’Ouest et du Centre. A ce titre, D2 Company Farmers Group a bénéficié d’un financement de près de 50 000 dollars, soit à peu près 30 millions de F, pour le soutien aux cacaoculteurs.

Lors de l’atelier de lancement du projet d’appui de la société à la production d’un cacao durable, le 28 février 2024 à Ndikinimeki, la représentante du point focal ACF de Rainforest Alliance, Annite Onana, a indiqué que le projet va s’étendre sur six mois. « Le projet African Cocoa Fund est du pain béni pour la société D2 Company Farmers Group. A un moment donné, les planteurs se décourageaient déjà dans la production du cacao, compte tenu de la conjoncture. Aujourd’hui, l’appui de Rainforest Alliance incite les planteurs à s’investir plus dans la culture du cacao, puisqu’ils savent qu’il y a une plus-value après la vente du cacao. En plus de la vente du cacao, on attend une prime qui va venir après », se réjouit le directeur général de D2 Company Farmers Group et représentant de la société à Ndikinimeki, Armel Diffo Sokeng. 

Une activité adossée aux objectifs du projet COBALAM, initiative du Fonds mondial pour l’environnement (GEF) et d’ONU-Environnement  

A en croire le directeur exécutif de l’organisation Services d’appui à la protection de l’environnement et au développement (Saped), Gervais Nsibeuweula, après les évaluations faites initialement avec Rainforest Alliance et ses partenaires, des besoins ont été exprimés par la société dans deux composantes. La première composante est en lien avec la cartographie des parcelles et la collecte des données géoreférencées, qui est une exigence très importante. « Quand on veut parler de production durable, il faut avoir une maîtrise de l’espace, des superficies », explique l’expert. L’analyse de cette composante a révélé que D2 Company Farmers Group était en train de se lancer dans la cartographie de ses producteurs. « L’appui du projet sera un coup de pouce pour les amener plus vers la certification. Il vient lever un obstacle auquel la société faisait face sur le chemin de la durabilité », soutient Gervais Nsibeuweula.

Le fonds dédié à la géolocalisation permettra en outre à D2 Company Farmers Group de géolocaliser les parcelles qui sont dans son groupe de certificats, afin d’atteindre le pourcentage requis par le standard Rainforest Alliance, c’est-à-dire 100% d’unités agricoles géolocalisées, à travers la prise de polygones de ces plantations. Le standard requis voudrait qu’on soit entre 2000 et 3000 producteurs pour un groupe qui sont encadrés dans le cadre de la certification. « Rainforest Alliance a des exigences qui  voudraient qu’on ne déforeste pas et qu’on ait la position GPS de chaque planteur. L’appui octroyé permet donc de limiter la déforestation et de produire plus sur un espace réduit avec de bonnes pratiques agricoles », souligne le Dg de D2 Company Farmers Group.

Le projet ACF-D2 Company s’inscrit en droite ligne avec les objectifs de l’initiative « Eliminer les obstacles à la conservation de la biodiversité, à la restauration des terres et à la gestion durable des forêts grâce à la gestion du paysage par la communauté » (Conserving Landscape through Community Based Landscape Management ou COBALAM en anglais). Elle a été approuvée par le Fonds pour l’environnement Mondial (GEF en anglais, ndlr) en février 2020 et est mise en œuvre par ONU-Environnement et le ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable (Minepded), en partenariat avec l’Ong Rainforest Alliance. La période va de 2020 à 2025.

4000 plants d’arbres fruitiers et à valeur économique seront mis en terre

Le deuxième besoin issu de l’évaluation a montré que les problématiques liées à l’ombrage et à la restauration des terres et espaces dégradés étaient importantes dans la zone des plantations encadrées par D2 Company Farmers Group. Ce besoin sera adressé à travers une nouvelle composante du projet, qui va s’attaquer à l’élaboration participative avec D2 Company Farmers Group, d’une stratégie de restauration qui va être une étude conduite à l’échelle du paysage des besoins en termes d’espèces d’arbres qui peuvent être utilisés et qui sont compatibles avec la communauté, d’un point de vue social, économique et culturel, qui pourront être utilisés pour restaurer l’espace. « L’autre aspect sera la mise en place d’une pépinière et la dotation de près de 4000 plants d’arbres indigènes et fruitiers, qui serviront à renforcer l’ombrage, restaurer les sols et diversifier les revenus des producteurs à travers les fruits issus de ces arbres », confie le directeur exécutif de Saped. Ladite pépinière permettra de restaurer 1000 hectares de plantations de cacao, de terres en jachère et d’autres zones dégradées avec des d’espèces d’arbres, y compris un mélange d’arbres indigènes adaptés localement. 

Le fait de garder un système de production sous ombrage, prenant en compte les considérations en lien avec l’écosystème et l’environnement, est tout aussi important pour produire plus en dégradant moins. « Le but sera également d’accompagner les producteurs sur les techniques de production durable. La certification c’est dans l’agriculture durable. Il est possible de maximiser la productivité sur des parcelles existantes plutôt que d’étendre les plantations tous azimuts. C’est le discours que nous voulons porter. On peut travailler sur les parcelles existantes afin d’améliorer les rendements et de rendre plus de services écosystèmiques », poursuit M. Nsibeuweula.  

Plus de visibilité dans la chaîne de production du cacao et halte au phénomène des coxeurs

Pour l’Ong Rainforest Alliance, l’aspect lié à l’ombrage est une donnée essentielle. « Nous avons un taux d’ombrage qu’il faut respecter et qui est mesuré grâce aux essences naturelles. Avec l’itinéraire technique traditionnel que les producteurs mettent en œuvre concernant la culture du cacao, nous avons observé que ceux-ci commencent par couper une bonne majorité des arbres. Parfois, lorsque ce genre de plantations rentre dans le programme de certification de Rainforest Alliance, il y a des efforts à faire pour l’ombrage, sous la base des arbres forestiers naturels », indique Annite Onana, Associate Member Monitoring à Rainforest Alliance. C’est ce qui justifie l’appui du fonds ACF auprès de D2 Company Farmers Group, pour accompagner ses producteurs à intégrer des arbres naturels dans leurs systèmes agroforestiers.

Pour l’Ong, l’intérêt derrière cette démarche est de mieux assurer la protection des forêts tropicales. L’idée étant, dans le secteur cacao, d’accompagner les producteurs vers une production durable, c’est-à-dire qui ne porte pas atteinte à nos forêts et qui contribue à améliorer les conditions de vie des populations, notamment des communautés riveraines des forêts ainsi que des producteurs, martèle Annite Onana. D2 Company Farmers Group est d’autant plus heureux de s’aligner à un tel processus. « Le cacao certifié est d’abord un label reconnu de par le monde. En étant certifié, on a la possibilité d’avoir plusieurs partenaires commerciaux. Quand on est certifié, on produit un cacao de qualité supérieure. Cela permet également d’avoir une bonne traçabilité. Dans le secteur commercialisation, cela permet aussi d’éliminer les coxeurs, puisqu’à la longue, un acheteur sera abonné à un planteur. On ne pourra plus acheter de manière désordonnée. Ce qui permet d’éliminer ceux qui entrent dans le circuit de manière illicite. Le planteur vend désormais le cacao avec le point GPS de son champ. Cela permet qu’on puisse donner une identité visible et traçable à un planteur », précise Armel Diffo Sokeng.

Le cacao certifié accroît la visibilité du label Cameroun

La société D2 Company Farmers Group revendique à peu près 700 planteurs qui sont déjà certifiés, dont 25% de femmes. Lors de la dernière saison cacaoyère 2023-2024, la société a produit 1200 tonnes, avec une proportion de 30 à 40% pour le cacao certifié. L’autre plus-value d’un tel projet est une plus grande visibilité du cacao Made in Ndikinimeki. Ce cacao, indique M. Diffo Sokeng, a la particularité d’être bien fermenté et d’avoir des quantités importantes en termes de production. Position partagée par le directeur exécutif de Saped pour qui, à l’instar des autres bassins, le Grand Mbam en général est un grand bassin de production au Cameroun. « L’idée était d’avoir une intervention au cœur même de la région du Centre, pour pouvoir à terme, avoir un effet boule de neige, pourquoi pas avoir le plus de producteurs possible dans les plus grands bassins intéressés par les questions en lien avec la durabilité », fait observer notre interlocuteur.

Actuellement, le cacao connaît une embellie importante en termes de prix. Le cacao camerounais gagne des prix à l’international et se distingue de par son goût, ses propriétés et son système de production. Depuis le 5 mars dernier, le prix du kg de cacao s’est établi à 4225 F, contre 3300 F en février dernier. C’est le résultat des dernières opérations de ventes groupées de fèves de cacao qui se sont déroulées à Abong-Mbang dans la région de l’Est-Cameroun. Lors de la campagne cacaoyère 2022-2023, le prix maximum payé aux cacaoculteurs était de 1480 F le kg. « Ces prix confortent le statut des producteurs de cacao du Cameroun comme parmi les mieux rémunérés au monde…Si on se réfère aux campagnes précédentes, le prix au producteur aura été multiplié par trois, soit une évolution à la hausse de 200%, de très loin supérieure à celle de l’inflation dans notre pays », précisait un communiqué du ministre camerounais du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, en février dernier.   

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